Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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GASTON EN DIRECT DE LA RÈDACTION.
- Par asbl-creabulles
- Le 13/04/2018
Souvenez-vous, on a tous tenu entre nos mains chez soi ou chez un ami, chez le dentiste, chez le coiffeur ou ailleurs, une histoire de Gaston Lagaffe, en "strip" ou en pleine page d’un album. Et on est souvent vite devenu accroc – au point d’en redemander – à l’histoire d'amour de M'oiselle Jeanne, à ce policier toujours prêt à bondir sur Gaston pour lui coller une amende, aux ballades de Gaston à bord de sa fiat 509, à ses inventions aux conséquences souvent inattendues et parfois catastrophiques, à sa cuisine plus qu'expérimentale, etc. En revanche, les non-initiés sont souvent passés à côté des coulisses racontées par Delporte sous les noms de Prunelle ou Fantasio comme une sorte de journal intime de la rédaction.
Car c’est là que vous auriez pu vivre, sorties tout droit de l’imagination fertile des auteurs, des situations tristes comme le renvoi de Gaston Lagaffe du journal de Spirou, puis l'engouement témoigné par les lecteurs pour qu’il soit réembauché après l’appel à l'aide poignant et bouleversant lancé par Fantasio, ou d’autres plus farfelues comme l’histoire de la ficelle tendue entre la fenêtre de Gaston et la maison d'en face, les dégâts provoqués par un simple trou de 2 cm de diamètre à la foreuse, les drames de la circulation, l’auscultation d’une tuyauterie au moyen d’un stéthoscope, diverses publicités ingénieuses, les nombreuses signatures de contrat avortées sans raison (d'après Gaston), et bien d'autres encore.
Cet avis ne serait pas complet sans évoquer les multiples notes tout aussi croustillantes publiées sous forme d'encadrés intitulés "Fables express", "Avis ou note au personnel", "Étrange piraterie", ou "Ne dites pas... mais dites ...." ou "Il ne faut pas confondre ... et ...". Elles viennent parfois comme un cheveu sur la soupe mais produisent justement l’effet escompté.
Il faut reconnaître qu’on ne s'ennuyait jamais à la rédaction du journal de Spirou. Un jour, c’est Dan Daubeney qui débarque avec son fils et un lionceau pour prouver à ses collègues qu'il a réuni toute la documentation nécessaire pour sa prochaine histoire mettant en scène un jeune garçon et un lionceau. Une autre fois, c'est un singe qui vient mettre l'ambiance au studio !
Cette parution célébrant les 75 ans du journal de Spirou est aussi l'occasion de fêter le personnage emblématique qu'est Gaston dont le père, Franquin, est arrivé en 1946 en compagnie de Jijé, Morris et Will avec lesquels il a publié les aventures de nouveaux héros nommés Spirou et Fantasio. "En direct de la Rédak" était la rubrique centrale du journal permettant de retrouver les personnages principaux: Fantasio secrétaire de rédaction, Prunelle rédacteur, M'oiselle Jeanne archiviste, Yvon Lebrac du bureau de dessin, etc. Ce recueil tout droit sorti du magazine hebdomadaire constitue un condensé de plusieurs décennies de délires, d’anecdotes, de prises de becs fictives et d’autant plus croustillantes, d’encarts didactiques sur divers domaines et bien d'autres aventures désopilantes. Un superbe volume de 238 pages, largement illustré de nombreux fac-similés des dessins de Franquin en N&B ou à l'aquarelle.
Un incontournable pour tous les admirateurs de Gaston et pour tous ceux qui souhaitent en apprendre davantage sur ce personnage mythique de la BD franco-belge et fétiche de Franquin.
A noter qu’il paraît presque en même temps que le tome 1 d’un autre ouvrage collectif dans la série "Gaston Méga Hors série" intitulé "Gaston, le gaffeur qui avait du nez" (chroniqué ici).
SDJuan
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THÉODORE POUSSIN 13
- Par asbl-creabulles
- Le 11/04/2018
Tome 13: Le dernier voyage de l'Amok
Scénario : Frank Le Gall
Dessin : Frank Le Gall
Couleurs : Robin Le Gall
Dépot légal : Avril 2018
Editeur :
Collection : Grand Public
Nombre de planches :64Théodore Poussin a tout perdu. Aux côtés de monsieur Novembre, il ne cesse de réfléchir aux moyens de récupérer son île aux pirates et sa cocoteraie et de se venger de celui qui l’a dépossédé. Aujourd'hui s’il n'a plus rien, plus un sou, il a la ferme volonté de se relever. Se sentant animé par le besoin d'entreprendre une expédition punitive, il décide de monter un projet pour se venger du capitaine Crabb et de ses hommes. Rendez-vous est pris avec Buck pour financer son voyage. Les imprévus se succèdent et même un mystérieux monsieur Colombe surgit pour faire capoter l’affaire. Mais au final Théodore obtiendra de Buck l’aide tant espérée pour son expédition. Il peut donc acheter un bateau, le Quangle Wangle rebaptisé Amok, et engager une trentaine d’hommes d'équipage, des "durs à cuire", parmi lesquels Crabb aurait bien pu avoir infiltré un ou deux espions.
Mon avis: On se réjouit qu’après une longue pause Frank Le Gall ait redonné vie à Théodore Poussin. En réalité cela faisait quelques années déjà qu’il travaillait sur un nouvel album dont Dupuis a publié des planches dès 2013 sur son "blog.dupuis.com" (voir lien ci-dessous) et qui est paru en prépublication sous forme de "Cahiers Théodore Poussin", dans le Journal de Spirou et des quotidiens régionaux. Cette fois, le tome 13 intitulé "Le dernier voyage de l’Amok" est bien là. Ce qui commence comme une simple histoire de vengeance va lentement prendre le cap d'un récit d'aventure mais une aventure à taille humaine, où chaque personnage prend de l'ampleur d’une manière insoupçonnée au départ. C’est avec beaucoup d’humanité que Frank Le Gall nous sort de l'abîme où s'était plongé un Théodore Poussin méconnaissable. On retrouve des personnages humains et intéressants voire charismatiques, avec leurs défauts, leurs faiblesses, leurs moments de rancœur mais qui vont, en tout cas pour certains d'entre eux, évoluer et en sortir grandis. Une aventure de pirates agrémentée de manipulations, de trahisons, de traquenards, mais aussi empreinte d’amitié, de loyauté, et de pardon.
Un récit intelligent, très agréable à suivre grâce à son scénario bien construit qui nous fait découvrir un personnage plus déterminé que jamais à prendre "enfin" les choses en main ! De plus, nul besoin de connaître les précédents albums de la série pour comprendre l’intrigue.
Côté dessin, Frank Le Gall nous revient en force. Si la maquette de couverture s'est modernisée, le contenu dégage toujours autant d’énergie. Ses dessins emblématiques de la ligne claire ont gardé toute leur force. Les arrière-plans et décors sont réalistes sans chercher une parfaite reconstitution historique, à Singapour, sur l’Amok, dans les îles. Les ambiances sont presque palpables, tour à tour sombres, inquiétantes, parfois suffocantes, ou lumineuses, agréables et aérées. Invitation au voyage, cette nouvelle aventure très attendue de Théodore Poussin est une réussite et devrait réjouir les nombreux fans du héros.
A voir: https://www.dupuis.com/seriebd/theodore-poussin/130
SDJuan
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READY PLAYER ONE
- Par asbl-creabulles
- Le 10/04/2018
Un film de Steven Spielberg
Avec Tye Sheridan, Olivia Cooke, Ben Mendelsohn plus
Genres Science fiction, Action
Nationalité Américain
Date de sortie 28 mars 2018
Durée du film: 2h 20minVu cet après-midi le dernier film de Spielberg. "Ready Player One" est le film de divertissement parfait dans l'acception la plus noble et positive du terme.
C'est un film qui embrasse la pop culture de ces 40 dernières années pour en faire un divertissement à large spectre qui va plaire au très grand nombre, de 12 à 50 ans.
Une histoire originale, un univers graphique étonnant mais très cohérent, un sous-texte à contre-courant des tendances actuelles, des effets visuels impressionnants, et surtout des références par dizaines qui embrassent les 40 dernières années de BD, de ciné, de littérature, de fantasy, d'épouvante, de fantastique, de manga, de science-fiction, d'animation, de jeu vidéo.Un film somme, un film synthèse, un film qui balaie une grande part des nombreuses années de la longue carrière de Steven Spielberg et qui est susceptible d'enchanter plusieurs générations de spectateurs.
J. J. Abrams nous avait gratifié en 2011 d'un hommage à l'œuvre de Spielberg des années 80 dans son "Super 8"; la série "Stranger Things" suscite l'engouement en surfant sur la vague nostalgique et vintage qui évoque l'époque idéalisée des 80's; la dernière adaptation de Stephen King, "Ça" de septembre dernier avait situé l'action dans les années 80 (au lieu des 60's).Le grand Steven, en conteur génial et en observateur avisé de notre société, comprend les ressorts intimes de cette tendance et les dépasse, les sublime en nous servant un divertissement parfait, avec des grands méchants (businessmen), des gentils (jeunes, innocents, confrontés à des adultes absents – même lorsqu'ils sont présents), des gens qui rêvent par procuration d'un monde meilleur mais manquent de courage et d'engagement...
Je vous recommande absolument de voir (et revoir) ce film tellement rempli de références et de citations qu'il vous faudra sans doute plusieurs visionnages pour en faire l'inventaire complet (si cela est possible), de vous ébahir lors de la séquence du film dans le film, de sourire quand, transformé en complice du réalisateur et de toute sa bande, vous reconnaîtrez vous-même les nombreuses références citées dans cette œuvre ÉNORME.Fin de la discussion.
Écrivez un message...
Chronique de Frédéiric Briones. Voir son site dédié au ciné ici: http://frederic-briones.com/
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SAN-ANTONIO
- Par asbl-creabulles
- Le 10/04/2018
Tome 1 : San-Antonio chez les gones
Scénario : Michaël Sanlaville
Dessin : Michaël Sanlaville
Couleurs : Michaël Sanlaville
Adapté de l'oeuvre de Frédéric Dard
Dépot légal : 21 mars 2018
Editeur :
Nombre de planches : 92Deux gamins ont disparu et un professeur a été égorgé dans l’école de Grangognant-au-Mont-d'Or, une petite commune de 400 habitants située à une trentaine de kilomètres de Lyon. L'enquête piétine, aucun indice sérieux n’a été relevé, aucun corps retrouvé. Le commissaire San-Antonio et son collègue Bérurier, alias Béru, prennent l'affaire en main. Si l'idée d’un agent d’infiltration apparaît comme une évidence, ce qui l'est moins c'est de faire passer Bérurier, dont tout le monde connaît les méthodes peu orthodoxes, pour le professeur remplaçant. En visite dans l’école, un inspecteur n’aura pas besoin de plus de 5 minutes pour faire un rapport défavorable au sujet de ce professeur ivre et colérique. C'est justement le temps dont San-Antonio a besoin pour comprendre ce qu'il se passe dans cette commune. Sur une photo des plus compromettantes retrouvée dans le sac à dos d'un des enfants figure le prénom d'un des deux disparus. De fil en aiguille, San-Antonio remonte jusqu'au domicile d'une ancienne cantatrice, Léocadie Soubise, chez qui l’on découvre une mallette remplie de photos coquines et qui organisait des parties de jambes en l'air avec les personnes les plus influentes du coin. En progressant dans son enquête, San-Antonio réalise que la drogue en devient un élément non négligeable qu’il va falloir prendre en compte, ou bien....
Mon avis: De la lecture des romans de San-Antonio, j’ai surtout retenu son langage fleuri dont la plupart des mots étaient improvisés ou pure invention. Il me fallait presque un glossaire à portée de main pour comprendre l’histoire alors que certains amis passionnés par ces romans faisaient exprès de jongler avec ces mots nouveaux pour m’énerver.
A la lecture des premières pages de l’album de Michaël Sanlaville, on est vite replongé dans cette ambiance si particulière. Les baffes tombent et pas des moindres, assenées par les mains ou plutôt les paluches du grand Bérurier qui aime la picole, qui pique des colères noires et qui, du coup, n'a plus aucune limite. C'est drôle et cela surprend. Le vocabulaire du grand et gros malabar ne déroge pas à la règle établie par Frédéric Dard.
San-Antonio non plus n'est pas éloigné du personnage du roman, sorte de compromis entre James Bond pour ce qui est du séducteur de ces dames et des méchants en tous genres et des coups de feu qui pleuvent mais sans les gadgets, les personnages d’OSS 117 ou SAS, dont il semble plus proche pour tout le côté chaud et, enfin, les tontons flingueurs pour toutes les baffes qui tombent dru.
Un scénario très dynamique et bien construit, une mise en scène drôle, parfois osée avec des personnages portés sur le sexe mais aussi sur l'alcool tel Bérurier, provocants aussi, un dessin dynamique et efficace alignant les scènes loufoques, truculentes et savoureuses, souvent exagérées pour notre plus grand plaisir et qui remplacent habilement les jeux de mots et termes d’argot des romans, beaucoup de clins d’œil aussi et apparitions de personnalités actuelles comme Gérard Depardieu, Philippe Bouvard, Alain Delon ou Eric Zemmour.
Un livre passionnant, drôle et souvent étonnant pour tous les publics.
SDJuan
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JUSTICE LEAGUE Récit complet n°5
- Par asbl-creabulles
- Le 08/04/2018
Titans : Bienvenue à Manhattan
Scénario : Dan Abnett, Marv Wolfman
Dessin : Geaorge Pérez, Minkyu Jung, Lee Weeks, et Brett Booth.
Couleurs : John Drake, Adriano Lucas, John Kalisz et Andrew Dalhouse.
Encrage : Romeo Tanghal, Lee Weeks, Norm Rapmund et Minkyu Jung
Couverture : Andrew Dalhouse, Brett Booth et Norm Rapmund.
Dépot légal : Janvier 2018
Editeur :
Collection : DC Presse
Planches :143Alors que des êtres dotés de super-pouvoirs ont surgi à Manhattan, se faisant appeler les Métas, dans le même temps, l'équipe des Titans de Wally West l’un des "Flash" actuels, comprenant Aqualad, Arsenal, Omen et Wonder Girl, vient s’installer en ville. Grâce aux avancées techno-organiques des Atlantes, Aqualad a fait construire la nouvelle tour des Titans en un temps record. La société "Méta Solution" semble s'intéresser aux personnes dotées de super-pouvoirs. Elle proclame haut et fort qu'elle peut leur venir en aide, qu’il s’agisse de les débarrasser de leurs pouvoirs ou de leur donner le moyen de les contrôler. Le gros souci est que cette société est dirigée par les "Cinq Redoutables", d'anciens ennemis jurés des Titans et de la Justice League qui se seraient reconvertis en agneaux altruistes et auraient renoncés à leurs propres pouvoirs pour aider les autres. Les Titans ne sont pas prêts à avaler de telles couleuvres et restent sceptiques sur les véritables intentions de cette société alors que Karen et Malcom Duncan, anciens membres de l’équipe, s’y rendent pour trouver une solution à leurs pouvoirs.
Dans la seconde partie, Batman/Nightwing, Aquaman/Aqualad, Wonder Woman/Wonder Girl, Flash (Barry Allen)/Flash (Wally West) se retrouvent piégés dans une sorte de bunker aux multiples portes et galeries où ils ont été attirés mais dont aucune ne semble mener vers une éventuelle sortie et dans lequel il n’y a aucun moyen de communiquer avec l'extérieur. Même Omen, la télépathe des Titans, n'arrive pas à entrer en communication avec ses amis. Quelqu'un semble les avoir réunis ici pour qu'ils livrent leurs secrets mais aussi leurs rancœurs les uns envers les autres, mentors contre anciens "protégés". Qui peut bien se cacher derrière tout ça ?
Mon avis: Si l’on peut se réjouir du retour des Titans, malheureusement les récits qui leur sont dédiés restent dans l’orbite de la Justice League ! Dommage qu’Urban mette toujours en avant cette dernière alors que tout démontre que l’équipe des Titans est aussi bonne que sa série "mère". À quand un album ou un titre propre aux équipes des Titans? Urban serait-il un éditeur trop frileux? Je ne pense pas être le seul à penser la même chose. D’autant plus qu'aux USA ces séries parallèles fonctionnent très bien depuis des décennies alors qu’ici c'est la croix et la bannière pour essayer de suivre leurs aventures en VF. Dan Abnett est à la tête des scénarios. Dans la première partie, nous accompagnons Wally West "Flash" revenu de la zone Flashpoint dans notre dimension où les souvenirs de la population ont été altérés ou effacés et réactivés grâce à ce retour de Flash. Seul le Superman actuel qui était resté dans l'ombre de celui récemment décédé partage encore tous les souvenirs de Wally West. La réapparition des ennemis communs à la Justice League renforce encore un peu plus le lien des Titans avec leurs aînés.
La seconde partie est davantage axée sur leurs rivalités mais n'en reste pas moins intéressante. Côté dessin, Lee Weeks s’est chargé du premier épisode (n°7 des Titans) puis il passe le relais à Brett Booth (n°8 et sv. des Titans). Les deux parties sont tout aussi énergiques l'une que l'autre, tout en gardant un cadrage plus classique pour la première. Sinon, on y retrouve le même punch, le même souci de proposer un dessin de qualité, efficace et puissant. Le découpage en oblique de Brett Booth bien connu des habitués de ce dessinateur ne nuit en rien à la lecture de l’épisode. L'encrage soigné réalisé par Lee Weeks et Norm Rapmund sert bien le mouvement que les deux dessinateurs ont souhaité donner à leur travail. Dans la seconde partie, Annual 1 Héritage, le résultat est tout à fait conforme aux standards actuels de DC, plutôt dynamique bien que dans une sorte de huis clos avec de multiples ennemis sortant de nulle part.
Un classique des New Teen Titans de Marv Wolfman et George Pérez (n° 7 avec la première apparition des Cinq Redoutables dans la série) viendra compléter ce volume épais de 160 pages proposé au prix très abordable de 5,90 €.
Info édition : Contient Titans (2016) #7-10, Titans (2016) Annual #1 et New Teen Titans (1980) #7.
SDJuan
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Moments clés du journal de SPIROU
- Par asbl-creabulles
- Le 01/04/2018
Scénario : François Ayroles
Dessin : François Ayroles
Couleurs : François Ayroles
Dépot légal : 02 mars 2018
Editeur :
Collection : Patrimoine
ISBN : 978-2-8001-7114-2
Nombre de planches : 310C’est en 1937 que Jean Dupuis et sa famille décident de créer un nouveau journal illustré pour la jeunesse qui paraîtra sous le titre "Journal de Spirou" (spirou = écureuil en wallon). Le projet semble facile à mettre en œuvre pour celui qui dirige déjà une maison d’édition à Marcinelle (aujourd’hui intégrée à Charleroi) publiant des romans illustrés ainsi que les magazines "Bonnes soirées" pour le public familial et "Le Moustique" pour le public masculin. Malgré tout, la famille Dupuis va prendre le temps de s’en occuper avec beaucoup d’application. Nommé directeur du journal, Charles Dupuis engage le romancier Jean Doisy pour animer les rubriques. Le dessinateur français Robert Velter, connu par la suite sous le pseudo Rob-Vel, sera recruté pour créer le personnage de Spirou. Avec sa femme, également dessinatrice, ils vont choisir de faire de Spirou un groom en s’inspirant de ceux que Robert avait côtoyés lorsqu’il travaillait comme stewart sur un paquebot transatlantique. Après un numéro gratuit de 4 pages distribué en Wallonie, le premier numéro du Journal de Spirou sort le jeudi 21 avril 1938, tiré à 80.000 exemplaires! Vous l’aurez compris, le journal célèbre ses 80 ans en cette année 2018!
François Ayroles qui s’est déjà attaqué à l’histoire de la bande dessinée ("28 moments clés de l’histoire de la bande dessinée" chez Le 9e monde en 2004, "Nouveaux moments clés de l’histoire de la bande dessinée" chez Alain Beaulet éditeur en 2008 et "Moments clés de l’Association" publié chez l’Association en 2012) nous revient en force en 2018 pour célébrer les 60 ans du Journal de Spirou et décrypter avec beaucoup de précision et d’anecdotes les moments stratégiques du journal depuis sa création en 1937 jusqu’à sa vente à un groupe financier en 1985 lorsque son directeur, Charles Dupuis, a pris sa retraite.
Le format adopté est original, présentant 150 textes plutôt anecdotiques accolés à 150 illustrations, tour à tour drôles, croustillants, tristes, dramatiques ou héroïques mais toujours avec l’intention de présenter et faire comprendre les diverses étapes stratégiques de l’histoire du journal durant la période 1937-1985. Et même s’il n’a jamais travaillé chez Dupuis et n’a pas connu cette époque, François Ayroles nous dépeint chaque moment important de la vie du journal ainsi que l’actualité du temps.
On notera par exemple la création du club Spirou pendant l’occupation et l’utilisation par Jean Doisy du journal comme moyen de transmission de messages destinés à aider la résistance; la première tentative par Charles Dupuis de recruter Hergé qui refusera l’offre sous prétexte qu’il travaille déjà pour la revue "Le Vingtième siècle", en particulier son supplément "Le Petit Vingtième" dans lequel seront publiées les premières aventures de Tintin; la dure réalité de la guerre 39-45 qui perturbera fortement la parution du journal; l’arrivée de Joseph Gillain, alias Jijé, qui reprend Spirou après que Rob-Vel en ait cédé les droits à Dupuis, avant de lui-même passer la série à Franquin en 1946; l’arrivée simultanée de Morris, Franquin, Paape et Peyo lors de la reconstruction du journal après-guerre; le refus d’engager Hergé lorsque ce dernier tentera de se recaser; l’arrivée de nombreux auteurs qui vont marquer la BD de leur empreinte comme Follet, Delporte, Hubinon, Charlier, Bercq, Tillieux, Macherot, Roba, Goscinny, Walthéry, Cauvin, Salvérius, Lambil, Maltaite ou Hausman; et bien d’autres moments-clés de ce qui fut l’âge d’or de la BD.
François Ayroles nous propose dans ce volume de format réduit mais épais de plus de 300 pages une description précise de ces événements illustrés par des dessins plaisants et souvent caricaturaux un peu dans le style de l’école dite de Marcinelle (rivale de l’école de Bruxelles et sa "ligne claire" symbolisée par Hergé) qui va privilégier le sens de la caricature et le récit d’humour par un trait dynamique, simple et en rondeur, d’où l’expression "gros nez" qui qualifiera un style de BD qui va marquer l’histoire du 9e art de manière indélébile.
Un album BD sous forme de livre documentaire à conseiller pour découvrir de façon ludique et plaisante les premières décennies de la bande dessinée à travers l'histoire du Journal de Spirou et de la maison Dupuis. Du pur plaisir.
SDJuan
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La BALLADE de DUSTY
- Par asbl-creabulles
- Le 31/03/2018
Tome 1/2: Bertha wagon à bestiaux
Scénario: Aurélien Ducoudray
Dessins: Gilles Aris
Couleurs: Albertine Ralenti
Dépôt légal: Mars 2018
Editeur: Bamboo Édition, collection Grand Angle
Nombre de pages: 54 planchesDans Tintin en Amérique, Hergé ne consacrait qu'une seule image à la grande dépression des années 30. Aurélien Ducoudray, quant à lui, a décidé d’y consacrer un diptyque: la ballade de Dusty. "Bertha wagon à bestiaux", l’album d’ouverture, vous est présenté aujourd’hui.
"1930 - États-Unis, pendant la Grande Dépression. Expropriée, la famille de Dusty va devoir habiter chez des voisins. La gamine ne décolère pas, car son père est parti à Washington demander avec quelques milliers d'autres manifestants des comptes au président... Mais c'est trop long… Elle décide d'aller le chercher ! Sur son chemin semé d'embuches elle va rencontrer de nombreux personnages (réels ou imaginaires), comme Tom Joad, le héros des Raisins de la colère de Steinbeck, les criminels Bonnie & Clyde ou encore les artistes du cirque du film Freaks." [Bamboo]
Le scénariste Aurélien Ducoudray oppose la vision enfantine de Dusty (10 ans au petit compteur de l’héroïne) à la dure réalité d’une Amérique en crise. Elle croisera, tour à tour, au cours d’une sorte de ballade initiatique de nombreux personnages réels, atypiques et/ou fictifs. Ci-dessous, "en version originale", par ordre d’apparition dans la ballade de Dusty:
Dusty Boxcar ou Bertha wagon à bestiaux / planche 10.
Tom Joad (Henri Fonda dans le film Les raisins de la colère / planche 23.
Dorothea Lange (1895-1965) / planche 31.
Photo de Dorothea Lange (mère migrante) / planche 33.
Bonnie et Clyde / planche 50.
Freaks (extrait du film de Tod Browning) / planche 54.Une belle brochette de portraits mythiques et de nombreux "laissés pour comptes" dont les fameux hobos (les nomades indésirables du rail) se croiseront dans le conte d’Aurélien. L’auteur nous propose un road trip grand public qui rend bien la vie, la violence et la tristesse de l’époque. Nous retrouverons avec plaisir la gamine Dusty, témoin improbable d’une sombre époque, dans le deuxième album en juin prochain.
Au dessin, Aurélien Ducoudray a choisi Gilles Aris qui, après huit années passées à dessiner des décors traits chez Ankama, signe ainsi son grand retour à la BD. Le traitement est dynamique et très caricatural. Trop à mon goût (mais c’est le choix des auteurs) pour être au diapason d’un drame d’une telle ampleur !
Mon conseil: Relisez le roman "Les raisins de la colère" de John Steinbeck ou visionnez-en le très beau film réalisé par John Ford pour compléter votre lecture BD du jour.
Michel
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DEFENDERS
- Par asbl-creabulles
- Le 28/03/2018
Tome 1 : Les Diamants sont éternels
Scénario : Brian M. Bendis
Dessin : David Marquez
Couleurs : Justin Ponsor
Dépot légal : 28 février 2018
Editeur : Panini Comics
Collection : 100% Marvel
Nombre de planches : 128Il y a du rififi à prévoir dans l’univers du crime organisé car Willis Stryke, alias Diamondback, un super criminel censé être mort, est réapparu et cherche à prendre la place du caïd Fisk qui régnait sur New-York et notamment Hell's Kitchen. Il décide de rassembler tous les parrains et autres barons de la pègre locale afin qu'ils travaillent ensemble mais aussi pour leur offrir sa protection et leur garantir des gains colossaux. Cette arrivée n'est pas du goût de tous, à commencer par les super-héros urbains, ceux que l’on nomme "Héros à louer" – Iron Fist et Luke Cage mais aussi Daredevil – qui veulent nettoyer le quartier et qui le font savoir de manière expéditive en faisant une apparition musclée pendant cette réunion. Furieux de leur ingérence dans ses affaires, Willis Stryke, ancien pote de Luke Cage devenu plus tard son ennemi, est bien décidé à montrer à ces justiciers qu'ils vont devoir faire face à de terribles représailles. Et d’ailleurs, celles-ci ne vont pas se faire attendre. Rendant visite à Jessica Jones sous un faux nom, il n’hésite pas à lui tirer dessus et lui mettre plusieurs balles dans le ventre. Puis il envoie une roquette sur Luke Cage, il lance une voiture en feu en direction d’Iron Fist et enfin provoque une explosion devant le tribunal d’où sort Matt Murdock. Mais une super-vilaine/héroïne, ex-petite amie de Spider-Man, fait également sa réapparition. Quel rôle la Chatte Noire va-t-elle jouer dans cet imbroglio, baronne de la pègre, ce qu'elle semble être devenue, ou alliée de justiciers en bien mauvaise posture ?
Mon avis: Cela faisait longtemps que je n'avais plus lu un récit aussi fort chez Marvel et, qui plus est, mettant en scène nos "héros à louer" Iron Fist et Luke "Power Man" Cage. La place abandonnée par Fisk ne sera donc pas restée vide longtemps. C'est un Diamondback hyperviolent qui nous revient de l'autre monde, bien en chair et en os. Assez puissant pour mettre une bonne dérouillée à nos super-héros urbains et embarquer une Chatte Noire qui essaye du mieux qu'elle peut de se sortir de cette voie de garage qui semble se refermer plus vite que prévu.
C’est le beau succès rencontré par les séries télévisées Punisher, Daredevil, Luke Cage ou Defenders produites par Netflix qui a incité Marvel à publier une nouvelle série. Loin des Défenseurs de la première époque (Silver Surfer, Dr Strange, Hulk, Namor rejoints par Iceberg, Angel, etc.), on retrouve dans cette nouvelle mouture Jessica Jones, son mari Luke Cage, Iron Fist et, bien sûr, Daredevil. Au scénario, Brian M. Bendis nous offre une aventure solide et très plaisante. Ayant l’habitude de gérer des équipes et, dans le cas présent, une équipe composée de personnages qu'il a créés comme Jessica Jones ou déjà scénarisés, il est à l’aise pour nous proposer un récit plutôt spectaculaire, plein d’action et de rebondissements.
Les dessins de David Marquez sont tout simplement bluffants, dynamiques et bourrés d'énergie. Il multiplie les plans et cadrages dignes des meilleurs films d'action et réussit à bien mettre en valeur les personnages. La force à l’état pur est naturellement présente mais Iron Fist donne vraiment l'impression d'être un maître en arts martiaux (ce qui lui faisait défaut depuis quelque temps déjà).
Ces Défenseurs (Defenders) version Bendis-Marquez 2018 sont une belle surprise. Le premier tome est plutôt sympathique mais ce bon résultat devra encore être confirmé.
SDJuan