Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
-
MIRAGES ET FOLIES AUGMENTÉES
- Par asbl-creabulles
- Le 09/02/2021
Scénario : Philippe DRUILLET
Dessin : Philippe DRUILLET
Couleurs : N&B
Dépot légal : mars 2020 paru le 25/11/2020
Editeur :
ISBN : 978-2-344-03799-7
Nombre de pages : 368Dernière parution aux éditions Glénat pour cette collection qui reprend tous les albums de Druillet avec des couvertures sur fond métallique souvent du plus bel effet.
L’intérieur par contre n’est pas toujours de qualité (textes illisibles, traits effacés, détails noyés dans le gras des noirs).
J’attends toujours l’édition ultime qui mettra en valeur l’Art de Philippe Druillet.
Un guerrier au regard de feu et à l’armure phallique imite le Surfer d’argent sur la couverture (celle de la réédition Dargaud dans la collection Histoires Fantastiques) qui une fois tournée révèle cette fois de belles surprises. Ce gros volume semble avoir été réalisé avec plus de soin que certains précédents.
C’est presque une anthologie.Chaque chapitre est présenté par Druillet lui-même qui nous fait part de ses souvenirs.
0. L’introduction présente deux courts récits en noir et blanc.
1. Lone Sloane, premier récit au trait très sommaire, rébarbatif. Présenté ici dans la version éditée par Losfeld. (Je viens de lire toute la genèse de cette histoire parue au Terrain Vague et comprend mieux le pourquoi de cette première histoire balbutiante fortement influencée par les relations parfois tendues entre un jeune dessinateur débutant et un éditeur voulant une collection d’albums BD plus adulte au milieu d’une époque en pleine effervescence psyché/pop/sf).
Il y a également quelques péchés de jeunesse.
2. Hommage à Lovecraft, illustrations parues autour de Lovecraft dont celles en couleur qui sont dans le gros volume Démons et Merveilles des Éditions Opta (paru en 1976 sous reliure cuir) que je suis aussi occupé à lire.
3. Histoires courtes, plus de 20 courts récits (N&B et couleur) parus pour la plupart dans Métal Hurlant et Pilote mensuel. C’est l’album Mirages proprement dit paru aux Humanos en 1976.
4. Firaz et la ville fleur (scénario Druillet, dessin Picotto), reprend l’histoire en couleur parue dans la collection pilote avec la couverture. Je passe...
5. Le mage Acrylic (scénario Druillet, dessin Bihannic) histoire en noir et blanc à l’infinité de traits, avec les deux couvertures (Humanoïdes Associés et Histoires Fantastiques chez Dargaud. On pense au début de Bilal. Mais je passe.
6. Et enfin... les courts récits dessinés par Alexis, trop tôt disparu hélas... et un pastiche pour Fluide Glacial scénarisé par Gotlib.Avec ce livre, on comprend mieux par quels chemins tortueux, oniriques, le génie créatif de Philippe Druillet après des heures et des heures de recherche et de volonté d’y arriver est passé d’un trait brouillon, hésitant à cette explosion de sensations fantastiques créée par un dessin inimitable nourri par toutes les lectures, les réflexions, les perceptions et les ressentis d’un dessinateur connecté à un monde uniquement accessible et visible à ceux qui possèdent l’Art de représenter et de transmettre la vision d’un Ailleurs dans l’Espace et le Temps.
M. Destrée
-
SOLO 5
- Par asbl-creabulles
- Le 08/02/2021
Tome 5 - Marcher sans soulever la poussière
Scénario : Oscar Martín
Dessin : Oscar Martín
Couleurs : Oscar Martín
Dépot légal : 27 Janvier 2021
Editeur :
Collection : Contrebande
ISBN : 978-2-413-02269-5
Nombre de planches : 88Surnommé "le chien prophète", Legatus a suscité un espoir gigantesque. Ses idéaux et préceptes de pacification et d’alliance entre les races d’animaux et les humains censés permettre à tous de survivre se sont propagés comme une traînée de poudre. Mais les humains qui tiraient profit de leur suprématie sur les autres espèces animales commencent à se rendre compte qu’avec cette nouvelle donne ils perdent rapidement l’avantage que leur procurait leur supériorité numérique et l’armement. De plus, une nouvelle menace ne cesse de grandir incarnée par les "nouvelles" alliances d’animaux, végétariens pour la plupart, progressant sur les terres arides où ils réintroduisent une végétation très luxuriante les rendant quasi invisibles et invulnérables.
Mon avis: La série avance et au fil des albums s'enrichit des nouvelles péripéties vécues par nos héros. Ce que nous pensions immuable – les humains d'un côté, les animaux de l'autre, tuer ou être tué, manger ou être mangé, en un mot survivre dans un monde apocalyptique – ne l’est plus. Petit à petit l'espoir est apparu comme un moyen de survivre d’une autre manière en appelant à la réconciliation, à l'unification et à l'entraide y compris entre humains et animaux. Cela étant, la méfiance reste grande et a évidemment des raisons d'être en éveil. Mais après Solo qui a donné sa vie en essayant de changer les choses, Legatus et ses partisans ainsi que cette nouvelle vague "verte" d’animaux herbivores sont bien décidés à changer définitivement la donne au grand dam des suprémacistes humains sans foi ni loi sinon la leur : dominer et asservir tous les animaux et s’en nourrir.
Oscar Martin consolide son univers autour du personnage de Solo pourtant disparu à la fin du premier cycle.
Un récit toujours aussi passionnant sur fond de confrontation, d’écologie, mais aussi de cohésion et de solidarité. Les ramifications sont nombreuses et la tension de plus en plus grande. L'affrontement s’annonce et rien ne semble pouvoir l'empêcher.La partie dessin est toujours aussi réussie, aussi efficace. Des scènes d'action toujours aussi truculentes et violentes, mais aussi parfois drôles et/ou attendrissantes. Des personnages toujours aussi charismatiques malgré leur nombre croissant au fil de l’histoire. Et des décors variés et soignés.
Si on retrouve un graphisme marqué de l'influence des cartoons, il l’est tout autant de celles du franco-belge, du comics et même du manga. Un savant mélange qui détonne au profit d’un récit bourré d'énergie et de vie. Le dessin gagne encore en efficacité grâce au choix heureux des cadrages et de la mise en page.
Les couleurs confirment la qualité du travail réalisé par Oscar Martin.Une très bonne série Delcourt.
SDjuan
-
JOUR J 43
- Par asbl-creabulles
- Le 08/02/2021
Tome 43 : Le Grand Secret 2/3
Scénario : Fred BLANCHARD, Fred DUVAL & Jean-Pierre PECAUD
Dessin : BRADA
Couleurs : Jean-Paul FERNANDEZ
Couverture : Nicolas SINER & Fred BLANCHARD
Dépot légal : Janvier 2021
Editeur : Delcourt
Collection : Neopolis
ISBN : 978-2-7560-9096-2
Nombre de pages : 56Mary Danaher a survécu à l’explosion qui a coûté la vie à son collègue Sterling. Lorsqu’elle se réveille à l’hôpital, elle réalise que les nazis ont réussi leur coup : ils sont bien là au cœur de New York. Ils sont venus participer à la Conférence de Paix qui doit sceller la défaite britannique par la signature d’un traité alors que personne n’a connaissance de ce qui se trame en Europe, en particulier leur programme d’extermination des ennemis du Reich visant, entre autres, les Juifs. De plus, leur influence s’est répandue jusque dans les territoires chinois occupés par le Japon. Là aussi, les nazis s’efforcent d’y répandent leur idéologie ségrégationniste, raciste et antisémite, d’autant qu’une forte communauté juive est déjà installée à Shanghai. Mary Danaher y est dépêchée en urgence pour recueillir des infos sur les plans d’action des Allemands, dénoncer ce qui se prépare tant au Japon qu’en Europe et pousser les Américains à se dresser et entrer en guerre contre les nazis. Sur place, elle doit contacter Bob Simon, un ancien petit ami qu’elle a connu en Espagne durant la guerre civile et qui l’avait quittée après la dissolution des brigades internationales Lincoln. Bob tient un bar à Shanghai et aurait des contacts sur place.
Mon avis: Le trio de scénaristes (Blanchard, Duval, Pécau) fait monter la tension. Malgré les efforts de Miss Danaher pour mettre en place une bonne stratégie, les choses ne vont pas toujours aller dans son sens. Elle va vite s'en rendre compte. Aussi qualifiée et déterminée soit-elle dans son rôle d’espionne, elle ne pèse pas bien lourd sans des soutiens et alliés à qui faire confiance face à des Allemands, en particulier les SS, qui sont déjà bien implantés et ne cessent d’étendre leur contrôle.
Loin d’être simple spectateur, on accompagne les héros et l'empathie fonctionne très bien. La narration accroche, on a envie de savoir et à présent on attend avec impatience le troisième et dernier volet de cet épisode tout à fait dans la lignée de la série.
Le dessinateur serbe Brada (L’Expert avec Frank Giroud, Lignes de Front avec Jean-Pierre Pécau, La Druzina avec Jacques Mazeau) nous régale d’un dessin bien maîtrisé qui épouse parfaitement l'histoire. L’ensemble est plein d’énergie, en particulier sur les nombreuses scènes d’action, de confrontation ou de filature.
La tension qui règne est largement soulignée par des cadrages variés et signifiants. Elle en devient presque palpable.
Un récit bien noir traité dans un style très cinématographique.
Les couleurs de Jean-Paul Fernandez accompagnent parfaitement le dessin en soulignant l'ambiance froide et oppressante de l'histoire.SDJuan
-
RICHARD CORBEN Murky World
- Par asbl-creabulles
- Le 04/02/2021
Scénario : Richard CORBEN
Dessin : Richard CORBEN
Couleurs : Reed, Beth CORBEN & Richard CORBEN
Traduction : Alex NIKOLAVITCH
Dépot légal : Septembre 2020
Editeur : Éditions Delirium
ISBN : 979-10-90916-63-0
Nombre de pages : 138 (120 + carnet de croquis en fin d'album de l'édition originale)Corben nous a quittés récemment. (voir article ici)
Il nous reste son dessin incomparable et inimitable.
J’ai découvert cet auteur dans la revue Métal Hurlant.
Je ne sais plus pourquoi je me trouvais dans ce quartier bruxellois et comme je ne pouvais pas passer devant une librairie sans la visiter.
Mes yeux furent attirés par la sensationnelle couverture du numéro 1!
Ma mémoire a gardé cette sensation incomparable de découvrir et de feuilleter pour la toute première fois ce magazine.
J’ai eu et j’ai lu tous les livres de Richard Corben en édition originale parus en langue française. Même le portfolio grand format acheté à la librairie Temps Futurs du regretté Stan Barets.
Puis un jour, voici quelques années, j’emportais toute ma collection vers la librairie Rackam, temple de l’édition originale.
Mais c’était une autre époque. Depuis le maître des lieux a pris sa retraite.
Et moi j’ai racheté quelques Corben, tout ça parce qu’il a eu le grand prix d’Angoulême et que pour l’occasion est paru un somptueux catalogue de l’expo vendu en un rien de temps et absolument introuvable. Mais je l’ai trouvé.
C’est pourquoi aujourd’hui, je commente ce Murky World qui me fait beaucoup penser à Den.
Les grosses bébêtes, les sorciers, les femmes monstrueuses ou plantureuses sont là.
Le héros bodybuildé aussi, de même que les décors fantastiques où vivent toujours quelques monstres affamés.
Cette histoire est parue en chapitre de 8 pages aux USA en format comics.
Tugat, notre héros vaque dans ce monde trouble, guidé par la vieille Mag, sorcière qui a un faible pour lui.
Il rencontrera la jolie Moja, esclave qui s’est évadée.Il devra combattre Thurlon et ses zombies, qui recherchent l’esclave.
Tugat et Moja seront capturés et conduits chez Brek, propriétaire des combattants de l’arène...
Mais ils ne s’arrêteront pas là, leur périple les fera rencontrer deux lutteuses jumelles, l’effroyable animal de compagnie d’un horrible sorcier, une géante cyclope... au milieu d’un décor étonnant de tours oubliées où la terre est vorace.
Après des récits policiers ou dramatiques quand ce n’est pas l’histoire d’un rat géant,
Corben est revenu à ses premiers centres d’intérêt : la fantasy horrible et humoristique. Parodie des récits mythologiques et des péplums.
Il ne faut pas rechercher un scénario rigide, non Corben s’amuse et les invraisemblances sont nombreuses.
Les personnages parfois semblent être en pâte à modeler ou alors d’un hyperréalisme avec muscles ou seins exacerbés suivant leur sexe.
Mais c’est du Corben de toute beauté.Son travail sur la couleur (ici aidé par sa fille, je crois) est inouï.
Dans les combats, les plans sont d’une ingéniosité fantastique.
Ses représentations sont toujours imprégnées de la culture underground.
On se régale comme devant un nanar au cinéma à la différence qu’ici le réalisateur était un génieM. Destrée
-
LA VÉRITÉ NUE
- Par asbl-creabulles
- Le 03/02/2021
Scénario : JAMES
Dessin : JAMES
Couleurs : JAMES
Dépot légal : Septembre 2020
Editeur :
Collection : Pataquès
ISBN : 978-2-413-02635-8
Planches : 98Un petit format d'une centaine de pages mais lourd de sens. Des gestes, des situations, des comportements du quotidien, chez soi, au café, lors d’un entretien d'embauche, au lit après l'amour, discutant avec une amie au supermarché, essayant d'isoler un virus (!?!) dans un laboratoire de recherche, se trompant de tenue pour faire du sport, s'émerveillant et s'écriant "Regarde maman c'est Spidèrmane" en voyant Spider-Man passer, etc.
Tous les animaux anthropomorphes nous racontent leurs petites histoires en quatre cases maximum. Et il n'en faut pas plus tellement c'est efficace. Des réponses claires allant à l’essentiel, parfois abruptes ou frappantes de logique à des questions simples ou existentielles pour toutes ces scènes de la vie de tous les jours. Et n'hésitant pas pour être encore plus percutant à en passer par l'absurde, la dérision, la moquerie, l'affligeant, etc. Une centaine de vérités sous forme de mini-gags d'une efficacité déconcertante et drôles.
Côté dessin, on apprécie cet humour pince-sans-rire illustré par une longue suite d’associations d’animaux anthropomorphes, par exemple une poule parlant avec un lapin, une girafe avec une autruche, un chien avec un canard, un félin accompagnant ou parlant avec l’une de ses proies favorites... toujours avec un air grave et s’exprimant sur un ton sérieux. Un dessin soigné, plutôt réaliste parfois agrémenté de jolis décors, et accompagnant le texte d’une manière très plaisante et jamais dans l'excès.
Un très bon moment d’évasion et de détente.
SDJuan
-
DUKE #5
- Par asbl-creabulles
- Le 29/01/2021
Tome 5 : Un pistolero, tu seras
Scénario : Yves H
Dessin : HERMANN
Couleurs : HERMANN
Dépot légal : Janvier 2021
Editeur :
ISBN : 978-2-8036-8033-7
Nombre de pages : 56Traqués par la cavalerie qui leur colle au train, Duke et Swift continuent de fuir pour honorer le contrat passé avec Soakes & Sears pour le transport de 100.000 $ à Sacramento. La route est longue et Duke laisse son esprit vagabonder. De lointains souvenirs refont surface comme son arrivée à l'orphelinat avec son frère Clemence ou sa lente dérive vers le pistolero qu’il est devenu aujourd’hui. À Ogden, plus rien ne va pour Mullins qui n’en revient pas de s’être fait flouer par Soakes & Sears qui a liquidé ses parts dans la mine d’or ainsi que par son associé, Steiner. Quant à Peg, après avoir été enlevée elle a été conduite auprès d'un homme dont on sait à présent qu’il a joué un rôle déterminant dans le choix de vie de Duke.
Mon avis : Yves H travaille son scénario sur la durée. D’album en album, il avance ses pions pour nous mener progressivement vers une conclusion et un final apportant des éléments de clarification et ne laissant rien en suspens. Cette fois, on en apprend un peu plus sur Duke et son enfance, sur ce qui le pousse à avancer, mais aussi sur les magouilles, abus, malversations autour de la mine et leurs conséquences pour la ville d'Ogden et ses environs. Les actes de traîtrise font aussi beaucoup de dégât dans ce monde violent. Les tenants et aboutissants de l’histoire nous sont révélés peu à peu au fil des albums, un rythme dont nous n'avons plus trop l'habitude en BD de nos jours. Personnellement, j’apprécie cette autre manière de travailler. Yves H sait ménager ses effets, la tension monte et tout peut arriver à chaque instant. Si l'étau se resserre autour de Duke, être le roi de la gâchette ne lui sera pas de trop pour se sortir de ce sac d’embrouilles.
Et bien sûr, ce scénario est magnifiquement illustré par Hermann dont la mise en scène très "cinématographique" si typique est toujours aussi bluffante. Si Duke est un taiseux ce n'est pas le cas d'Hermann qui une nouvelle fois laisse tout son talent s’exprimer. Des cadrages et mises en pages savamment pensés et explicites ; des vues, qu’on dirait en cinémascope pour certaines, des fabuleux paysages de l’Ouest américain avec leurs couleurs flamboyantes pour les scènes brûlantes de jour, plus ternes et dans des tons de gris bleuté pour celles de nuit. Si le dessin sert parfaitement l'histoire, régulièrement il se suffit à lui-même comme en témoignent les nombreux passages en cases muettes. Une lecture très agréable et encore plus limpide grâce à l’utilisation de tons sépia sur les flashes-back pour bien différencier les époques.
Hermann est et reste bien ce grand maître de la BD, entre autres du western, qui réussit toujours à nous surprendre.
SDJuan
-
LE RÉVEIL DU TIGRE
- Par asbl-creabulles
- Le 26/01/2021
Scénario : Serge LE TENDRE & Olivier TADUC
Dessin : Olivier TADUC
Couleurs : Olivier TADUC
Dépot légal : Janvier 2021
Editeur :
Collection :Aire Libre
ISBN : 979-10-34754-19-9
Nombre de pages : 134Appelés à Bakersville en Californie pour enquêter sur plusieurs enlèvements de jeunes filles, les membres de l'agence Pinkerton sont à présent confrontés à un meurtre. La fille du banquier Kelley, elle aussi kidnappée, vient d’être retrouvée violée et assassinée. Matt Monroe, jeune recrue de l'agence, est doublement motivé car, en parallèle, il cherche aussi à retrouver la trace de son vrai père, Chen Long, plus connu il y a près de vingt ans sous le nom de Chinaman, un père qui ne connaît même pas son existence. En fait, Chen Long a bien vieilli et souffre de sérieux problèmes de dépendance à l'opium. Comme souvent, son ami Marcus avec qui il a fait la guerre est passé le récupérer à la fumerie Wong. Leur route va alors croiser celle des ravisseurs recherchés en pleine action. La confrontation est plutôt musclée. Cherchant à libérer la nouvelle victime des ravisseurs, Marcus est tué sous les yeux de Chen, de même que le chien de Chen, froidement abattu après avoir blessé à la gorge l’un des gangsters. Quant à Chen, touché à la tempe, il est tombé inconscient. Des bûcherons accourus alertés par la fusillade font fuir les ravisseurs. La jeune femme enlevée, Amy Brandon, s’en est sortie saine et sauve et grâce à elle, Chen connaît à présent le nom de l’un des malfrats : Bellamy. Le Réveil du Tigre va nous entraîner dans une chasse à l'homme au cours de laquelle les chemins des principaux protagonistes vont se croiser à nouveau. Si Matt Monroe va enfin rencontrer son véritable père, il aurait certainement préféré d'autres circonstances pour ces retrouvailles. Et les choses ne vont pas aller en s'améliorant…
Mon avis : Trois bonnes raisons pour moi d’apprécier cet album. C'est un récit passionnant, mélange réussi de western et de polar. C’est un immense plaisir de retrouver Chinaman après 13 ans d'absence. Enfin, il m’évoque et complète la belle série Warrior (dont je viens de voir la saison 2) de Jonathan Tropper, une série inspirée d’une idée originale de Bruce Lee et qui aborde aussi la condition de vie des immigrés chinois en Amérique et les rivalités des triades plus ou moins à la même époque que Chinaman.
On se souvient qu’Olivier TaDuc et Serge Le Tendre ont débuté leur série Chinaman (située à l’époque de la ruée vers l'or) en 1997 avant de l’arrêter en 2007 avec l'album intitulé Tucano. Nous retrouvons donc le héros 20 ans plus tard dans un western classique, dense et efficace, agrémenté de polar, mêlant plusieurs histoires qui ne vont cesser de se croiser pour finir en apothéose. Un retour musclé qui fait la part belle à une autre époque – celle de l’or noir et des compagnies pétrolières – qui ne devait pas non plus être des plus tendres. Chen Long, alias Chinaman, a connu et vécu la violence depuis longtemps, en fait durant toute sa vie, notamment le racisme et, ces dernières années, la guerre de Sécession. Une violence qui va le mener vers la drogue, une violence qui, bien des années plus tôt, avait fait fuir la femme qu'il aimait alors qu'elle était enceinte. On serait en droit d’espérer que les retrouvailles avec un fils qu'il ne connaissait pas vont enfin lui apporter un peu de paix. Mais rien n'est gagné.
Chinaman nous revient dans un très bel album de 134 pages dans la collection Aire Libre. Il est clair que le tandem Le Tendre-TaDuc a bien cogité ce come-back. C’est tout à fait crédible et surtout très bien raconté. Une voix off nous renseigne sur les pensées de Matt Monroe et des dialogues bien ciselés font le reste sur un rythme soutenu. Et, cerise sur le gâteau, les auteurs font durer le suspense de cette histoire sombre en optant pour une approche en deux temps. Arrivé à la moitié de l'album, j'ai eu l'impression d'être à la fin de l'histoire mais, surprise, cela redémarre aussi vite et se poursuit de manière soutenue jusqu’à un final et une conclusion de haut vol. Cela donne vraiment envie de relire toute la série.
A noter pour ceux qui ne connaissent pas encore la série Chinaman que Dupuis la réédite sous forme de trois belles intégrales avec de nouvelles couvertures à la couleur directe. C’est vraiment le moment d’en profiter.
Quant au dessin, c’est du TaDuc au sommet de son art. Olivier TaDuc crée d’abord ses dessins, ses crayonnés par ordinateur mais comme il aime travailler ses encrages à l’encre de chine, il les finalise ensuite sur papier. On peut y voir de superbes paysages de l’Ouest américain – certains faisant penser à l’un de ses auteurs de référence, Hermann – et plus globalement de magnifiques décors et plusieurs scènes d’action très réussies. Ajoutons des personnages bien reconnaissables et expressifs et une mise en page claire et dynamique pour un album un rien plus réaliste que les précédents qui bénéficie de couleurs agréables et appropriées de sa part avec l’aide de Luc Perdriset. Une belle réussite pour conclure la saga de Chen Long, alias Chinaman.
Un album également proposé en deux éditions spéciales : un album N&B grand format en tirage unique limité à 1500 exemplaires et un tirage de tête limité à 777 exemplaires avec frontispice numéroté et signé par les auteurs.
SDJuan
-
VLAD DRACULEA
- Par asbl-creabulles
- Le 26/01/2021
Tome 1
Scénario : Akiyo OHKUBO
Dessin : Akiyo OHKUBO
Couleurs : <N&B>
Dépot légal : Octobre 2020
Editeur : Soleil Productions
Collection :
ISBN :978-2-302-09167-2
Planches : 208En ce milieu du XVe siècle, le prince Vlad III vient de succéder à son père sur le trône de la principauté de Valachie. En fait, il n’est qu’un fantoche manipulé par les Boyards, autrement dit les nobles valaques qui ont pouvoir de décision sur tout ou presque. De plus, son territoire est pris en tenaille entre l’Empire ottoman et le royaume de Hongrie. Vlad III est otage mais deviendra vite complice d’un jeu politique et diplomatique impliquant ses deux puissants voisins. Sa ruse et son intelligence vont rapidement lui permettre de prendre de l’assurance et de s’exprimer face, en tout premier lieu, au plus puissant des nobles de Valachie, Alve. Mais pour espérer sauver son pays, il va devoir manœuvrer afin de trouver de nouvelles alliances et de nouveaux soutiens pour récupérer toute son autorité.
Mon avis : Ce récit nous ramène aux origines de Dracula. Si le nom Draculea s’applique à l’ensemble de la lignée issue du premier prince de Valachie, Vlad II Dracul (le dragon), il concerne surtout Vlad III, surnommé Dracula (fils du dragon), un nom que reprendra l’écrivain Bram Stoker dans son roman paru en 1897 pour le comte vampire. Ce premier tome nous permet de découvrir l’histoire du personnage ayant inspiré le vampire terrifiant que nous connaissons tous. Un prince certes rusé et intelligent mais également tyrannique et d’une cruauté redoutable qui lui vaudra son nouveau surnom d’Empaleur. Grâce à un récit efficace et documenté, dont il maintient habilement le suspense, l’auteur nous donne l’occasion d’en apprendre beaucoup sur la jeunesse du mythe de l'épouvante. Un premier tome plutôt dynamique et captivant mettant en place chaque personnage comme sur un jeu d'échecs.
Coté dessin, Akiyo Ohkubo, nous régale d’illustrations détaillées dans un style plutôt réaliste. Ses personnages sont tous bien reconnaissables malgré leur grand nombre grâce à un gros travail sur les expressions. On retrouve le même soin et la même richesse dans les décors et costumes.
À suivre avec un intérêt certain.
SDJuan