Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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ANDROÏDES 5
- Par asbl-creabulles
- Le 08/02/2019
Tome 5 - Synn
Scénario : Stéphane Louis
Dessin : Stéphane Louis
Couleurs : Sébastien Lamirand
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
Collection : Anticipation
Format : Grand format
Nombre de planches : 52Synn est un robot androïde hyper sophistiqué de dernière génération capable en cas de dégât de s’auto-régénérer à partir de n'importe quelle source de vie, robotique ou organique, atteignant ainsi une sorte d'immortalité. Lors d’une mission vers une planète inconnue, son vaisseau qui a dû se frayer un chemin à travers une nuée d’astéroïdes finit par s’écraser. S’il est totalement irrécupérable pour repartir, ses pièces vont être utiles à Synn pour se régénérer, se réassembler et redevenir la belle androïde qu’elle a toujours été. Mais curieusement, cette fois, il lui faudra plusieurs minutes avant de retrouver son état initial. Malgré tout, les créatures très proches des humains qui vivent sur cette planète vont la considérer comme une déesse, ce qui ne va pas manquer de l’inciter à essayer de comprendre leur système de vie... et de mort, cette mort qu’elle a très brièvement effleurée. Il semble que pour ces créatures la mort ne soit pas le point ultime de la vie, mais seulement un passage. Fortement intriguée, Synn n’hésite plus à prendre des risques dans l’exploration de la planète, souvent blessée, brisée pour passer de l'autre côté, mourir, ce qui est impossible pour son système d'exploitation et de survie. Après plusieurs essais infructueux, elle est amenée à découvrir une autre émotion qu'elle ne semble pas connaître, l'amour et, ce qui semble en découler, faire l'amour. Avec Krit, un robot qu'elle a amené à la vie à partir de débris et de la mémoire du vaisseau, Synn veut absolument découvrir cette nouvelle sensation jusqu’ici inconnue pour elle.
Mon avis: Ce nouvel album (numéroté cinq dans la série) débute un nouveau cycle qui commence très fort. Stéphane Louis au scénario et au dessin nous livre dans ce nouveau one shot un récit autour des doutes, des questionnements que se pose l'androïde Synn sur la vie et la mort. Que devient l'âme après la mort? Y-a-t-il une vie après la mort? Qu’est-ce que l'amour absolu et unique? Des questionnements étrangement humains – Synn se demandant à quoi cela sert de vivre sans la mort, sans l'amour – chez des androïdes conçus pour être presque indestructibles voire éternels, avec les qualités des humains mais sans leurs défauts. On va donc suivre avec intérêt et plaisir l'évolution de cette androïde ayant même essayé le suicide pour connaître la mort et l'au-delà puis cherchant de la compagnie et l’amour auprès d’un compagnon régénéré à partir de la mémoire de son vaisseau crashé sur cette planète habitée par des créatures "humanoïdes". Une nouvelle intrigue solide pour cette belle série, accompagnant une réflexion sur les robots et la notion de transhumanisme en lien avec les progrès de l’intelligence artificielle.
Les dessins sont toujours aussi dynamiques grâce à des mises en scènes et des cadrages restituant bien les mouvements et contribuant au tonus du récit. Un dessin clair en particulier sur les personnages, dont Synn évidemment, toujours aussi élancée et agréable à regarder, mais également sur les androïdes, robots et vaisseaux aux fuselages fins et élégants pour cette belle aventure d'anticipation. Saluons également le travail réalisé sur les couleurs par son ami Sébastien Lamirand avec qui il a travaillé sur plusieurs séries, qui donnent de la clarté à l’ensemble tout en soulignant l’ambiance futuriste du récit.
SDJuan
Chronique du tome 1 ici:
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BABYBOX
- Par asbl-creabulles
- Le 06/02/2019
BABYBOX
Scénario : Jung
Dessin : Jung
Couleurs : Jung
Dépot légal : Septembre 2018
Editeur :
Collection : Noctambule
Nombre de planches :136Loin de la Corée qu’elle a quittée à l’âge de 4 ans, Claire Kim s'est construit une vie à Paris où elle travaille aux côtés de ses parents dans le restaurant familial. Tout va bien et avec son ami, ils ont décidé d'avoir un enfant. Son petit frère Julien voue une admiration sans borne au personnage de William Wallace depuis qu'il a vu le film Braveheart de Mel Gibson. Comme lui, il veut l'indépendance de l'Écosse au point d’aller à l'école en kilt. Un soir, leurs parents ont un grave accident, leur mère est tuée sur le coup et leur père se retrouve dans le coma. Accablée par une profonde tristesse, Claire se laisse envahir par les souvenirs comme celui du jour où sa mère avait voulu lui parler de quelque chose d'important puis y avait renoncé sans raison. C’est en rangeant ses affaires qu’elle découvre dans une boîte parmi d’autres objets un papier officiel coréen qui lui apprend qu'elle n'est pas celle qu’elle a toujours cru être mais qu'elle a été adoptée. Très vite, elle décide d’aller en Corée avec son petit frère Julien pour connaître la vérité sur ses vrais parents et savoir pourquoi sa mère l'a abandonnée. Sur place, sa rencontre avec un garçon nommé Min-ki va l’aider dans sa quête.
Mon avis: Nouveau récit pour Jung qui nous accroche dès les premières pages. On ne peut s’empêcher de penser à la série drôle et touchante "Couleur de Peau: Miel" dans laquelle il nous avait raconté sa jeunesse d’enfant coréen adopté par une famille belge. Avec "Babybox", voici l’histoire d'une jeune fille soudainement confrontée à une succession de chocs. Un tragique accident, un père dans le coma, une mère décédée, la découverte qu’elle n’est pas leur enfant mais qu’elle a été adoptée et que ses véritables parents coréens l’ont déposée dans une "babybox" à Séoul avant qu’elle soit confiée à un orphelinat. S’ensuit alors un départ en Corée à la recherche de ses origines, de son identité, la découverte de ce pays qu'elle ne connaît pas, d’une langue qu'elle parle à peine et la rencontre avec ceux qui l'ont prise en charge. Une histoire où dominent les émotions, la joie comme la tristesse, beaucoup de tendresse mais aussi les doutes, les incertitudes et parfois les déceptions. Un récit très fort.
Coté dessin, Jung nous fait vivre cette histoire en noir et blanc mais avec toutes les nuances de gris et plusieurs notes de gaieté sous forme de pointes de rouge, ce rouge que Claire affectionne depuis qu'elle a vu ce champ de coquelicots à perte de vue. Un trait délicat pour de superbes scènes restituant de manière symbolique les multiples émotions qui se dégagent du récit comme l’amour de Claire envers son petit frère Julien. Une histoire tellement prenante qu’on dévore ce one shot d’une traite même s’il contient 154 pages. Un très beau moment de lecture que je recommande vivement.
SDJuan
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SOLO 4
- Par asbl-creabulles
- Le 01/02/2019
Tome 4 - Legatus
Scénario : Oscar Martín
Dessin : Oscar Martín
Couleurs : Oscar Martín
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
Collection : Contrebande
Nombre de planches : 76Fils adoptif du défunt Solo qui l'a élevé et éduqué, Legatus se retrouve bien seul et livré à lui-même mais bien décidé à poursuivre sur la voie tracée par son père. Il doit d’abord commencer par parfaire son éducation dans ce monde hostile. C’est l’attitude pacifique et bienveillante d’une autre créature qui le suivait depuis un certain temps qui va l’inciter à aller au-devant d'autres âmes seules et perdues qui, tout comme lui, ne veulent pas tuer juste pour tuer et encore moins par pur plaisir, mais qui désirent venir en aide aux plus faibles et aux plus démunis et s'unir pour mieux se protéger en essayant de former une communauté. Tout au long du chemin, Legatus va progressivement s'entourer de nouveaux "adeptes" voyant en lui un sauveur. Des créatures de toutes races vont se joindre à lui, finissant par constituer une petite armée de disciples et de fidèles qui adhèrent et croient à son idéal d’apporter un peu de paix dans ce monde brutal et sans pitié où chacun doit perpétuellement chasser pour manger et tuer pour son territoire. Mais en faisant parler de lui, ce groupe commence à faire peur aux humains qui y voient un danger et une menace qui prennent de plus en plus d'ampleur.
Mon avis: Nouveau personnage pour la série Solo. En effet le rat guerrier nous a quitté, cédant la place à son fils adoptif, le chien Legatus, pour ce premier tome du deuxième cycle de la série. Si Oscar Martín nous plonge une nouvelle fois dans son monde post-apocalyptique pour notre plus grand plaisir, on s’aperçoit vite qu’il met davantage l’accent sur les valeurs nobles qui anime ce nouveau venu. Les rebondissements s’enchaînent mais si l’aspect guerrier et violent du premier cycle demeure bien présent il l’est de manière un peu plus sous-jacente. Tout en se situant dans la lignée de son père adoptif, Legatus va s’efforcer de développer son désir de vivre autrement. Des groupes continuent de se former pour chasser et se défendre de manière plus efficace, mais d’autres, comme celui de Legatus, apparaissent pour essayer de changer le monde et de vivre en paix, en transmettant et en propageant au maximum un message de paix et d’amour. Si Legatus est vu par ses adeptes comme un messie, lui préfèrerait que chacun s'émancipe et aille propager la "bonne parole" à des êtres aspirant eux aussi à changer ce monde cannibale.
Les dessins d'Oscar Martín sont toujours de très bonne facture et du plus bel effet. Il sait s’y prendre pour accrocher le lecteur. Le trait est clair, précis, énergique tant pour ses magnifiques décors apocalyptiques que pour les scènes d’action explosives bourrées de testostérone. Oscar Martín est à l’aise pour dessiner des personnages zoomorphes. D’ailleurs tous ses personnages, humains ou non, sont charismatiques à souhait, avec des visages exprimant toutes sortes d’émotions: tristesse, joie, violence, peur ou rage. Le découpage et les cadrages dans un style très cinématographique viennent renforcer l’énergie qui émane de son dessin. La mise en couleurs tout en dosage rend l’album visuellement très agréable. Sans aucun doute l’une des meilleures séries apocalyptiques qu'il m'ait été donné de lire.
A noter la parution fin mars 2019 du premier tome de la série "Solo: chemins tracés", sur un scénario d’Oscar Martín et une illustration d’Álvaro Iglesias.
SDJuan
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DAS FEUER
- Par asbl-creabulles
- Le 31/01/2019
Das Feuer
Scénario : Patrick Pécherot
Dessin : Joe Pinelli
Couleurs : <N&B>
Dépot légal : Octobre 2018
Editeur :
Collection : écritures
Nombre de pages : 200Des hommes de plusieurs générations, de toutes races, de toutes confessions et idéologies, sont obligés de trouver le plus vite possible un refuge ou de creuser une tranchée et d’y rester cachés dans la terre, dans la gadoue sous la pluie, trempés jusqu'aux os de suées froides, au mieux exténués mais très souvent blessés physiquement mais aussi au plus profond de leur âme, affamés et assoiffés, horrifiés ou complètement dépassés, paniqués, les adjectifs viennent à manquer. Le tout sous le fracas des tirs de fusils et de mitrailleuses ou d’artillerie, sous une pluie d'obus, sous les bombardements incessants qui laissent les hommes déchiquetés ou mutilés comme pour souligner cette torpeur, cette impuissance. Une guerre sans nom, assourdissante, meurtrière et bien trop longue.
Mon avis: L’action se situe du côté allemand durant la Grande Guerre de 14-18, qui n'a de grande que le nom tellement elle ressemble à tant d'autres par son atrocité et cette monotonie de l'horreur et de la souffrance. On se rend vite compte avec cette adaptation BD du récit de guerre "Le Feu" (sous-titré "Journal d’une Escouade") écrit par Henri Barbusse en 1916 que l'ennemi n'est pas seulement l'adversaire mais aussi les éléments naturels du paysage: sols, modelés, végétation, climat. Lorsque l'eau vient se mêler à la terre, le sol se transforme et devient presque mouvant et, horreur suprême, mêlé de sang et de corps déchiquetés. L'horreur est partout et toutes les difficultés du monde s’additionnent et se dressent contre l’homme. Le scénario, présenté sous forme de chapitres et d'étapes destinés à nous faire vivre chaque instant, alterne texte et illustrations quasiment sans dialogues. Il commence par des énumérations qui soulignent le contexte de l’horreur annoncée: "Nous sommes treize millions deux cent vingt mille hommes mobilisés, un million cent cinquante-deux mille huit cents prisonniers", puis l’auteur présente et dépeint quelques-uns de ces hommes aux mines lugubres avant de reprendre, comme si cela ne suffisait pas, son énumération qui glace le sang. "Nous sommes un million cent cinquante-deux mille huit cents prisonniers, quatre millions deux cent mille et cinquante-huit blessés". Et pour bien souligner et faire comprendre l'horreur, il y a les morts: "Deux millions trente-trois mille sept cents morts et disparus". Un récit glaçant sur les horreurs et atrocités d’une guerre mais qui peut s’appliquer à n’importe quel autre conflit de par le monde.
Les dessins en noir et blanc à dominante grise et sombre restituent au mieux la vie terriblement triste et effroyable des soldats mais surtout l'horreur et la noirceur de la guerre. L’auteur utilise des traits hachurés, faussement gribouillés pour dépeindre des visages gris presque défigurés qui ressemblent plus à ceux d’hommes morts, des masses humaines informes, des paysages monotones et semblables, ondulés, détrempés, jonchés de cadavres et de blessés au milieu d'êtres certes vivants mais vidés de toute force, découragés et sans espoir aucun. La survie est le seul ressort qui les soutient. Les dessins se répètent à l’image de la répétition des mêmes gestes et actions de survie comme celui de sauter dans un trou pouvant servir de tranchée et d’abri. Les dessins sont uniformes et pas très beaux visuellement mais atteignent leur objectif en exprimant parfaitement la dure réalité de la guerre.
SDJuan
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JAKOB KAYNE 1
- Par asbl-creabulles
- Le 30/01/2019
Tome 1 - La Isabela
Scénario : Sylvain Runberg
Dessin : Mateo Guerrero
Couleurs : Javi Montes
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
Nombre de planches : 56Dans cette nouvelle série, les frères Jakob et Samuel Kayne sont les seuls survivants des Hippocrates, un peuple ayant la particularité de venir au secours de toute personne ayant besoin d'aide. Jakob et Samuel ont été contactés par la famille Marcheda qui vit dans la citadelle d’Isabela sur l’île d’Hispaniola car leur fille Victoria est mourante. L’ennui est que la ville est non seulement en proie à une épidémie de choléra mais également, depuis onze semaines, assiégée par l'armada du sultan omeykhim Soleman-le-Puissant qui convoite les trésors du seigneur de l'Inquisition, le cardinal Torquemada. Jakob doit absolument s'infiltrer dans cette forteresse aux remparts réputés imprenables pour sauver Victoria et exfiltrer la famille au plus vite. Il faut dire que Jakob et Samuel possède chacun un don. En plus d'être un combattant hors pair, Jakob est aussi le dernier Mange-Mémoire, autrement dit quiconque le croise oublie aussitôt son visage et ne se souvient plus de lui. Quant à Samuel, dernier alchimiste-guérisseur, il possède le savoir des plus grands guérisseurs pour créer des remèdes mais aussi le pouvoir d’intercepter les appels et messages à l’aide. Si Jakob réussira à s’infiltrer dans la ville, comment repartira-t-il avec la famille de Victoria ?
Mon avis: Suivant un scénario élaboré avec soin, le récit que nous propose Sylvain Runberg mêle habilement une aventure de cape et d'épée et une chasse au trésor en pleine guerre de religions, le tout agrémenté d’une dose d’imaginaire et de fantastique. Nos deux héros, personnages hauts en couleurs, sont les seuls rescapés d'un peuple entièrement dévoué aux personnes démunies ou menacées dans leur vie, et possèdent des pouvoirs surnaturels mais Runberg n’a guère besoin de recourir à des "effets spéciaux", ni à des super-héros. Leur mission est quasi kamikaze: sauver une jeune fille mourante et sa famille au cœur d’une forteresse imprenable frappée d’une épidémie et assiégée par l'ennemi. Cela fait beaucoup, d’autant que l'histoire n’est prévue qu'en trois tomes. Qu'à cela ne tienne, Runberg s'en sort très bien. Les personnages sont en place, en particulier les deux héros atypiques qui nous intriguent d'entrée de jeu, l'aventure bien entamée avec son lot de rebondissements, le contexte dur et cruel, et la suite s'annonce mouvementée.
Côté dessin, Mateo Guerrero ne cesse de nous surprendre. L'artiste que nous avons vu débarquer dans la BD franco-belge dans un style bien plus marqué fantastique et manga (Shogun Mag, DragonSeed, Beast, Turo, etc.), n’a cessé d’évoluer de belle manière au point de nous offrir aujourd'hui le premier tome d’une nouvelle série dans le plus pur style franco-belge et à un niveau de qualité élevé. Certains ont fait le rapprochement avec "Le Scorpion" d'Enrico Marini. Si le personnage principal s’y apparente, notamment par l'époque et le genre cape et épée, Mateo Guerrero a su garder un style, une griffe qui lui est propre. On sent qu'il est à l’aise dans cette nouvelle version de son trait et qu'il a en quelque sorte trouvé sa voie après avoir expérimenté diverses écritures. On reconnaît parfaitement les personnages, largement mis en avant, on découvre de belles scènes d'action et courses-poursuites. Les cadrages mêlant plongées et contre-plongées et le découpage produisent leur effet. Un dessin réaliste, soigné, travaillé témoignant que Mateo Guerrero, après Gloria Victis, a encore monté son niveau d'illustration d'un cran.
La mise en couleurs de son collègue de longue date, Javi Montes, vient peaufiner le tout. Son travail est très agréable et n’écrase pas le trait du dessinateur même dans les scènes de nuit, ce qui devient de plus en plus rare. Du beau et bon travail d’un duo d’illustrateurs qui fera encore parler de lui. Même si l’un des héros a le pouvoir de disparaître de nos mémoires, n'oublions pas la série Jakob Kayne qui sera limitée à trois tomes.
SDJuan
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SPIDER 1
- Par asbl-creabulles
- Le 29/01/2019
Tome 1 - Rabbit hole
Scénario : Christophe Bec d'après un concept original de Gilles Daoust
Dessin : Stefano Raffaele
Couleurs : Marcelo Maiolo
Dépot légal : Janvier 2018
Editeur :
Nombre de planches :56Détroit, Michigan. Dans une ville frappée par la crise, appauvrie et chaotique, les autorités doivent faire face à une drogue des plus addictives et meurtrières nommée "Spider". Le premier cas découvert a réellement déboussolé tout le monde, même le médecin légiste. Le détective John Brandt est dépêché sur place pour enquêter. Il semble que cette drogue ait des effets radicaux sur ses consommateurs dont certains vont jusqu'à se mutiler. Arrivée au commissariat de police, Charlie Dubowski, une jeune flic fraîchement sortie de l’école de police, doit faire équipe avec Brandt, même s'il n'en a guère envie. Appelés sur le lieu d’un homicide, ils découvrent un autre corps dans le même état que la première victime. Ensuite tout va s'enchaîner très vite. Des cris dans une maison ayant alerté un quartier, Brandt et Dubowski se rendent sur place mais la situation tourne rapidement au vinaigre. Brandt est sévèrement agressé et emmené d'urgence à l'hôpital. Le lien est fait avec une espèce d'araignée manipulée génétiquement qui serait la source de cette drogue. Charlie, pour accélérer l'enquête, va prendre des risques et se retrouver prise dans un engrenage sans limite, confrontée à des dealers incontrôlables et hyper violents mais, surtout, elle va faire un saut dans l’inconnu en décidant d’essayer cette drogue meurtrière.
Mon avis: On retrouve avec plaisir un Christophe Bec passé maître dans le genre thriller/horreur/fiction lorsqu’il nous plonge dans une ville envahie par une drogue qui rend les gens fous à lier et hyper violents et une jeune enquêtrice qui n'est pas au bout de ses peines et va s'en prendre plein la figure. Le rythme est bien présent dès ce premier tome qui se déroule dans une atmosphère glauque. Le scénario déroule une situation inquiétante voire angoissante et nous plonge au moyen de flashes-back dans le passé pas toujours rose de Charlie. L’ensemble est déjà bien prenant et même si l’enquête reste encore mystérieuse, on se doute qu’elle va entraîner Charlie vers le fond.
Pour la partie graphique, Stefano Raffaele, compagnon dessinateur de longue route de Christophe Bec, nous propose des illustrations tout aussi sombres et angoissantes, frôlant même souvent l'horreur, mais qui restituent bien la violence du récit. Une belle performance pour l'artiste qui réussit à passer de planches très encrées et noires à des pages plus claires et aérées pour différencier les moments, les situations, les ambiances. Il utilise même un style plus cartoonesque et peu encré pour les flashes-back ce qui facilite aussi la lecture. Le contraste est dur entre des visages aux expressions fortes – salement amochés, tuméfiés, sanguinolents – et la (encore) belle Charlie. Les couleurs de Marcelo Maiolo accompagnent parfaitement le récit, passant des tons clairs et doux à des teintes sombres et agressives.
Cette plongée dans l’univers noir des addicts au "Spider" nous réserve bien des surprises.
SDJuan
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U.C.C. DOLORES 1
- Par asbl-creabulles
- Le 28/01/2019
Tome 1 . La Trace des nouveaux pionniers
Scénario : Didier Tarquin
Dessin : Didier Tarquin
Couleurs : Lyse
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
Planches :46Ayant atteint ses 18 ans, sœur Mony doit quitter le couvent de l'Ordre des Nouveaux Pionniers, littéralement tétanisée à l’idée d’affronter un monde qui lui est totalement inconnu. Avant de partir, elle se voit remettre les rares objets, hormis d’étranges cristaux rouges, avec lesquels elle fut trouvée sur le parvis de l’église du couvent alors qu'elle n'était qu'un bébé abandonné par ses parents. Parmi eux un coffret en bois qui s’ouvre aussitôt au son du chant "Happy Birthday to you Mony". A l’intérieur elle découvre une clé de consigne accompagnée du message "Prends soin de Dolores". La clé correspond au lot 0742347VX, une Unité Cosmo Corsaire (U.C.C.), autrement dit un vaisseau de guerre de l'armée confédérée qu'elle doit absolument retirer le jour même sous peine d'énormes pénalités de retard et au risque de le perdre si elle ne le fait pas. Mais Mony n'a aucune notion de pilotage. Sans aucun scrupule, les responsables de la consigne lui vendent une adresse où elle pourra trouver un pilote. Comme cet héritage est son seul lien avec son passé, elle n’hésite pas une seconde, sauf qu’en route, elle est kidnappée puis offerte comme objet sexuel au puissant Qarma, un organisateur de combats à mort. Justement un combat vient de s’achever. Kash, le vainqueur vient de démolir un robot. Surnommé "le Bourreau" du temps où lui et son équipe étaient payés pour démanteler des robots, il croise le regard de Mony reconnaissant en elle une certaine "Jessy". Décidant de voler à son secours, il propose son aide à condition qu’elle le prenne comme pilote. Ce qu'elle accepte aussitôt, évidemment.
Mon avis: Nouvelle série, nouvel éditeur pour Didier et Lyse Tarquin. Nouveau scénario de science-fiction plein d’énergie qui démarre sur les chapeaux de roue et enchaîne les rebondissements. La mise en place est efficace. Deux héros que tout semble opposer, une jeune fille tout à fait novice mais déterminée et un "gros bras" à tendance alcoolo mais plutôt sympathique, aidés d’un robot mécano, à présent embarqués dans une aventure dont on sait encore peu de choses, mais cela fonctionne. L’intrigue est solide, le rythme bien présent et les personnages plutôt séduisants. Un bon début pour cette nouvelle page qu’entament nos deux auteurs.
Travaillant en auteur complet, Tarquin nous embarque dans une nouvelle aventure spatiale qui laisse libre cours à son imaginaire qu’il transpose en dessins reconnaissables entre tous grâce à sa griffe personnelle. Si les trois saisons de Lanfeust en ont ravi plus d'un, je pense que c’est une bonne chose qu’il sorte du monde de Troy et nous fasse découvrir autre chose. S’agit-il d’une simple pause? La nouvelle aventure que Didier Tarquin nous propose chez Glénat se lit agréablement, un rien plus violente, plus agressive visuellement mais toujours aussi efficace avec des personnages toujours aussi charismatiques. On est rapidement captivé. Les pages sont riches en personnages et en décors en pleine nature ou dans l’espace avec divers vaisseaux spatiaux, agrémentées de belles scènes de combats. La mise en couleurs de Lyse accompagne parfaitement le dessin qu'elle met encore un peu plus en valeur, posant les ambiances et lui donnant du volume. Il n'en faut pas plus pour faire une bonne BD divertissante et pleine d'énergie. Embarquons à bord de l'U.C.C. Dolores et voyons où cela va nous mener.
Outre l’édition normale vendue sous jaquette "50 ans d’édition Glénat", l’album fait également l’objet d’une édition spéciale FNAC à tirage limité avec une illustration de couverture différente et un cahier bonus de 7 pages et enfin une version N&B grand format 36,7 x 27,6 cm + 8 pages de croquis en fin d'album.
SDJuan
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Les CRABES
- Par asbl-creabulles
- Le 27/01/2019
Scénario : Renaud
Dessin : Renaud
Couleurs : Renaud
Dépot légal : novembre 2018
Editeur : Editions du Aner
Format : Format normal
ISBN : 978-2-8052-0456-2
Nombre de planches : 46Ouest des États-Unis, milieu des années 90. Ray est, certes, un petit truand mais il a de l’ambition et une envie de se dorer la pilule sur des plages paradisiaques ensoleillées, fréquenter les palaces étoilés… avec Ornella ! Afin de concrétiser ses ambitions, il décide de doubler son Boss – Renato Giuseppe, membre d’une organisation mafieuse et père de la jolie brunette – en dérobant, après avoir assassiné Phil (sbire insignifiant à la solde de la famille Giuseppe), une valise remplie de 600.000 dollars. En apprenant ce vol, Renato réunit ses hommes pour ramener, dans les 48 heures, le couple en cavale. La pression est de circonstance puisque Renato n’est qu’un simple lieutenant de la famille Casmeroni… le grand chef de l’organisation criminelle, basée à Salt Lake City. Trois équipes se forment afin d’appréhender les amants en cavale, avant qu’ils franchissent la frontière mexicaine. Quant à "Le Mondain", un porte-flingue "première classe" futé et plus philosophe que les autres, il décide de prendre l’avion pour Phoenix… et, ensuite, prendre la route 89 en direction de Prescott et de Flagstaff. Pendant ce temps, les "tourtereaux" poursuivent leur chemin, à bord d’une Chrysler Nieuport 71, sur la route poussiéreuse vers Prescott… tout en se livrant – dans la plus grande insouciance – à quelques galipettes. Suite à un souci mécanique, le duo va devoir poursuivre son itinéraire à pied en espérant qu’une âme charitable les prenne en stop. C’est à ce moment-là qu’une jolie blonde – Keira Linch – arrive et embarque le couple… direction le motel "Little Star" ! L’aventure peut commencer…
Mon avis : Avec "Les Crabes", Renaud dévoile une intrigue torride, remplie de rebondissements où se mêlent meurtres, trahisons, poursuites à travers l’Arizona… et autres enivrements charnels. Bref, le dessinateur mouscronnois ne déroge pas à son style du "thriller érotique", à la base du succès de séries telles que "Jessica Blandy" (en 19 ans d’existence, vingt-quatre volumes ont été édités… et signés par le scénariste Jean Dufaux), "Santiag" (une série atypique, développée en cinq tomes, explorant les territoires enfouis et les mythes de la culture indienne), "Crotales" (deux albums scénarisés par Jean-François "Gihef" Baudot),… et le triptyque artistico-érotique ("Anja", "Miaki" et "Wanda") appartenant à la collection "Vénus H.", s’attardant aux mœurs et coutumes d’un réseau de prostituées de luxe! Alors qu’auparavant Renaud Denauw se faisait aider, par une tierce personne, à la rédaction des histoires tout en laissant les éditeurs faire leur travail, Renaud a – courageusement – souhaité devenir le marionnettiste de ce One-Shot. En effet, l’homme tire toutes les ficelles: pour la première fois de sa carrière, il est à l’origine du script / de la mise en couleurs / des dessins, bien évidemment … et publie son travail sous le nom des Editions Du Aner (un choix subtil puisqu'il s'agit de "Renaud" à l’envers). À force de vouloir porter toutes les casquettes, on aurait pu craindre que le père de Jessica Blandy allait trébucher… et c’est tout le contraire qui se produit.
Sans conteste, la bande dessinée "Les Crabes" (un clin d’œil au caractère de ces crustacés décapodes qui ne tolèrent pas la présence d’autres congénères et qui n’hésitent pas à entrer en compétition) est une réussite spectaculaire… tant au niveau des événements vécus par les protagonistes que par l’éblouissant soin apporté à la couleur (l’ensemble de l’œuvre est proposé – exclusivement – en sépia pâle) et de la justesse du trait. Si l’album se lit assez rapidement, c’est avec une joie sans borne que l’aficionado feuillettera, à plusieurs reprises, l’œuvre bédéphilique afin de redécouvrir certaines cases, se lécher les babines devant la plastique irréprochable des deux héroïnes ou s’extasier devant le coup de crayon de l’Artiste belge. En 48 pages, Renaud "fait mouche" et atteint le cœur de ses fidèles lecteurs… avec brio et grande classe.
Si les péripéties traversées par les "acteurs" principaux fleurent bon le sang, la poudre et la sueur, la BD "Les Crabes" possède, néanmoins, une petite caractéristique propre aux "contes de fées"! Oui, oui… le terme a, bel et bien, été lâché car l’ouvrage – très personnel et hyper-esthétisant – de Monsieur Renaud Denauw (parfois aidé par son épouse Anne et son fils Julien, pour la crédibilité du timing géographique) est sorti de l’imprimerie le 28 novembre 2018… le jour de son 83e anniversaire! C’est pas un signe, çà? Même si le dénouement de l’intrigue donne l'impression qu'une suite est envisageable, le dessinateur semble, malheureusement, ne pas vouloir offrir un second tome à son public. Dommage... un voyage au Mexique aurait pu exalter ses fans. Mais qui sait, Renaud changera-t-il, peut-être, d'avis prochainement. Sachez, enfin, que pour son prochain projet, le dessinateur hainuyer s'orientera vers un autre thriller érotique, dont lui seul à le secret… et qui, une nouvelle fois, sera une histoire inédite et unique.
Mitch VH