Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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GIANT 2/2
- Par asbl-creabulles
- Le 26/01/2018
Giant - Giant 2/2
Scénario : Mikaël
Dessin & Couleurs : Mikaël
Dépôt légal : Janvier 2018
Editeur :
Planches : 54Dans ce deuxième volet de la chronique humaniste de Mikaël sur le New York des années 30, nous retrouvons les thèmes très contemporains déjà développés précédemment: la crise économique, le brassage de cultures, les émigrants et l’enfermement dans le quotidien et la solitude.
Giant est un colosse taciturne qui travaille en tant que riveteur à la construction de la tour principale du Rockefeller Center. S’étant fait passer pour le défunt mari de Mary Ann qui vit de l'autre côté de l'océan avec ses trois enfants, il a envoyé, dissimulant la triste vérité, une partie de sa paie à la veuve et entretenu une relation épistolaire. Ces lettres permettent à l’émigrant irlandais de combler les limbes de sa vie et à Mary Ann, sa pénible solitude.
Vient alors le jour où Mary Ann et ses enfants débarquent à New York. Une amère vérité n’est-elle pas préférable à un doux mensonge ?« Le temps doit nous aider à avancer même sous le poids de nos cicatrices passées, si profondes soient-elle. »
Mikaël est un très bon raconteur. Avec le diptyque Giant, il nous offre un travail bien documenté, exceptionnellement réussi. L’histoire humaniste est intelligemment construite. Elle séduit par ses thèmes universels et des propos justes et qui surtout sonnent authentiques. Le casting des personnages principaux ou secondaires est bien étudié. Chaque personnage possède sa propre identité et son vécu. Le quotidien des bâtisseurs nous est raconté en images couleurs d’un passé "photographique". Planche par planche, nous découvrons l’amère réalité d’un pays où tout semble malgré tout possible.
Mikaël est aussi un excellent "illusionniste": le dessin qui est numérique a un rendu artisanal. L’auteur joue très bien sur le monochrome et le sépia "passé" rajoutant des tons vieux roses ou jaunes au cours de la narration. L’encrage est soigné aux effets contrastés. Mikaël utilise des fonds blancs, dessine des décors détaillés ou épurés. Ses cadrages sont également variés. Le graphisme est expressif et en partie caricatural pour les personnages. Du très beau travail !
Michel
Voir la chronique du tome 1
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SPIROU ET FANTASIO
- Par asbl-creabulles
- Le 26/01/2018
One Shot: Le triomphe de Zorglub
Scénario: Olivier Bocquet
Dessin: Brice cossu et Alexis Sentenac
Couleurs: Johann Corgié
Editeur:
Collection: Tous Publics
Dépot légal: 26 janvier 2018
Nombre de pages: 60Certain d’être choisi lors du casting prévu pour le film Spirou et Fantasio dont le tournage va bientôt commencer, Fantasio n’imagine pas un seul instant que le seul rôle qu'on va lui proposer est celui de Champignac. Fantasio, qui a mal digéré cet affront, pique une crise de colère et se fait aussitôt éjecter du casting. Il s’empresse d’aller raconter sa mésaventure à Spirou qui lui propose tout de suite une solution: se présenter en tant que journalistes du "Moustique" pour réaliser un reportage sur le making of du tournage du film. Rendez-vous pris, lorsqu’ils arrivent sur place, ils tombent nez à nez avec l'acteur engagé pour jouer Zorglub qui ressemble comme deux gouttes d'eau au personnage et qui est en réalité le producteur du film. Ils doivent absolument mettre la main sur le scénario pour voir de quoi il retourne réellement. D'autant que le film va s'appeler "Le triomphe de Zorglub", un comble! Seccotine est prête à venir leur prêter main forte.
Mon avis: N’ayant pas encore vu le film (au cinéma le 21 février 2018), il est difficile de porter un jugement sur la bande dessinée (qui en est une adaptation libre) par rapport à ce dernier. Et c'est tant mieux, car ainsi j’ai une bonne impression de l'album puisque "ceci n'est pas tout à fait la BD du film". En fait, c'est l'enquête autour du film qui constitue le fond du sujet. Olivier Bocquet a dû s'amuser en bâtissant le scénario et en mettant chaque personnage face à soi-même. Seul Spirou bénéficie d’un acteur qui en est le sosie parfait. D’ailleurs, même Spip se trompe lorsqu’il se jette dans les bras de l'acteur au lieu de Spirou. Seccotine et Fantasio en revanche ne comprennent pas bien pourquoi les acteurs choisis ne leur ressemblent pas vraiment et, du coup, adoptent un comportement des plus étranges qui ne leur ressemble pas trop non plus.
Un scénario plutôt cocasse, agrémenté de rebondissement inattendus, sur lequel le duo Alexis Sentenac et Brice Cossu s’en est donné à cœur joie, multipliant les scènes drôles, très dynamiques et efficaces. Plongées, contre-plongées, rien ne fait peur aux auteurs, le tout avec une aisance épatante mais toujours en gardant l'esprit de la série. On retrouve avec plaisir cette galerie de personnages très expressifs tour à tour loufoques, caractériels, candides et tendres ou terrorisés, Champignac, Spip, Zorglub mais aussi la turbotraction.
Les auteurs ont eu accès au scénario et photos du film et ont pu ainsi encore mieux jouer et s'amuser du travail effectué lors du tournage. En s’attaquant à ces symboles de la BD, ils ont certes pris un risque mais ont relevé le défi haut la main!
Les couleurs très agréables de Johann Corgié rendent la lecture encore plus plaisante.SDJ
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Expo Frank Pé
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AQUAMAN Rebirth
- Par asbl-creabulles
- Le 25/01/2018
Tome 1: Inondation
Scénario: Dan Abnett
Dessin: Philippe Briones, Scot Eaton, Oscar Jimenez, Brad Walker
Couleurs: Gabe Eltaeb
Editeur:
Dépot légal: Janvier 2018
Nombre de pages: 160Arthur Curry, roi de l'Atlantide surnommé Aquaman, a décidé d'ouvrir une ambassade atlante sur la terre ferme, plus précisément sur les côtes du Massachussetts. Cette ambassade, de son vrai nom "Station Embruns" (Spindrift Station), a pour mission d’améliorer les relations entre la surface et le royaume de la mer en rapprochant les deux peuples, les Atlantes et les habitants de la terre ferme. Mais à peine a-t-elle été inaugurée qu’Aquaman doit faire face à Déluge et ses troupes, une cellule terroriste atlante férocement xénophobe, qui a décidé de brûler les habitants de la côte. Un autre ennemi, Black Manta, fait également sa réapparition déguisé en journaliste du Daily Planet, bien décidé à se débarrasser d'Arthur Curry pour venger son père. Il réussira à faire exploser une bombe qui en ouvrant une brèche dans le compartiment aquatique va inonder le bâtiment, anéantissant l’espoir qu'avait le monarque de rassembler les peuples. Alors que Black Manta est secrètement approché par une mystérieuse organisation appelée N.E.M.O., Aquaman est arrêté pour crime contre les Etats-Unis alors qu’il se rendait à la Maison Blanche pour parler au Président. En effet, Atlantide aurait revendiqué la récente attaque contre un navire de l’US Navy, l'USS Pontchartrain.
Mon avis: Nouveau départ pour Aquaman, présent depuis 1941 et membre de la JLA à partir de 1960. Perçu par la plupart des lecteurs comme un personnage plutôt secondaire, il est pourtant l’un des plus intéressants. En sa qualité de Roi de l'Atlantide, il se doit d'inspirer le respect, d’être prudent et réfléchi avant toute action et doit assumer la méfiance du peuple de la terre ferme. Le voici donc reparti pour de nouvelles aventures qui commencent sur les chapeaux de roue. Pleine de bonnes intentions, son incursion à la surface pour lancer son ambassade, va s’avérer désastreuse. Et le pire c'est que ses plus gros ennuis viendront de ses propres rangs – du peuple atlante – et qu’ils lui vaudront une incarcération en bonne et due forme. Dan Abnett est seul à bord pour ces premiers épisodes dans lesquels le calme souverain d'Aquaman est mis à dure épreuve jusqu'à la confrontation avec un autre justicier de taille!
On appréciera les dessins tout à fait convaincants et adaptés aux deux ambiances du récit réalisés par Scot Eaton, Oscar Jimenez, Brad Walker et notre dessinateur français préféré et ami, Philippe Briones, qui a fait un travail hors pair et que l’on a toujours grand plaisir à retrouver. Son trait est net et son dessin toujours aussi riche en action, en décors, avec un découpage à couper le souffle. On ressent une certaine frustration en constatant que l'affrontement final a été confié à Brad Walker. Certes, le résultat est très bon, mais pourquoi ne pas laisser un si bon dessinateur français, qui encre lui-même ses planches et réalise trois épisodes de suite, terminer l’album alors que Brad Walker ne s’est chargé "que" de l'épisode #1 de la nouvelle série ?
Soyons honnête, l’ensemble est superbe, les pages magnifiques avec de multiples scènes d’action sur terre et des scènes aquatiques très réussies, dessin comme couleurs. Un album DC Rebirth qui relance de belle manière le souverain des mers.
SDJ
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THE DREAM
- Par asbl-creabulles
- Le 24/01/2018
Tome 1: Jude
Scénario: Jean Dufaux
Dessin: Guillem March
Couleur Guillem March
Editeur:
Collection: Dupuis Grand Public
Dépot légal: 12 janvier 2018
Nombre de pages: 56Megan travaille pour la société "Invisible Art Production". Elle recherche des talents pour un nouveau film en préparation. Elle cherche surtout un comédien pour un second rôle ayant une certaine prestance. Elle pense l'avoir trouvé en la personne de Jude qui pour le moment travaille dans le porno mais en live dans un club à Broadway devant un public de gens huppés et nantis. Si Megan est personnellement déjà convaincue, Jude devra encore passer des tests devant des personnes aussi passionnantes que dangereuses pour obtenir le rôle. Mais c’était sans compter avec la fille du caïd de la mafia chinoise qui a jeté son dévolu sur Jude et cet obstacle va se révéler de taille. Sina Songh n’hésitera pas à casser le contrat de Jude avec le cabaret où il se produit et à se débarrasser de sa copine et collègue de scène. Désormais Juge lui appartient et elle ne compte pas le laisser partir aussi facilement que Megan et la société souhaitant l'engager l’avaient prévu.
Mon avis: Lors de la première prise en main, on pourrait croire qu’il s’agit d’un album érotique où le sexe règne en maître, surtout lorsque Jude en est l'instrument. Eh bien non, détrompez-vous, ce n'est pas seulement le pouvoir du sexe sur les hommes et les femmes mais bien tout ce qui l'entoure, à commencer par le voyeurisme ou les fantasmes, mais aussi les frustrations, les jeux de pouvoir, les interdits et surtout les coulisses du show business ou les échelons à gravir pour réussir dans ce milieu. C’est de tout cela dont il est question dans ce premier tome d’une série étonnante de par le thème qu’a choisi Jean Dufaux pour son scénario.
Au dessin, on retrouve avec plaisir l’artiste espagnol Guillem March pour lequel Neal Adams, Jean-Pierre Gibrat et Milo Manara sont des sources d’inspiration. Il est clair qu’il maîtrise parfaitement l'anatomie humaine, en particulier celle de la femme comme le confirment les différentes postures qu’il réalise ici avec brio. L'encrage est soigné, le plus souvent très léger, pour laisser s'exprimer la couleur. L’ensemble donne un résultat qui peut surprendre au premier regard mais qui gagne à être apprécié à sa juste valeur. Scènes en extérieur, plongées et contre-plongées, plans rapprochés, gros plans, Guillem March sait y faire et ravira les curieux qui se laisseront porter par son dessin et ses couleurs. Un travail de toute beauté, bien mis en valeur en particulier sur les scènes en extérieur où rayonnent les couleurs. Un travail consciencieux très impressionnant qui sera tout à fait agréable aux regards attentifs.Un premier album réussi pour un nouveau tandem des plus efficaces. Après Djinn en collaboration avec Ana Mirallès, Jean Dufaux nous revient avec une nouvelle série "sensuelle" également illustrée par un auteur espagnol des plus prometteurs qui nous vient tout droit du comics (DC comics) avec Batman et une Catwoman très sexy qui en a surpris plus d’un, mais qui s’est également essayé à la BD franco-belge, d’abord chez Paquet (Souvenirs, Jours gris) puis chez Dupuis où il a publié en 2015 la série Monika, sur un scénario de Thilde Barboni, dans un genre qui lui va comme un gant.
Une nouvelle série à découvrir, sexy et sensuelle mais accessible (d’ailleurs n’est-elle pas publiée dans une collection intitulée "Grand Public" chez Dupuis) sur le thème du suspense érotico-fantastique qui devrait plaire aux amateurs du genre.SDJ
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40 ÉLÉPHANTS
- Par asbl-creabulles
- Le 24/01/2018
Tome 1 . Florrie, doigts de fée
Scénario : Kid Toussaint
Dessin : Virginie Augustin
Couleurs : Hubert
Dépot légal : Novembre 2017
Editeur : Bamboo Édition
Collection : Grand Angle
Nombre de planches :52À Londres dans les années 20, une organisation à caractère mafieux appelée "40 éléphants" fait parler d’elle quasi quotidiennement. Il s’agit d’une association de filles et de femmes ayant toutes une spécialité considérée à juste titre comme "hors la loi", voleuses, receleuses, kidnappeuses voire meurtrières. Toutes sont connues pour leurs méfaits sur des particuliers mais aussi dans les grands magasins. Ensemble, elles doivent non seulement faire preuve d’imagination pour échapper à une police de plus en plus expérimentée, mais également tenir tête aux "40 voleurs", des hommes cette fois, qui veulent reprendre leur territoire et même empiéter sur celui de leurs concurrentes principalement autour de la station de métro "Elephant & Castle". L'arrivée de Florrie, une pickpocket de haut vol va changer la donne. En effet, des dissensions vont rapidement survenir au sein même du gang menaçant de l’affaiblir et de le mener à sa perte. Mais d'où vient Florrie, que cache-t-elle pour avoir aussi vite accepté les règles alors qu'elle pouvait très bien s'en sortir seule?
Mon avis: Florrie "doigts de fée" est l'héroïne de cet album et c’est heureux car son personnage est des plus charismatiques et, de toute manière, un seul tome n’aurait pas suffi si les 40 l’avaient été. Malgré tout, on aurait déjà aimé en savoir davantage sur quelques-unes de ces femmes, Passe-Muraille, Queen Kate ou Dorothy. Attendons les prochains tomes pour le découvrir. L’histoire est originale et convaincante, a priori plutôt simple, mais se développe de manière plus complexe qu’il n’y paraît à mesure que l’on tourne les pages. Kid Toussaint est à la manœuvre pour nous proposer cette intrigue plutôt bien menée.
Les dessins de Virginie Augustin sont agréables et offrent une belle reconstitution historique. Ils ont quelque peu évolué vers un trait plus marqué, peut-être pour mieux s'adapter aux décors de Londres et à une atmosphère et un état d’esprit de période de guerre. Virginie Augustin maîtrise toujours avec finesse ses personnages, captivants, attachants et bien reconnaissables. Les costumes et décors urbains du Londres de l’époque sont tout aussi bien rendus. Derrière une couverture originale et accrocheuse, de belles couleurs d'Hubert, on prend plaisir à lire cet album qui n’est que le début d’une aventure qui s’annonce prometteuse.
SDJuan
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LA BOÎTE À MUSIQUE
- Par asbl-creabulles
- Le 23/01/2018
Tome 1 "Bienvenue à Pandorient"
Scénario: Carbone (Carboneill Bénédicte)
Dessin: Gijé (Gillet Jérôme)
Couleurs: Gijé
Dépôt légal: Janvier 2018 – Sortie 26/1/2018
Parution en cours dans Spirou (numéro 4158 / 2017 …
Editeur: - Collection: "Tous Publics"
Planches: 54Partez à la découverte de "La boîte à musique", le nouvel univers fantastique de Carbone et Gijé qui vous entraîne, avec Nola, dans le monde incroyable de Pandorient...
Maman n’est plus là pour fêter les 8 ans de Nola. Il faut continuer à vivre et "à la une, à la deux" Nola souffle ses bougies. De son père Martin, elle reçoit une belle boîte à musique. Un bien précieux cadeau pour Nola car il s’agit de celle de Maman! La musique est très belle et Lola l’écouterait pendant des heures. Mais qu’est-ce que ce truc qui bouge dans la boîte: quelqu'un lui fait signe et lui demande de l'aide. Non, Nola ne rêve pas. Elle suit les instructions précises d’Andréa, la fille de la boîte à musique. Nola rapetisse et entre dans la boîte en passant par la clef. Bienvenue à Pendorient un monde magique, poétique, mais aussi dangereux...
Bienvenue à Pandorient
Mon avis: J’ai directement été séduit par l’ambiance, la couleur du récit. Le lecteur s’engage dans l’univers de l’histoire de la même manière que Nola entre dans le monde de la boîte à musique. L’écriture du récit est fluide. On songe au monde de Lewis Caroll car comme Alice s’engageant dans le terrier du Lapin sans réfléchir un seul instant, Nola pénètre dans Pandorient tout en subissant la même métamorphose physique. Nola va rencontrer une "galerie" de personnages et de créatures incroyables, certains retors, et se trouver confrontée à l’aventure, à l’absurde et au bizarre. Si le voyage que nous offre les auteurs de cette BD est merveilleux, ils n’en abordent pas moins de manière adaptée et spontanée des thèmes plus graves et moins poétiques. En effet, si Nola fête aujourd’hui ses huit ans, elle est aussi confrontée au deuil de sa maman et à un fabricant de sable de rêves.
Il était une fois …
La fameuse illustration à l’encre par laquelle tout a commencé est maintenant la case 3 de la planche 1. Gijé avait proposé cette image sur les réseaux via InKtober (défi sur internet) sur laquelle Carbone a flashé, ce qui lui a inspiré une histoire de boîte à musique. La scénariste a donc contacté le dessinateur et …
De nouveaux auteurs Dupuis …
Bénédicte Carboneill est scénariste et enseignante en école maternelle à mi-temps et c’est pour ses élèves et enfants qu’elle a commencé à écrire des histoires. Editrice, directrice de collection mais avant tout auteure, c’est fin 2015 qu’elle prend le pseudo Carbone et s’essaie au support de la BD avec un premier projet, Le Pass’Temps.
Jérôme Gillet, alias Gijé, est avant tout un illustrateur. Il fait de l’animation 2D, du story-board, du character design …
La BD ne lui faisait pas envie mais heureusement, Carbone l’a convaincu. Ses personnages sont souvent inspirés du studio Ghibli et du riche folklore japonais. Il aime le style manga qui permet de donner de l’expressivité aux personnages.
Carbone et Gijé seront présents au Festival d’Angoulême 2018 en janvier et à la foire du livre de Bruxelles en février.Les 3 étapes du dessinateur Gijé pour une illustration digitale réussie :
- « D'abord une étape en storyboard noir et blanc avec des valeurs de gris pour déjà à peu près voir où placer mes lumières et ombres.
- Ensuite je mets tout en couleur directement et sans préparer un clean au trait. J'essaye à cette étape de mettre un peu de matière avec mes brush et placer différentes valeurs de couleur (j’essaye plus de "peindre" en mélangeant certaines couleurs entre elles et de jouer un peu avec l'aléatoire.
- Et pour finir, je place mes ombres, lumières, ambiance générale de couleur, atmosphère, fx, ... »Michel
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CINQ BRANCHES DE COTON NOIR
- Par asbl-creabulles
- Le 22/01/2018
One shot
Scénario: Yves Sente
Dessin: Steve Cuzor
Couleur: Meephe Versaevel
Editeur:
Collection: Air Libre
Dépot légal: Janvier 2018
Nombre de pages: 176Douvres, 1944. Avec son unité constituée à 95% de "blacks", le soldat Lincoln se retrouve sur une base militaire fantôme équipée de fausses infrastructures et autres leurres destinés à tromper l’ennemi. Là, ils doivent suivre les ordres de supérieurs blancs qui n’ont aucune intention de les envoyer au front alors que c'est exactement ce que Lincoln et ses frères d'armes désirent ardemment. Les jours passent et se ressemblent, parsemés de bagarres et de paroles ou de gestes discriminatoires, jusqu’au jour où Lincoln reçoit une lettre de sa sœur Johanna qui lui apprend qu’elle a trouvé chez leur tante qui vient de décéder les mémoires manuscrits d'une femme nommée Angela Brown. Celle-ci travaillait comme domestique chez Mrs Betsy, celle-là même qui confectionna en 1776 à Philadelphie le premier drapeau des indépendantistes américains. Mais l'histoire n'a jamais fait allusion à l’étoile noire qu'Angela Brown avait discrètement cousue parmi les 13 autres pour rendre hommage à sa manière aux membres de sa famille tués par un certain Mr Pherson. Cette révélation résonne comme le symbole dont rêve tout afro-américain, un hommage à l'origine de la création du premier drapeau des Etats-Unis d'Amérique. Malheureusement, ce premier drapeau est tombé entre les mains des nazis. Ce tragique événement va se révéler une aubaine car Bolton, Connor et Johnson, tous trois afro-américains, vont finalement faire partie d’une opération visant à retrouver ce drapeau qui pourrait non seulement conduire à modifier tous les livres d'histoire américains mais témoigner devant le monde entier de la gratitude des États-Unis à l’endroit des Noirs américains et reconnaître enfin leur valeur.
Mon avis: Ainsi formulé, le titre "Cinq branches de coton noir" constitue déjà en soi une formulation qui marque et retient notre attention tout autant que ce soldat de profil en illustration de couverture. Le contenu est encore plus marquant car la narration d'Yves Sente nous maintient en haleine de bout en bout. Loin de nous embrouiller l'esprit, les nombreux flashes-back nous apportent à chaque fois un peu plus d'explications sur les différentes époques marquées chacune par le combat qu’ont mené les Afro-américains pour obtenir une place au sein d’une Amérique qui n'a pas toujours été des plus tendres avec eux, tout au contraire.
Avec ce message antiraciste, même si la ségrégation demeure bien présente dans l’album – comme d’ailleurs dans l’Amérique actuelle – Yves Sente, sans nous donner de leçon et sans vouloir nous influencer, nous fait vivre ce récit comme un fragment d’histoire. Tout est si marquant et crédible qu’on en vient à se demander pourquoi on n’en a jamais entendu parler. Le récit est d'une grande intensité, rarement atteinte en BD, truffé de rebondissements, le rythme soutenu du début à la fin.
Mais si le scénario est tout à fait maîtrisé, le dessin de Steve Cuzor contribue largement à la réussite de cet album de 176 pages. Et ce n'est pas une question de poids, car chaque page, chaque case va à l'essentiel. L’ensemble est d’une lisibilité spectaculaire, avec des scènes presque cinématographiques. L'efficacité et la qualité priment sur la quantité. Yves Sente a travaillé sur le scénario depuis 2011 et Steve Cuzor a consacré quatre années à parfaire les illustrations. On comprend donc mieux le résultat qui nous est proposé. Les dessins sont remarquables, leur rendu d'une grande force, leur graphisme des plus efficaces pour chaque époque, plusieurs cases étant pleines de grâce ou symboliques. Le recours à des portraits pleine page pour séparer les chapitres constitue également un plus attrayant sur le plan visuel. Le choix de couleurs en bichromie se révèle très agréable et efficace notamment pour cerner les différentes époques représentées. A noter qu’il existe également une version N&B de toute beauté.
Un album marquant par sa qualité et sa puissance à ne rater sous aucun prétexte! Initialement prévu chez un autre éditeur, cet album a finalement été publié chez Dupuis dans la prestigieuse collection Aire Libre depuis longtemps reconnue comme un gage de qualité.
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DARK BLOOD 1
- Par asbl-creabulles
- Le 20/01/2018
Tome 1: Icare
Scénario : Amélie Sarn
Dessin : Marc Moreno
Couleurs : Marc Moreno
Dépot légal : Janvier 2018
Editeur :
Collection : Machination
Nombre de planches : 54Depuis la nuit des temps, une créature considérée comme plus animale qu'humaine par certains et inversement par d’autres a traversé les siècles. Pas vraiment comme on a l’habitude, c’est-à-dire de génération en génération, de père en fils ou de mère en fille car on parle ici de créatures devenues immortelles et capables de traverser les époques en conservant la même apparence physique. L’homme dont on parle ne se souvient plus de rien hormis de son nom, Icare. À chaque fois qu’il se nourrit de sang, il perd la mémoire. Seuls subsistent quelques flashs, souvent sanguinolents, d’événements passés qu'il s’efforce de décrypter, de comprendre. Il sait qu’il est violent, sanguinaire et terrifiant car il doit tuer pour (sur)vivre. Il sait aussi qu'il est pourchassé, sans trop savoir pourquoi, ni par qui. Mais sa vie, il le sait, est en danger. En effet, non seulement Lucia Néra et ses hommes, tous vampires, sont à ses trousses mais également des humains au sein d’une cellule spéciale de la Royal Academy of History de sa gracieuse Majesté, dirigée par le lieutenant Yumiko Moki, ayant carte blanche pour retrouver ce tueur dans les rues du Paris de 2010. Icare doit absolument retrouver sa vie en récupérant sa mémoire coûte que coûte.
Mon avis: Marc Moreno nous plonge dans l'univers inquiétant et sanguinaire des vampires avec tous les codes du mythe, domination/soumission, castes, etc. Rien à voir avec les séries "romantiques" modernes mettant en scène de jeunes séducteurs buveurs de sang dont font justement mention les personnages dans le récit. Au scénario, Amélie Sarn nous propose un récit qui remonte le temps par flashes-back successifs jusqu'aux jeux du cirque, en passant par la période napoléonienne ou celle de la seconde guerre mondiale, pour finir de nos jours dans les rues de Paris. L’ensemble se révèle efficace, les éléments sont en place et les personnages ont chacun un rôle déterminant à jouer. Il ne reste plus qu'à savoir qui va s'en sortir sans trop y laisser de plumes ou plutôt de sang dans le cas présent.
Les illustrations de Marc Moreno, qu'on a pu apprécier dans la série "Le Régulateur", sont toujours aussi reconnaissables même s'il a un peu délaissé le style steampunk (un courant qui se situe entre fantasy et science-fiction) pour un récit plus contemporain qui lui convient parfaitement. Les monstres sont effrayants, les filles habillées dans un style qu'il apprécie et dessine depuis longtemps, les voitures, les décors, ruelles ou gratte-ciels représentés d’une manière efficace. Marc Moreno confirme une nouvelle fois son talent.
Également coloriste, il a donc la pleine maîtrise de son travail et nous propose des couleurs plutôt franches et vives dans ce style qui lui est bien particulier mais qui s’accordent parfaitement avec le thème du récit. La prise en main de l’album pourra peut-être nécessiter quelques instants pour s’habituer (ou se réhabituer comme cela a été le cas pour moi) à son style qu’on prend vite plaisir à (re)découvrir au fil des cases et des pages.
Un album original qui combine habilement l’histoire, le fantastique, le vampirisme et même le franchement gore. En tout cas, lorsqu’on aime, comme moi, on y prend vite goût.
SDJ