Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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BLACK PANTHER
- Par asbl-creabulles
- Le 15/02/2018
Un film de Ryan Coogler
Acteurs: Chadwick Boseman, Michael B. Jordan, Lupita Nyong'o, ...
Genres: Action, Aventure, Science fiction, Fantastique, Super-Héros
Nationalité: Américain
Date de sortie: 14 février 2018
Durée du film: 2h 15minJ'ai vu Black Panther en avant-première. J'ai aimé... Beaucoup.
Le fan de l'univers Marvel et de sa transposition sur grand écran (MCU*) qui est en moi a été comblé: de l'action, des effets spéciaux implacables, un lien avec d'autres personnages et films qui entretient la cohérence d'ensemble (même si, cette fois-ci, il est un peu plus ténu que d'habitude et se limite à quelques personnages et allusions).
On sent un souci permanent, de la part de Marvel, de réinventer régulièrement son approche du MCU pour éviter ou retarder la lassitude qui pourrait gagner après dix ans et presque la vingtaine de films. C'est là qu'est le vrai succès de ce film: après le dépaysement dans l'espace (apporté par Thor Ragnarok et les deux opus des Gardiens de la Galaxie), après celui apporté par les autres dimensions et la magie (Dr Strange), Marvel nous dépayse en nous faisant voyager ... en Afrique. Certes, une Afrique imaginaire, dans un pays caché qui ne l'est pas moins: le Wakanda. Mais une Afrique belle, colorée, riche de traditions et de mythologies qui survivent malgré l'explosion des technologies et cohabitent avec elles dans une élégance racée et esthétique (un énorme coup de chapeau pour le design, les costumes et les décors).
Une Afrique mythologique, donc... Et une vraie charge politique pour un développement dans ce continent, sur un modèle différent et adapté... qui est clairement notifiée dans la première séquence post-générique. Ainsi, ce sont les "Blancs" – représentant l'Occident riche – qui apportent désordre et dissensions. En même temps que ce qui mine le Wakanda, c'est son enfermement, sa peur du dehors et son repli sur une ressource rare.
Aussi, outre des personnages impressionnants par leur allure et les prouesses physiques qu'ils affichent (servis par un casting au top), outre des technologies et des engins qui feront passer James Bond pour un ringard, des courses poursuites fabuleuses dont l'issue n'est pas toujours celle attendue, c'est bien un film alliant divertissement pur, dépaysement total (qui m'a souvent renvoyer à l'émerveillement d'Avatar) et sous-texte politique sur un nécessaire (et possible) développement sur un modèle qui doit être adapté à l'Afrique qui nous est proposé, en plus du chemin initiatique d'un homme qui passe "de fils de" à "père de" en découvrant la charge, les peurs et les risques de l'exercice du pouvoir. Une grande richesse thématique qui se déploie sur un métrage agréable, ni trop court, ni trop long compte tenu du contenu.
Je suis personnellement étonné que Marvel, rentré depuis quelques années dans le giron de Disney (avec quelques remous dans le monde de la BD) soit parvenu à maintenir ce qui fait sa marque et sa particularité: l'alliance de personnages forts ET d'un sous-texte dans l'air du temps (Spiderman et la peur de devenir adulte et responsable, Hulk et la peur du nucléaire, Luke Cage et le Black Power, les X-Men et le racisme...).
Dans l'attente du prochain choc, le prochain Avengers qui réunira l'essentiel des pierres taillées depuis 10 ans dans un ouvrage qu'on espère grandiose, ce Black Panther est une très belle pierre portée à l'édifice d'une étonnante cohérence.
* Marvel Cinematic Universe / Univers cinématographique Marvel
Article: Frédéric Briones
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BRÛLEZ MOSCOU
- Par asbl-creabulles
- Le 12/02/2018
Brûlez Moscou
Scénario : Kid Toussaint
Dessin : Stéphane Perger
Couleurs : Stéphane Perger
Dépot légal : le 09 février 2018
Editeur :
Collection: Signé
Nombre de planches :57Moscou, 1812. Le capitaine Anatoli Lenski est incarcéré à la prison de l'Ostrog, non loin de Moscou. Un jour, au réfectoire, lorsque son ami Sergueï en voyant entrer Kolia, que tous surnomment l'Ogre de Moscou, lui apprend que c’est un tueur d'enfants, ni une ni deux Anatoli se jette sur lui pour le tuer mais les deux hommes seront immédiatement séparés et jetés au cachot. A Moscou, le gouverneur de la ville, le comte Fédor Rostopchine, sait qu’il sera impuissant face à la grande armée de Napoléon qui s’apprête à envahir la ville. Pas question pour lui de se rendre en laissant Moscou passer aux mains de l'ennemi français. Mieux vaut brûler la ville qui ne sera plus qu’un champ de ruines. Mais si sa décision est prise, il ne va pas s’en charger lui-même ni ses hommes. En revanche, les prisonniers, pour la plupart des criminels, de la prison de l'Ostrog pourraient s’en occuper. Il les fait donc libérer, leur laissant carte blanche pour saccager la ville qui a fait d’eux des prisonniers, pour piller, massacrer, violer et réduire tout ce qui reste en cendres. En quittant la prison, Kolia prévient Anatoli, qui n’a pas été libéré comme les autres, qu’il va retrouver sa famille à Moscou et se déchaîner sur eux. Anatoli doit donc absolument trouver un moyen de s’enfuir pour protéger sa femme Tatiana et son fils Oleg et empêcher l’Ogre de les trouver avant lui.
Mon avis: Kid Toussaint nous livre un récit plutôt original sur fond d’événements de l'Histoire avec un grand H à travers des personnages aussi connus que Napoléon et sa Grande Armée aux portes de Moscou mais bien d'autres personnages de fiction plus atypiques, de par leur rang social, évidemment les meurtriers, les asociaux ou les marginaux que sont les prisonniers mais aussi, et c’est ce qui est le plus intéressant, de par leur degré de folie que je ne peux développer ici sous peine de dévoiler certains aspects du récit. En fait, chacun manifeste un grain de folie plus ou moins important, un secret enfoui, même les autorités de la ville de Moscou qui elles aussi ont longtemps protégé le leur. Kid Toussaint est un scénariste prolifique qui sait nous surprendre, nous épater quel que soit l'univers qu'il aborde puisqu'il possède à son actif un assez large éventail de titres (Holly Ann, Magic 7, Notorious Circus, 40 éléphants, etc.) en collaboration avec différents dessinateurs et donc dans des styles très variés.
Au dessin et à la couleur, Stéphane Perger nous propose avec "Brûlez Moscou" un one shot évidemment flamboyant puisqu'il se caractérise par une prédominance des tons orange et rouge en accord avec le thème du feu de l'enfer qui s’abat sur Moscou et ses habitants. On est soufflé par un graphisme d’une telle audace, des cases où les traits vont à l'essentiel, des couleurs d'une énergie folle et puissante, des visages impressionnants et charismatiques – Anatoli, Sergueï, Kolia ou la "comtesse" Agneska, une amie de Tatiana, réellement de toute beauté –, un découpage efficace, de superbes vues d'ensemble avec des cadrages audacieux très réussis, en particulier ceux de la ville en feu.
À noter en fin d'album, un cahier graphique contenant plusieurs belles illustrations et un supplément historique bien utile. Un très bel album dans la collection Signé du Lombard dont on regrette qu’il n’aura pas de suite ou de spin-off car certains personnages auraient amplement mérité d’être développés et approfondis.
À l’occasion de la sortie de l’album, Filigranes et Le Lombard ont reçu les auteurs ce samedi 10 février 2018 pour une brève conférence/présentation animée par Jacques Schraûwen de la RTBF, suivie d’une séance de dédicaces dans les locaux de la librairie (39 avenue des Arts à 1040 Bruxelles).
SDJuan
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GRIMR
- Par asbl-creabulles
- Le 11/02/2018
La Saga de Grimr
Scénario : Jérémie Moreau
Dessin et Couleurs : Jérémie Moreau
Dépôt légal : Septembre 2017
Editeur :
Planches : 227
Fauve d'Or Angoulême 2018Grimr Enginsson ou la saga du fils de personne, est le récit initiatique d’un jeune orphelin islandais au 18e siècle qui essaie de se construire dans un monde où il n'a rien. Dès les premières planches, sa famille entière est anéantie par une éruption volcanique. Le ton est donc donné: le destin ne lui fera pas de cadeau.
"Je n’ai pas de nom, pas de famille, pas de terres, pas de possessions. Pour eux je ne suis personne. Mais je vais leur montrer qui je suis. Le temps d’une vie. Chacun de mes actes comme autant de pierres posées pour construire l’édifice final. Car ce qu’ils ne savent pas c’est que j’ai un volcan dans l’âme."
Grimr, rabaissé au rang de bête, traqué, puisera sa force dans le rejet. Son épopée deviendra une nouvelle saga islandaise: la saga de Grimr.
Le scénario de Jérémie Moreau est bien construit et librement inspiré par "La cloche d’Islande", un monument de la littérature islandaise.
Dans la BD, nous retrouvons l’Islande du 18e siècle appauvrie et affamée, sous le joug des danois méprisants, décrite par Laxness, prix Nobel en 1955. L’Islande est dans une misère noire, famines et épidémies se succèdent. On coupe des mains pour un bout de corde volée …
Pour conter la saga de son héros solitaire, Jérémie Moreau a travaillé à l'aquarelle, technique où on ne peut pas rajouter de lumière. Peu de textes, des mots justes et rugueux comme des pierres. L’aquarelle traduit la montagne, colle à l’histoire, renforce les ambiances rugueuses des paysages et des personnages. Les décors sont partie intégrante de l’histoire. Les expressions des personnages sont humaines, rugueuses voir caricaturales.
Il s'agit du quatrième album de Jérémie Moreau, qui a déjà reçu le prix de la BD scolaire en 2005, le prix Jeune talent au festival d'Angoulême et celui de la meilleure BD francophone en 2012 et le prix des libraires de BD en 2013.
Michel
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La COUR DES MIRACLES
- Par asbl-creabulles
- Le 08/02/2018
Tome 1 Anacréon, Roi des gueux
Scénario : Stéphane Piatzszek
Dessin : Julien Maffre
Couleurs : Laure Durandelle
Dépot légal : Le 24 janvier 2018
Editeur : Soleil Productions
Collection : Quadrants
Nombre de planches : 62Anacréon est à sa cour ce que Louis XIV est à la sienne, c’est-à-dire le Roi, à la différence près que l’entourage d’Anacréon se compose de mendiants, de voleurs, d’êtres difformes, de meurtriers et, plus généralement, de tout ce qu’il y a de plus vil dans les rues. Hormis cela, il est tout autant respecté sinon plus. En réalité, il y a une autre différence: Anacréon est le 84e roi de Thunes. Mais comme tout souverain, il ne déroge pas à la règle en ce qui concerne sa succession. Et pour reprendre sa place, qui de mieux que son propre fils? C’est pourquoi Anacréon fait le maximum pour lui donner toutes les chances d’y parvenir. Il s’efforce de le mettre en avant chaque fois que possible et de l’entourer des personnes les plus influentes. Il le place sous la protection de sa sœur, la Marquise, qui l'a toujours préservé de tous les dangers.
Mon avis: Découvrir la cour des Miracles de manière plus approfondie que l’évocation qu’en fait Victor Hugo dans son roman Notre-Dame de Paris m'a tout de suite attiré. Déjà, la couverture est très attractive en affichant le roi des bas-fonds sur son trône. Il ne s’agit plus ici du Paris des cartes postales même si le récit ouvre également une fenêtre sur la haute société. Stéphane Piatzszek nous donne parfois le vertige avec son scénario bien construit et entraînant. Bien construit car il ne cesse de nous surprendre au fil des pages qu’il s’agisse des manigances répétées d'Anacréon avec les autorités pour garder son titre de roi, de ses efforts et manœuvres pour bien s’entourer et assurer cette succession tant espérée qui n'arrivera pas ou encore des fourberies et trahisons pouvant survenir à tous moments et de toutes parts et des innombrables règlements de compte. Le scénario est entraînant car on a envie de connaître la suite au plus vite dès qu’on est plongé dans le récit.
Les dessins confiés à Julien Maffre sont nets et détaillés mais plus nerveux, plus hachurés que dans ses séries précédentes (La Banque, Stern), un style qui s’accorde parfaitement avec ce nouvel univers. Il montre autant d’aisance et de crédibilité pour représenter les ruelles malfamées de Paris du 17è siècle, les bordels, etc. que les hauts lieux, places et palais, nous offrant ainsi un bel équilibre pour mieux nous imprégner de l'histoire. Il en va de même des scènes parfois dures, parfois drôles, souvent peuplées de nombreux personnages, dont certains truculents, en tout cas tous aisément reconnaissables. Les cadrages et angles de vue variés et le découpage dynamique sont réussis haut la main et d’autant plus appréciés qu’ils rendent la lecture de cet album très agréable.
SDJuan
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MAÎTRES INQUISITEURS 8
- Par asbl-creabulles
- Le 07/02/2018
Tome 8 . Synillia
Scénario : Sylvain Cordurié
Dessin : Elia Bonetti
Couleurs : Digikore Studios
Couverture : Olivier Héban et Jean-Luc Istin
Dépot légal : le 24 janvier 2018
Editeur : Soleil Productions
Collection : Heroic Fantasy
Format : Grand format
Nombre de planches : 48L'Inquisition a du mal à se relever. Dans la région située entre les terres d’Ecorce et le Kardunn, là où la Confrérie royale des Chênes est restée hostile à l'Inquisition, un massacre a été perpétré au monastère de Kandvost. Plusieurs prêtres ont été sauvagement assassinés. Roland Isandar, le chef du village, fait appel à l'Inquisition pour enquêter sur cette tuerie. Les grands maîtres de la cité d’Arès dépêche sur place Synillia qui, bien que non mage et sans aucun pouvoir, a été élevée au rang de Maître Inquisiteur. Elle sera accompagnée de sa partenaire elfe, Eldeween, pour mener l’enquête. L’arrivée des deux femmes n’est pas très bien accueillie dans cette région plutôt machiste. Refusant de se laisser démonter, Synillia redouble d’efforts pour se montrer digne de son rang et se faire respecter de tous. Elle se met aussitôt en quête de réponses et se rend vite compte que l'assassin, qui a agi seul, est doté d’un immense pouvoir, un pouvoir tel qu'il n'aura pas peur de se montrer et de venir les défier.
Mon avis: L'originalité de ce tome est de mettre en scène dans le rôle du maître inquisiteur une femme non mage et n’ayant aucun pouvoir. Le scénario échafaudé par Sylvain Cordurié va donc s’appuyer sur son intelligence et son habileté à mener l’enquête parmi des ennemis exclusivement masculins plutôt costauds. Jolie, fine épéiste et bien accompagnée, elle leur tiendra tête et démontrera qu'elle a toute sa place parmi les Maîtres Inquisiteurs. On sent bien qu’avec ce second cycle, l'univers des Maîtres Inquisiteurs prend un nouveau tournant, ou du moins qu'il intègre de plus en plus d'éléments nouveaux comme cette Guilde des Assassins et que les ennemis de toujours comme les Mannlanders peuvent malgré tout devenir les alliés d'un jour. Un scénario qui tient donc bien la route avec sa succession de rebondissements surprenants.
Les dessins d’Elia Bonetti sont d’un abord très agréable. Le trait est fin et détaillé, nous offrant de belles héroïnes en tenue de guerrières mais aussi des combattants impressionnants. Les personnages sont tous facilement reconnaissables. On appréciera de belles scènes de combat et de larges vues d'ensemble offrant de beaux décors intérieurs et extérieurs. Si la mise en couleurs réalisée par Digikore Studio est globalement bien équilibrée, sur certaines cases on aurait préféré des tons moins sombres qui écrasent un peu trop le dessin soigné et précis d’Elia Bonetti. Un bon récit du genre agrémenté d’une très belle illustration, confirmant une fois de plus la bonne qualité d’ensemble de cette collection.
SDJuan
Voir nos autres chroniques de la série:
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AIR LIBRE 1988-2018
- Par asbl-creabulles
- Le 06/02/2018
Catalogue anniversaire
Voici déjà 30 ans que Jean Van Hamme et Philippe Vandooren, tous deux directeurs au sein des éditions Dupuis, ont eu l'idée de lancer une nouvelle collection que Jean Van Hamme a choisie d’appeler "Aire Libre" en opposition à "air conditionné" comme pouvait l'être à ses yeux la bande dessinée à cette époque. Si Van Hamme reconnaît que cette collection était peut-être un peu trop différente pour l’époque – d’où la création ensuite par Vandooren de la collection "Repérages" plus tournée vers un public plus jeune – Aire Libre s’est pourtant imposée comme une collection phare.
Elle nous a fait découvrir des albums et romans graphiques de qualité produits par de grands auteurs confirmés, dont le tout premier Cosey qui est à l'honneur sur la couverture de ce catalogue, mais aussi par de jeunes talents pour notre plus grand bonheur. Cette collection a suscité un grand intérêt de la part du public et connaît un franc succès même si étant très éloignée du style dit "gros nez" qui désigne l’école belge (Spirou, Gaston Lagaffe, Achille Talon, etc.), elle est d’une rentabilité marginale chez Dupuis.
Aire libre a accueilli les plus grands noms comme Hermann, Gibrat, Cosey, Will, Hausman, Lax, Lepage, Berthet, Conrad, Frank Pé, Cabanes, Pellejero, Makyo, Servais, Loustal, Pedrosa et s’est ouverte à de plus jeunes talents comme Javi Rey, Blier ou Olivier Cinna. Ce catalogue est très facile à consulter puisqu'il nous présente les albums dans l’ordre alphabétique des noms de leurs auteurs (dessin). Chaque entrée de cette longue liste est agrémentée des couvertures (nouvelles le cas échéant) et de résumés mais aussi d’illustrations dont certaines ont été encartées dans des tirages limités ou utilisées comme jaquette depuis 2008 et de bien d’autres superbes illustrations de Gibrat, Hyman, Cosey, etc.
Ce répertoire est à peu près exhaustif puisqu’il recense près de 200 ouvrages publiés entre 1988 et 2018 y compris les dernières parutions comme "Cinq Branches de Coton Noir" déjà chroniqué sur notre site (ici). Chaque auteur bénéficie d’une mini-biographie en fin d’album.
Pour les amoureux de beaux ouvrages joignant l’utile à l’agréable, ce recueil anniversaire constitue une belle pièce de collection incluant également quelques artbooks.
SDJ
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HILLBILLY
- Par asbl-creabulles
- Le 04/02/2018
Tome 1
Scénario : Eric Powell
Dessin : Eric Powell
Couleurs : Eric Powell
Traduction : Nick Meylaender
Dépot légal : 17 janvier 2018
Editeur :
Collection : Contrebande
Format : Format comics
Nombre de planches : 92Costaud, barbu et rugueux, Rondel que tout le monde appelle "Hillbilly", ce qui signifie "habitant des montagnes" mais aussi "bouseux" ou "péquenaud" en argot, est né sans père et sans yeux. Alors qu’il n’est encore qu’un enfant, sa mère et lui sont rejetés par les villageois et doivent fuir dans les collines. Un jour, alors qu’il vient de libérer un corbeau coincé dans un piège, celui-ci se transforme en sorcière disant s’appeler "Mamie". Pour le remercier de l’avoir sauvée du traquenard tendu par sa rivale Eldora, elle tient à lui offrir en cadeau un couperet dérobé à Lucifer en personne qui l'utilisait pour découper et dévorer des chrétiens, mais aussi la vue, non pas celle des humains, mais une vision bien plus mystique, presque surnaturelle. En fait, ce cadeau est maudit car elle l’influence pour aller tuer Eldora qui entretemps aurait assassiné sa mère, faisant verser à Hillbilly des larmes noires qui vont rester à jamais gravées sur ses joues. Depuis, il s’est juré de tuer toutes les sorcières et forces des ténèbres des collines pour se venger. Désormais, s’il lui est arrivé de côtoyer la mort en personne, il affronte des sorcières comme la "Vieille Mère", "Hattie" et bien d'autres encore, tout en étant confronté à la trahison et à la souffrance des humains.
Mon avis: Après "Big man plans" en 2016, Eric Powell nous revient seul au scénario et au dessin avec "Hillbilly". Cette nouvelle série est sa façon de rendre hommage au livre "Suppose You Met A Witch" (supposons que vous croisiez une sorcière) de Ian Serraillier illustré par Ed Emberley. Au départ, le scénario se voulait gore et réservé à un public adulte mais lorsqu’il a commencé à dessiner, Eric Powell a choisi d’en faire une série tous publics. Artiste autodidacte, il a surtout travaillé pour les grosses maisons d'éditions (DC, Marvel, Dark Horse) sur les grandes séries comme Avengers, Batman, Black Panther, Buffy, Hellboy ou les X-Men, mais également sur des productions plus personnelles. Il a été plusieurs fois récompensé, notamment par le Prix Eisner Awards pour The Goon! Souhaitons que Hillbilly suive le même chemin car cette série décape dans le genre dark fantasy (ambiance très sombre et pessimiste dans laquelle le Mal prend le dessus sur le Bien), mêlant horreur, surnaturel et un soupçon de gore avec des passages plus tendres mettant en scène des gamins innocents ou la copine Lucille de Hillbilly, une ourse vieille fille grincheuse et capricieuse mais d'une loyauté sans faille.
Les illustrations d'Eric Powell sont de toute beauté, avec des personnages cruels et monstrueux (sorcières et démons) très impressionnants, surtout la Mort ou la Guérisseuse. On trouve aussi des personnages très tendres comme les gamins ou Lucille et enfin d'autres bien truculents comme ce vieil homme armé d’une grande épée et accompagné d’un chien aux dents de sabre. Il passe de l'un à l'autre avec une facilité déconcertante en recourant à des effets de dégradé dans les tons gris, verdâtre ou orangé, etc., parfois entrecoupé d’éléments rouge vif. Eric Powell a montré qu’il savait créer un nouvel univers avec Hillbilly qui se présente comme un conte mais à l’ambiance plutôt sombre et émaillé de sorcellerie. Il aurait été dommage de le laisser dormir dans les tiroirs. Plongez-vous avec Hillbilly dans les bois, les villages des collines, mais n'y allez pas seul car ces lieux sont souvent fréquentés par des sorcières sans foi ni loi et surtout sans cœur. Cet album regroupe les quatre premiers épisodes publiés chez Albatross et le prélude à la série publié sur le site Comixology, ainsi qu’en bonus un carnet graphique en fin d’album. Un livre à ne pas rater!
SDJuan
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RIO 3
- Par asbl-creabulles
- Le 01/02/2018
Tome 3: Carnaval sauvage
Scénario : Louise Garcia & Corentin Rouge
Dessin : Corentin Rouge
Couleurs : Corentin Rouge
Dépot légal : 17 janvier 2018
Editeur : Glénat
Collection : Grafica
Nombre de planches :80Très affecté par la mort de sa petite sœur Nina, Rubeus s’efforce tant bien que mal de mener une vie normale dans sa favela carioca. Tout en s’impliquant dans l’ONG de son père adoptif, il cherche à améliorer la vie de ses concitoyens et décide d’ouvrir sa propre boutique à bas prix, ce qui ne plaît pas du tout à Zé Rico qui voit en Rubeus un danger pour ses affaires et pour son élection. Lors d’une séance de spiritisme dont elle seule a le secret, une femme nommée Capitu, dont on dit qu’elle est une sorcière qui parle aux esprits, parvient à subjuguer Rubeus. En fait, elle a pris la voix de la mère de Rubeus pour le faire tomber sous son emprise. Mais est-elle vraiment ce qu'elle prétend être? Entretemps Rubeus continue son enquête pour découvrir qui a tué sa petite sœur, quitte à affronter ses anciens amis de galère dont certains ont très mal tourné et sont devenus de vrais tueurs tel son ancien ami Mozar mais il y a bien pire encore.
Mon avis: Tout comme son duo d’auteurs, ce troisième tome déborde d’entrain et d’énergie! Le scénario de Louise Garcia est mené tambour battant du début à la fin et nous fait plonger dans l’univers si typique et caractéristique de Rio de Janeiro avec son superbe carnaval et ses belles filles, la sorcellerie mais aussi ses favelas insalubres, ses trafiquants de drogue, ses gangs divers et variés, ses gangsters devenus électrons libres, ses hommes politiques véreux, ses flics corrompus et leurs trop nombreuses victimes souvent innocentes (comme Nina) mais aussi les ONG ou de simples particuliers qui font ce qu'ils peuvent pour aider les défavorisés à l’image de Rubeus qui se donne à fond pour venir en aide aux habitants de sa favela, en se faisant manipuler de toute part et en essayant de sauver sa peau quand son esprit de vengeance le pousse trop loin. La tension ne retombe jamais.
Au dessin, on retrouve avec autant de plaisir Corentin Rouge. Son travail est toujours à la hauteur de nos attentes, caractérisé par son trait fin, des cases détaillées aux décors multiples, des personnages marquants et hauts en couleurs, des plans variés mais toujours efficaces et parfois étonnants (comme ce gros plan sur des jambes).
La mise en couleurs de l’album atteste une nouvelle fois d’un savoir-faire, d’une qualité et d’une efficacité avérés. Sur la couverture mais aussi sur des planches ou cases contenant beaucoup d’éléments, les couleurs sont au top. Cela représente un énorme travail sur des albums de 62 pages pour les deux premiers et 80 pages pour ce troisième tome!
Une mini-série réussie à inscrire dans les incontournables de la BD du genre, dont on attend le prochain et dernier tome avec impatience.
SDJuan
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