Créabulles, Expositions, Dédicaces, Rencontres.

Chroniques

Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture. 

  • H.O.M.E. 1

    H o m eTome 1 : Restez chez vous
    Scénario : Hervé BOURHIS
    Dessin : Rudy SPISSERT
    Couleurs : <Indéterminé>
    Dépot légal : Mai 2021
    Editeur : Dupuis 1
    Format normal
    ISBN : 979-10-34741-29-8
    Planches : 60

    C’est l’histoire d’un robot de guerre qui, devenu obsolète, s’est retrouvé abandonné dans une décharge interplanétaire quelque part dans l’espace. Un jour, suite à un appel provenant de la planète Terre, il se réactive et se met en route dans sa direction. Son arrivée sur Terre se déroule dans les pires conditions : il écrase littéralement la maison que venait d’acquérir une petite famille qui, étrangement, ne se démonte pas en assistant à la scène. Alors que les parents s’efforcent de comprendre ce qui vient d’arriver, Ariane, la plus jeune de la famille, réussit à s’introduire dans le robot extra-terrestre et en prend le contrôle. Il y a tellement d’espace à l’intérieur qu’au final toute la famille – Ariane, son demi-frère Arthur et leurs parents – décide de s’y installer même si le cadre n’est pas vraiment adapté. En fait, cette situation ne semble pas due au seul hasard car le père biologique d’Arthur, un astronaute pilote de H.O.M.E. (Humanoïde / Obsolète / Mégalactique / Électronique), a perdu la vie lors d’une mission dans l’espace.H o m e page 8Mon avis : Voici une BD jeunesse, pour ados mais pas seulement…, qui combine et réunit tout ce qui a fait le succès de comics, dessins animés et/ou films parodiques tels que Galactus, Mazinger Z, Mars Attack, etc.
    Chaque lecteur devrait donc y trouver son compte.
    Raconté par Hervé Bourhis en plusieurs épisodes, on découvre une famille sympathique et drôle, aux parents ultra geek et aux enfants hyper connectés qui s’adaptent tous très vite à tout. En revanche, la discrétion n’est pas leur fort. Aucun n’arrive à préserver leur "secret" face à des voisins très curieux ou des policiers cherchant l’origine d’étranges secousses et vibrations dans le quartier. Et si on y ajoute les attaques extraterrestres, ils ont du pain sur la planche. H o m e page 9Ce récit à la narration très fluide est illustré par Rudy Spiessert qui nous propose des dessins tout aussi sympas. Il est très à l’aise comme il nous l’a déjà prouvé avec Ingmar ou Stéréo Club.
    Un dessin au trait énergique tout à fait efficace pour un bon moment de lecture.

    SDJuan

  • O'SULLIVAN t1

    O sullivanTome 1 : Mary-Mae
    Scénario : RODOLPHE
    Dessin : MARC-RENIER
    Couleurs : 1ver2ânes
    Dépot légal : Mars 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Histoire & Histoires
    Grand format
    ISBN : 978-2-413-00256-7
    Planches : 58

    Résumé:
    Jim Sullivan est auteur et il habite de l'autre côté de l'Atlantique. Il connaît son petit succès dans le domaine de la science-fiction. Lorsque son père décède un an plus tôt, il laisse derrière lui des centaines d'heures de collectes d'informations sur les origines de leur famille. Il ne s'appelle pas Sullivan mais O'Sullivan et provient de cette bonne vieille Irlande. Il n'en fallait pas plus pour susciter la curiosité de l'auteur et prendre le relais de son père afin d'écrire un livre sur ses ancêtres.
    Un billet d'avion plus tard, Jim marche sur les traces de ses ancêtres. Il a loué une petite bicoque dans un coin reculé de l'Irlande où tous les habitants sont cousins. Il s'y trouve pour s'inspirer de l'ambiance des lieux, des paysages et il espère ainsi être fidèle à ce qu'a dû vivre son ancêtre qui porte le doux prénom de Mary-Maë.
    L'histoire de Mary-Maë commence dans la tristesse et la misère. En effet, la famine fait des ravages et elle décide de prendre le bateau pour le Canada. Elle embarque de Galway pour un long voyage. Ils sont tous entassés, tous malades, des morts partout, de la nourriture infecte. Elle doit tenir car... elle est enceinte! Elle a pour seul bagage une clé. Une clé transmise à l'ainé de la famille et ce, de génération en génération. Que cache donc ce secret? Que peut-elle ouvrir? Jim Sullivan s'embarque dans une aventure avec à ses côtés la jolie Rosie, bibliothécaire du bourg irlandais...
    Achetez l'album et laissez-vous emporter par Jim...O sullivan planche
    Mon avis: Ce livre est impressionnant et j'ai déjà hâte de lire les trois autres tomes! Je suis rentré directement dans le livre et les pages défilent si vite que je suis arrivé à la fin sans m'en rendre compte!
    L'histoire écrite par Rodolphe est bien plantée et les couleurs permettent de différencier les parties "Mary-Maë" et les parties "Jim". Marc-Renier m'a expliqué que c'était voulu. En effet, on est dans des teintes "jaunes" pour l'héroïne et vives pour le héros. Au plus vous passez les pages et rentrez dans l'histoire, au plus les couleurs changent et deviennent "réelles". Joli coup de maître!O sullivan planche autreLe dessin bien spécifique de Marc-Renier, le scénario, tout est bon!
    Si vous avez la chance de voir Marc-Renier il vous parlera de ses petites anecdotes sur "Grosse île" qui était le passage obligé pour les migrants avant de rentrer sur le territoire canadien, il vous parlera avec passion de ce pays, de ce qu'il a vu pour faire cet album. Il transpire la passion!

    MJordan

  • TROLLS DE TROY 25

    Trolls de troy 25Tome 25 : On ne badine pas avec les mouches
    Scénario : Scotch ARLESTON
    Dessin : Jean-Louis MOURIER
    Couleurs : Claude GUTH
    Dépot légal : avril 2021
    Editeur : Soleil
    Format : Grand
    ISBN : 978-2-302-09095-8
    Nombre de pages : 48

    C’est une journée un peu comme les autres au village des Trolls. Profy essaye une fois de plus de se construire un logis douillet à partager avec sa fiancée, Waha. Mais, une fois de plus, la cabane va très vite s’écrouler. Et du coup le chef Teträm se dispute avec son épouse Puitepée qui lui reproche de ne pas aider Profy. De rage, elle s’en prend à leur propre maison qui s’effondre tout aussi facilement et décide de partir faire un tour en forêt pour se détendre. Parallèlement, à Eckmül les choses prennent une tournure plus inquiétante, plus précisément au Conservatoire où les sages Ygôth et Dypäh sont en train de fomenter un complot qui risque bien de bouleverser tout le Monde de Troy. Moyennant une coquette somme d'argent, ils se sont offerts les services du mage Mytyq. Grâce à son pouvoir et aux poils discrètement prélevés sur Puitepée dans la forêt, il doit créer un philtre d'amour imparable. Leur plan? Faire boire cette potion au vénérable Rysta Fuquatou afin qu'il tombe follement amoureux de Puitepée et lorsqu’il cherchera à la rencontrer qu’il se fasse inévitablement dévorer par ses congénères trolls. Tout du moins, c'était le plan. Mais sur Troy, les choses prennent très souvent des chemins inattendus et surprenants.Trolls de troy 25 plancheMon avis : Nul besoin pour Arleston de confirmer son talent, encore moins avec tout ce qui touche les Trolls, pour nous offrir de nouvelles aventures farfelues du Monde de Troy.
    On passe un bon moment, on s'amuse, c'est drôle et totalement déjanté et ça fait du bien en cette période plutôt morose (même la météo semble nous lâcher !)...
    Il fallait oser cette idylle et c'est fait. On peut s'attendre à tout et je laisse aux lecteurs le plaisir de découvrir ce bon moment de délire jouissif.
    Les rebondissements vont bon train et toujours là où on s’y attend le moins même si l’auteur nous livre d’emblée des pistes pour la suite.
    Les Trolls ont encore un bel avenir devant eux.Trolls de troy 25 planche autre
    Je ne connais pas Arleston mais bien Jean-Louis Mourier. Je pense pouvoir dire sans trop me tromper qu'il a dû prendre un plaisir fou à nous concocter cet album.
    Ses dessins sont toujours au top. Clairs et détaillés, drôles et expressifs.
    Il maîtrise son sujet (depuis 1997 !!!) pour nous proposer une belle mise en scène, de beaux décors et des personnages hyper expressifs. Il tape dans le mille.
    D’ailleurs, lorsqu’il s’agit de "taper" les trolls en connaissent un rayon.
    Très belle mise en couleurs de Claude Guth, l’un des meilleurs coloristes actuels.
    Il réussit à mettre de la clarté jusque dans les coins les plus sombres...
    Tout ressort, tout prend vie sous nos yeux.

    C'est véritablement une équipe qui marche (depuis plus de vingt ans maintenant).

    SDJuan

  • MADEMOISELLE BAUDELAIRE

    Mademoiselle baudelaireCoup de coeurScénario : YSLAIRE
    Dessin : YSLAIRE
    Couleurs : YSLAIRE
    Dépot légal : avril 2021
    Editeur : Dupuis 1
    Collection : Air Libre
    ISBN : 979-10-34749-17-1
    Nombre de pages : 160

    C’est en 1842 que Charles Baudelaire, alors jeune dandy de 21 ans, rencontre pour la première fois Jeanne Duval. Cette jeune et belle mulâtre tient un tout petit rôle dans la pièce de théâtre à laquelle il assiste. Et pourtant, il ne voit qu’elle et n'a plus qu'une idée en tête, faire sa connaissance. Ils auront rapidement une première aventure amoureuse. Jeanne va très vite prendre de l'importance aux yeux de Baudelaire. Quand son entourage lui demande ce qu'il lui trouve, il fait un peu le fanfaron, parle de passade tout au plus, mais au fond de lui il sait déjà qu’il l'aime et qu'elle va lui être indispensable. À tel point qu'il va lui payer un logement où il passera la voir une fois par semaine, puis de plus en plus fréquemment... si bien qu’elle deviendra sa muse. Un jour, il la surprend en train de lire quelques vers d’un nouveau poème qu’il vient d’écrire. Cela l’enchante et il lui demande si elle veut bien se charger de transcrire ses brouillons. Outre le logement, Baudelaire va la combler de cadeaux de toutes sortes et de bijoux plus somptueux les uns que les autres. Elle est tellement présente dans sa tête qu'elle apparaît partout, dans une peinture de son ami Gustave Courbet mais aussi et particulièrement dans une toile d’Edouard Manet mais c’est principalement dans ses écrits et en tout premier lieu "Les Fleurs du Mal" que l’on retrouve Jeanne. La mère de Charles n'acceptera jamais cette fille de couleur qui à ses yeux n'est qu’une femme de petite vertu qui profite et abuse de son fils. Et à mesure que la santé de Baudelaire va aller en se détériorant, sa relation avec celle qu’il a surnommée "Vénus noire" va elle aussi se dégrader. Malgré tout, grâce à la magie d’Yslaire, Jeanne décide d’écrire à la mère de Charles quelques jours après son décès pour lui raconter sa version de l'histoire qu'elle vécue avec son fils. Mademoiselle baudelaire plancheMon avis : La sortie de l’album coïncide avec le bicentenaire de la naissance de Baudelaire, né le 9 avril 1821, un album en projet dès 2016 mais qui n’a pas été accepté à l’époque et donc abandonné. Ce n’est que trois ans plus tard que l’on a proposé à Bernard Yslaire de le reprendre. Ses 144 planches vont lui demander 14 mois de travail. Il ne s’agit pas de la biographie de l’auteur des Fleurs du Mal, recueil condamné pour outrage aux bonnes mœurs et même censuré à sa sortie en 1857.
    Yslaire se concentre sur Jeanne, sa belle muse et sur leur relation passionnée, éperdue et tourmentée, sur l’inspiratrice principale de son œuvre.
    À travers la lettre de Jeanne à la mère de Baudelaire, on comprend mieux quelles ont pu être les relations entre la mère, le fils et ses amis, et Jeanne, la Vénus noire, quels ont pu être les avis et convictions de chacun. La mère et les amis de Charles n’ont vu qu’une mulâtresse intéressée par les cadeaux et l’argent, une prostituée alors qu’elle ne pouvait être que libertine au pire, ce qui colle parfaitement au jugement réprobateur de l’époque.
    Baudelaire n’a pas été surnommé poète maudit pour rien. Personnage en marge de la société, provocateur, menant une vie dissolue mais arborant toujours un col blanc immaculé, il va dilapider l’héritage de son père en cadeaux luxueux pour sa muse, mais aussi dans l’alcool, les drogues, l’achat frénétique de tableaux. Mais si sa relation a été source d’amour, de passion et d’inspiration, elle a aussi engendré discorde, haine et désespoir.Mademoiselle baudelaire planche suiteCôté dessin, l’album est de toute beauté dans les ambiances et décors du Paris du XIXe siècle grâce à une très agréable mise en page et des illustrations faisant la part belle à l’esthétisme et un jeu de couleurs sépia raffiné.
    Peu de traces ou documents existent concernant Jeanne, la plupart ayant été détruits par la mère de Baudelaire (lettres) ou à la demande de Baudelaire lui-même (image de Jeanne effacée par Courbet sur sa toile).
    La poésie est bien présente à travers des illustrations oniriques rendant presque palpables les moments imaginaires ou dus aux effets des "paradis artificiels" ou de l’alcool.
    La dureté de la vie aussi, la souffrance des lésions syphilitiques qu’il tente de traiter avec divers remèdes comme le mercure (déconseillé de nos jours) mais aussi lors de ses disputes et crises de colère avec Jeanne, etc. La beauté, enfin, incarnée par une Jeanne tantôt discrète, tantôt provocante et sensuelle pour ne pas dire lascive voire, pour d'autres, démone.Mademoiselle baudelaire illu

    Un très bel album hommage à Charles Baudelaire et à Jeanne Duval.

    SDJuan

  • TRANSITIONS - Journal d'Anne Marbot

    Transitions journal d anne marbotCoup de coeurScénario : Élodie DURAND
    Dessin : Élodie DURAND
    Dépot légal : Avril 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Mirages
    ISBN : 978-2-413-02431-6
    Nombre de pages : 176

    Anne est une mère comme il en existe partout et depuis toujours même si elle a eu des enfants de deux pères différents. Comme la plupart des gens, elle a été élevée et éduquée dans un monde binaire homme/femme. Un monde où l'on mène une vie d’homme ou de femme sans se poser trop de questions. Aussi, lorsque sa fille Lucie qui vient d'avoir 19 ans lui annonce qu'elle est en réalité un garçon, tout bascule. Ses bases, ses croyances et surtout ses certitudes s’écroulent subitement. Sa première réaction est d’emmener sa fille chez le médecin. Mais Lucie lui annonce qu’elle est déjà suivie par une psychologue et qu’elle n'a pas besoin d'aide, qu'elle se sent bien comme elle est. Anne n'a rien vu venir. Elle est désemparée, elle culpabilise. Heureusement, elle va chercher à comprendre par elle-même mais aussi auprès de personnes compétentes.Transitions journal d anne marbot planche je suis un garconMon avis : Élodie Durand a écrit cet album à partir de l’histoire réellement vécue par Anne Marbot (en fait un nom d’emprunt) qu’elle a côtoyée pendant trois ans.
    Après le choc de l'annonce, on découvre une mère glacée, déroutée, ne sachant pas quoi faire.
    Heureusement, passé ce moment d’affliction, elle réagit pour comprendre. Elle écoute la psychologue du planning familial et se rend compte que les termes "homme" et "femme" ne sont que les deux extrêmes de la notion de "sexe". Entre les deux, il y a place pour la nuance. Le genre voyage donc entre ces deux états et le curseur peut être placé là où chacun(e) le veut, là où il/elle se sent le mieux. Il arrive même que l’on soit en dehors de ces deux extrêmes.
    Anne s’efforce alors de comprendre, d'ouvrir son esprit à toutes ces révélations.
    Avec son mari elle va chercher des exemples, d'abord scientifiques, et ensuite essayer de modifier sa manière de voir les choses et les gens et de les aborder. Son jugement va évoluer pour comprendre cette nouvelle représentation du monde des genres et, à sa manière, pour s'ajuster à sa fille Lucie désormais devenue son fils Alex.
    Un album édifiant et instructif, jamais difficile et ennuyeux, comportant une bonne dose de pédagogie joyeuse pour accrocher le lecteur et l’inciter à comprendre cet état de fait. Le problème n’existe qu'à cause de notre éducation un peu fermée, extrême, qui confond identité de genre (binaire ou non binaire) et sexualité.Transitions journal d anne marbot planche
    Les dessins s’ils surprennent au début par leur hétérogénéité se révèlent très vite captivants.
    Ils sont faits d’un subtil mélange de cases traditionnelles plutôt sobres et d’illustrations de plaquette informative faisant appel aux outils de recherche contemporains, entrecoupées d’images et de croquis, tout à fait typiques de la manière de travailler d’Élodie Durand en mélangeant les formes et les styles.  Brussels pride
    Cette chronique est réalisée en pleine période des "marches des fiertés" dans de très nombreux pays dans des formats souvent réduits et/ou adaptés à la situation. C'est ainsi que la Belgian Pride a annulé sa traditionnelle parade en ce mois de mai 2021 mais s’achèvera par un grand événement en ligne ce 22 mai, moment jugé approprié par Créabulles pour poster la chronique de cet ouvrage.

    SDJuan

  • GENTLEMIND

    GentlemindTome 1 : Gentlemind - Épisode 1
    Scénario : Teresa VALERO & Juan DIAZ CANALES 
    Dessin : Antonio LAPONE
    Couleurs : Antonio LAPONE
    Dépot légal : août 2020
    Editeur : Dargaud logo
    ISBN : 978-2-205-07637-0
    Planches : 68

    New York 1939. Jeune femme de vingt ans, sans qualification particulière ni fortune, Navit est éprise d’Arch, un jeune dessinateur sans le sou. Celui-ci tente de se faire engager à la rédaction d’une revue sans succès, Gentlemind, qui prête son titre à cette bande dessinée. Contre son gré, Arch va pousser Navit dans les bras du directeur de la revue, H.W. Powell, un vieux milliardaire plus préoccupé par les mannequins de Gentlemind que par le succès financier de la revue. À force d’insistance, Navit finira par accepter d’épouser Powell. Ce personnage n’est pas sans rappeler le milliardaire et magnat de la presse du film "Citizen Kane" d’Orson Welles, lui-même fortement inspiré du réel milliardaire William Hearst. Au décès de Powell, Navit se retrouve à la tête de la revue, qu’elle tentera tant bien que mal de redresser, avec force d’audace et d’idées innovantes. Son chemin croisera celui de Waldo Trigo, un requin du barreau new-yorkais, tombé en pleine crise d’humanisme et de boulimie littéraire.Gentlemind planche 4Mon avis : C’est parti pour un voyage dans le New York des années 1940. Les scénaristes, Juan Diaz Canales et Teresa Valero ont aussi scénarisé respectivement Blacksad et Sorcelleries (un point commun est vite trouvé: Juanjo Guardino dessine ces deux séries). Ils nous emmènent dans une ville grouillante de vie. Avec sa faune variée, du jeune artiste à l’enthousiasme inversement proportionnel à son succès, au milliardaire à la fougue inversement proportionnelle à sa jeunesse. Mais, surtout, avec l’émergence d’une jeune femme au cœur d’une industrie encore dominée par le "sexe fort". La manière par laquelle Navit tentera de trouver, pour renouveler son magazine, ce qui intéresse les hommes est pour le moins ingénieuse et pleine de légèreté malicieuse.Gentlemind plancheLe dessin d’Antonio Lapone est unique. Il est empreint de douceur, de couleurs pastel et surtout d’élégance. L’élégance irradie le lecteur dès la couverture. Le dessinateur du tout aussi élégant "La fleur dans l’atelier de Mondrian" (Glénat, 2017) – l’artiste néerlandais exilé à New York à la même époque aurait d’ailleurs pu croiser Navit – ponctue notre lecture par des affiches ou des unes de revues réinventées, devant lesquelles on reste admiratif. Les couleurs douces nous plongent dans les années 1940.Gentlemind illuN’hésitez pas : mettez votre 33 tours préféré de Duke Ellington ou de Billie Holiday dans votre gramophone, installez-vous dans votre divan avec un bon verre, prenez en main votre Gentlemind et embarquez pour le voyage. Cerise sur le gâteau, la suite et fin est annoncée pour cette année 2021.

    Il faut lire Gentlemind si vous aimez : les années 40 à New York, les femmes de poigne, le dessin de presse, l’élégance du trait d’Antonio Lapone

    Jean-BaptisteL

  • PEER GYNT 1

    Peer gyntTome 1 : Acte I
    Scénario : Antoine CARRION
    Dessin : Antoine CARRION
    Couleurs : <N&B>
    Adapté de : Henrik IBSEN
    Dépot légal : Février 2021
    Editeur : Soleil
    Collection : Métamorphose
    ISBN : 978-2-302-09136-8
    Nombre de pages : 100 

    Peer Gynt aujourd’hui âgé nous raconte sa vie de jeune paysan très peu motivé pour cette tâche car plutôt porté vers le rêve et l’imagination. Paresseux, égoïste et surtout menteur invétéré, prétentieux, vaniteux, fabulateur, il partage sa vie avec sa mère Ase qui n'en peut plus d'écouter ses histoires et autres fabulations. Coutumier des escapades, sa vie sentimentale est tout aussi chaotique. Alors qu’il aurait pu se fiancer à Ingrid, une fille de riche propriétaire qui le regardait d’un œil tendre, il a choisi de partir vers de nouvelles aventures. Le regret va néanmoins le pousser à chercher à la reconquérir alors qu’elle est sur le point de se marier. C’est là qu’il croise Solveig qui semble tout acquise à son amour sauf que c’est Ingrid qu’il veut conquérir. Il n’hésite pas à la kidnapper et fuir avec elle, persuadé qu'elle finira par l'aimer pour sa personne. Mais de nouveau sa nature reprend le dessus et il l’abandonne car cette fois, il en est certain, c’est Solveig qu’il aime et c’est auprès d’elle qu’il réalisera son rêve d’être roi ou empereur. Fuyant tous ceux qu’il a offensés en commençant par le père d’Ingrid, il tombe, se cogne la tête et à son réveil se retrouve dans un monde de créatures fantastiques. Une femme se présentant comme la fille du roi de Dovre lui apparaît. Peer se prétend fils de roi. Ils s’éprennent aussitôt l’un de l’autre. En fait, il s’agit de trolls mais ayant conquis le cœur de la fille d’un roi, Peer se voit déjà prince d’un nouveau royaume. Aurait-il enfin trouvé sa place? Combien de temps cela-va-t-il durer?Peer gynt planche 1Mon avis : Que voilà un album singulier. Il s’agit du premier tome de l’adaptation par Antoine Carrion de la pièce de théâtre éponyme écrite en 1867 par le dramaturge norvégien Henrik Ibsen qui s’est inspiré de contes et légendes populaires.
    Ce premier tome en reprend les trois premiers actes, le second tome correspondra aux deux derniers.
    Avec un soupçon de fantastique (trolls, sorcières, etc.), l’histoire est en fait une quête d’identité.
    Accumulant les défauts, le personnage principal mène une vie ne respectant aucune règle. S’il a besoin des femmes et d’amour et de stabilité, son orgueil et son ambition vont lui jouer les pires tours tout au long de ses errances réelles ou imaginaires. On l’accompagne au point de ressentir une certaine empathie à son égard tellement il accumule les malheurs. Au fur et à mesure de ses rencontres, de ses mésaventures et de ses échecs, qu’il provoque lui-même la plupart du temps, on espère qu'il va se reprendre à un moment ou à un autre. Mais force est de constater qu’il n’a vraiment aucune caractéristique du héros traditionnel.Peer gynt planche 2Parallèlement à cet important travail d’adaptation scénaristique, Antoine Carrion nous propose une bande dessinée au graphisme original de toute beauté, à base de noir et blanc avec toutes les nuances de gris, mais aussi de jeux de lumière et d’ombre savamment dosés pour souligner le caractère particulier du récit à mi-chemin entre réalité et fantasmes. C’est notamment le cas dans les pages chez les trolls, en particulier lorsque surgit le "grand courbe" sur deux pleines pages dépliantes.
    L’album présente une grande richesse de décors naturels, paysages brumeux, montagnes floues, ciel nuageux, atmosphère sombre, et de nombreux personnages aux physionomies expressives.

    SDJuan

  • OLYMPIA KYKLOS

    Olympia kyklosTome 1
    Scénario : Mari YAMAZAKI
    Dessin : Mari YAMAZAKI
    Dépot légal : Mars 2021
    Editeur : Casterman
    Collection : Sakka
    Format : Manga
    ISBN : 978-2-203-20298-6
    Planches : 185

    T1/ La nature a doté Démétrios d’un corps bâti pour l’activité physique. D’ailleurs, il aime courir, s’amuser avec les dauphins, sauter d’une falaise à l’autre. On peut dire qu’il affiche une forme olympique. Et pourtant, même s’il a tout pour être un grand athlète sans avoir à faire aucun effort ou presque et si son entourage le pousse à se présenter pour les prochains Jeux Olympiques au lieu de décorer des amphores, la compétition ne l’intéresse pas du tout. Démétrios préfère, et de loin, la peinture. Rien ne peut le rendre plus heureux que d’exercer son talent de décorateur de vases en pensant à Apollonia, la fille du chef du village. Et quand celui-ci, pour éviter un conflit avec le village voisin, propose de régler le contentieux en organisant une compétition sportive dont il sait qu’il sortira vainqueur grâce à Démétrios, ce dernier s’en désintéresse et continue de prétendre mener sa vie comme bon lui semble… Jusqu’à ce jour où, sous l’orage, les éclairs et le tonnerre, il se retrouve soudainement entraîné dans un voyage dans le temps qui va complètement chambouler sa vie.Olympia kyklos 1 plancheOlympia kyklos 2Tome 2
    Scénario : Mari YAMAZAKI
    Dessin : Mari YAMAZAKI
    Couleurs :<N&B>
    Dépot légal : juin 2021
    Editeur : Casterman
    Collection : Sakka
    Format : Format Manga
    ISBN : 978-2-203-20300-6
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    T2/ Démétrios a réussi à sauver son village après son voyage dans le temps, au XXe siècle. A présent, il n’aspire plus qu’à retrouver ses pinceaux mais le patriarche, chef du village, qui est convaincu qu’il est un grand athlète, continue d’intervenir dans sa vie. Ayant vu l’assiette décorée rapportée d’Olympie, il exige de Démétrios qu’il peigne à son tour des athlètes en action sur ses jarres et poteries au lieu d’images à caractère social de la vie courante qui ne se vendent pas. Démétrios fait un nouveau voyage dans le temps en 1964 au Japon à l’époque des JO d’été. Là, il va découvrir une nouvelle forme de dessin tout à fait différente de ce qu’il connaît, le manga. Et surtout, ce ne sera pas auprès de n'importe qui puisqu’il s’agit du grand artiste Ozamu Tezuka dont il va même devenir l’assistant !!Olympia kyklos planchesMon avis: Après un début traité d’une manière plutôt classique, la surprise est totale lorsque la mangaka Mari Yamazaki bouleverse le récit en y introduisant des voyages temporels. L’effet de surprise passé, ces allers-retours dans le futur et/ou le passé, la Grèce antique et le Japon moderne, lui permettent de nous proposer une comparaison de deux modes de vie, de deux cultures, de deux conceptions du sport sur lesquels viennent se greffer non seulement divers enjeux politiques mais encore des enjeux amoureux. Une écriture surprenante mais solide qui lui permet de multiplier les rebondissements agrémentés d’une pointe d’humour. A lire en fin d’album un dossier complémentaire intitulé "La céramique, les Jeux olympiques et moi".
    Au dessin, Mari Yamazaki nous a déjà démontré son savoir-faire et son talent de dessinatrice avec la série Thermæ Romæ. On la retrouve pleinement ici toujours aussi passionnée par l’Antiquité européenne. Son dessin est plein d’énergie, dans un style plutôt réaliste avec de très belles cases, de très belles pages au trait soigné et détaillé et riches en décors des deux civilisations évoquées. Côté émotions, les codes du manga sont d’application, les personnages étant pour la plupart représentés avec beaucoup d’expression, notamment les athlètes des épreuves du pentathlon antique. Une lecture des plus agréables et plaisantes. 

    SDJuan