Créabulles, Expositions, Dédicaces, Rencontres.

Chroniques

Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture. 

  • COMMENT DEVIENT-ON RACISTE ?

    Comment devient on racisteScénario : Carole REYNAUD-PALIGOT, Évelyne HEYER
    Dessin : Ismaël MÉZIANE
    Couleurs : Ismaël MÉZIANE
    Dépot légal : mai 2021
    Editeur : casterman
    ISBN : 978-2-203-21190-2
    Nombre de pages : 72

    Comment devient-on raciste ? Vaste sujet qu’Ismaël Méziane qui a vécu le racisme dans sa vie quotidienne à de multiples reprises tente de traiter à son modeste niveau avec l'aide au scénario d'Évelyne Heyer, anthropologue généticienne, et Carole Reynaud-Paligot, historienne.

    En 2017 à Paris, il visite au Musée de l’Homme l’exposition "Nous et les autres - Des préjugés au racisme" dont elles sont les deux commissaires. Cette exposition agit comme une prise de conscience sur lui. Elle est organisée en trois parties :  La première invite le visiteur à comprendre comment s’élaborent identité et altérité et à prendre la mesure des processus de catégorisation, de hiérarchisation et d’essentialisation à l’œuvre dans la fabrique du racisme "ordinaire". La deuxième partie explore la construction scientifique de la notion de "race" et illustre, à partir d’exemples historiques, la mise en œuvre de racismes institutionnalisés par des États. Le visiteur remonte en quelque sorte le temps. Enfin, la dernière partie aborde le problème du racisme. Aujourd’hui, en s’appuyant sur les données des sciences. Du vivant, des sciences sociales et en donnant la parole à des spécialistes.Comment devient on raciste page 3On le voit, cette question est un immense défi. Avec cet album BD, il ne s’agit donc pas de procéder à une analyse approfondie de la question mais plutôt de réfléchir ensemble et de tenter de décrypter les mécanismes menant vers le racisme. Le récit retrace d’abord les étapes de la conception de la BD. Plusieurs personnes ont mis Ismaël Méziane en garde contre son projet, lui expliquant que cela n’intéresserait pas grand monde et qu'il perdrait son temps en voulant l’aborder sous forme de BD. Ismaël tient bon. C’est un sujet très important pour lui, il veut comprendre et a besoin d’éclaircissements sur ce phénomène. Mais, au fil de sa réflexion, il se confirme qu’il n’est pas facile d’expliquer cette mécanique de la haine.

    Une chose est sûre, on ne naît pas raciste mais on le devient. L’album évoque la peur de l'autre, les préjugés, évidemment, mais aussi la discrimination et le racisme institutionalisé, comme la ségrégation, etc...Comment devient on raciste pageIsmaël Méziane est le personnage principal qui s'interroge et se pose tout un tas de questions sur ce qui peut pousser les gens à devenir raciste. Il essaye de comprendre l'évolution par lui-même comme tout un chacun mais aussi auprès des deux spécialistes qui vont tenter de lui donner des réponses sur les raisons du racisme en l’expliquant à travers des schémas, des exemples de situations, etc. Les explications se veulent simples et claires. Parallèlement à ces échanges "autorisés", nous partageons des moments plus intimes de la vie d’Ismaël lorsqu’il évoque par exemple auprès d’un psychologue son ressenti d’être exclus, avec toutes les conséquences que cela peut avoir, mais aussi son vécu personnel face aux attentats.

    Ismaël Méziane nous propose une illustration claire, aux couleurs légères, au service de la narration incluant même quelques schémas pour souligner le caractère documentaire et didactique de l’album.

    Une BD très intéressante qui mériterait sa place sur les bancs des écoles, en tout cas à mettre entre toutes les mains ne serait-ce que pour contribuer à faire prendre conscience individuellement et collectivement des ravages du racisme, en commençant par le racisme biologique pourtant discrédité depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale mais toujours persistant (certains préjugés ont la vie dure) et les nouvelles formes d’expression de la haine, comme la digitalisation de l’expression raciste.

    SDJuan

  • SIGRID T1

    Sigrid 1Tome 1 : Sur cette terre inconnue
    Scénario : David CHAUVEL
    Dessin : Patrick PION
    Couleurs : Lou
    Couverture : Ronan TOULHOAT
    Dépot légal : mai 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Conquistador
    Grand format
    ISBN : 978-2-7560-8286-8
    Nombre de pages : 64

    À l'aube du second millénaire, la jeune Sigrid va enfin pouvoir explorer le monde et même précéder son père qui doit la rejoindre plus tard. Elle embarque sur le drakkar de son oncle Harvard et quitte le Groenland à destination des territoires du Markland (province canadienne actuelle de Terre-Neuve-et-Labrador) que les Vikings viennent tout juste de coloniser. À bord, une certaine tension se fait jour parmi les membres de l’équipage au sujet de la récente conversion d’Harvard au christianisme, cette nouvelle religion affirmant l’existence d’un Dieu unique en trois personnes, le Père, le Fils, le Saint-Esprit, en totale contradiction avec les si nombreux dieux que vénèrent encore la majorité des vikings. Mais le pire est à venir quand après quelques jours de navigation, l’un après l’autre les membres de l'équipage tombent malades, victimes d’atroces douleurs abdominales. Les valides sont de moins en moins nombreux pour manœuvrer le navire. Les victimes se multipliant, les cadavres sont jetés par-dessus bord dans l’espoir de ralentir la propagation de cette étrange maladie. Mais le mal est fait, c'est trop tard. Juste avant de rendre son dernier soupir, Harvard confie à Sigrid qu'il y a un trésor à bord. Elle doit absolument le cacher et le défendre à tout prix. Faute de marins pour contrôler les mouvements du drakkar, la tempête qui s’est levée l’entraîne vers la côte où il finit par s’échouer. C’est un indien de la tribu Béothuk qui va le découvrir ainsi que Sigrid, la seule survivante. Mais est-elle véritablement la seule à avoir survécu et que s’est-il réellement passé à bord ? Sigrid page 3Mon avis : Près d’un demi-millénaire avant la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb, des vikings ont mis le pied sur Terre-Neuve, cette île située tout près des côtes de l’Amérique du Nord (actuel Labrador canadien).
    David Chauvel
    nous propose une histoire construite sur une trame historique solide. C’est l’occasion de découvrir les premiers contacts entre Vikings et Béothuks incarnés par cette rencontre fortuite entre Sigrid, la belle viking qui sort pour la première fois de ses terres natales, et cet indien nommé Gotheyet grâce à qui elle a sans aucun doute échappé à la mort. Et s’ils ne se comprennent pas et ignorent encore comment ils vont pouvoir communiquer, leur première réaction sera ce geste de paix, de fraternité et d’hospitalité au lieu de s’entretuer comme c’est la règle face à l’inconnu.
    On assiste au choc de deux cultures complètement différentes, par exemple lorsque l’indien Gotheyet découvre le fer, une matière inconnue, à travers des objets qu’il récupère dans l’épave du drakkar.
    Une belle fiction sur base d’un contact qui a réellement eu lieu au premier millénaire même si le passage des Vikings n’a laissé que de rares traces sur place et si l’on s’interroge toujours sur la disparition mystérieuse des Béothuks... bref de quoi attiser notre curiosité pour la suite.Sigrid page 7Patrick Pion au dessin donne le ton, énergique. Très belles ambiances générales, notamment sous la tempête, paysages et décors naturels imposants, montagnes, falaises abruptes. Une violence bien présente dans des scènes de combat réalistes et spectaculaires, des personnages expressifs, typés, fiers.
    Un trait nerveux qui ajoute de la tension à l’ensemble bien mis en valeur par les couleurs ajustées de Lou (Simon Canthelou).

    SDJuan

  • L'HOMME QUI TUA NOBUNAGA

    L homme qui tua nobunaga 1L homme qui tua nobunaga 2Tomes 1, 2 et 3
    Scénario : Kenzaburo AKECHI
    Dessin : Yutaka TÔDÔ
    Couleurs : N&B
    Traduction : Jacques LALLOZ
    Dépot légal : T1 : 11/2020; T2 : 02/2020; T3 : 05/2021
    Editeur :Delcourt
    Collection : Logo delcourttonkamSeinen
    Format Manga
    ISBN : T1 978-2-413-02812-3; T2 978-2-413-02813-0; T3 978-2-413-02814-7
    Nombre de pages : +/- 200 pour chaque tome
    L homme qui tua nobunaga 3Oda Nobunaga a dû se battre durant sa vie et c'est peu de le dire. Dans sa jeunesse, il a été considéré comme indiscipliné, se comportant de manière parfois excentrique et fréquentant des personnes de rang inférieur, au point d’être appelé "le grand imbécile d'Owari" (nom de sa province d’origine). Son père sera même poussé à se donner la mort selon le rituel du "seppuku" pour être respecté au sein même de son propre clan. C'est à la force de ses convictions et de ses nouvelles alliances qu'Oda va ensuite réussir à se faire respecter et acquérir une grande notoriété en tant que seigneur de guerre et fin stratège lors de la conquête d’une grande partie du Japon. Son désir était d’instaurer un empire unifié soumis aux guerriers. Pour mettre en œuvre ses idées d'unification du Japon, il va s’entourer d’hommes de confiance. Il va ainsi convaincre Akeshi Mitsuhide, aussi fin stratège que lui, de l’accompagner dans son action visant à unifier le royaume pour y instaurer la paix et Toyotomi Hideyoshi, lui aussi stratège de génie n’ayant pas son égal pour manipuler les gens. Oda Nobunaga saura s'entourer des daimyos (gouverneurs militaires) de son clan mais aussi faire alliance avec ceux de clans d'autres provinces, grâce à son pouvoir de persuasion ou, à défaut, en utilisant la stratégie, la manipulation ou, le cas échéant, la force. C'est la bataille d’Okehazama en 1560, alors qu’il n’a que 26 ans et est encore peu connu, qui va étendre sa réputation dans le pays tout entier. En effet avec une armée d’à peine 3000 hommes, Oda Nobunaga lance l’assaut contre les 30 à 40000 hommes d'Imagawa Yoshimoto, arrivant à l'atteindre et à le tuer. C’est là véritablement qu’il révèle ses talents de stratège, sa bravoure, son audace et son esprit d’initiative. Ce fait d’arme hors du commun va lui permettre de rassembler de plus en plus de clans autour de lui et de progresser dans son projet d’unification mais d'autres chefs de guerre encore plus puissants viendront contrecarrer son objectif ultime de créer un pouvoir centralisé. C'est là qu’il faut chercher les origines du drame qui va se dérouler à Honnôji connu comme "incident du Honnôji" survenu en juin 1582, nom d’un temple de Kyoto où Oda Nobunaga a été assassiné par Mitsuhide Akechi après s’être retourné contre lui, parfois présenté comme un suicide forcé. L homme qui tua nobunaga plancheEn 2016, l’un des lointains descendants de celui accusé de félonie a contesté cette version de l’attitude de son aïeul et cherché à rétablir la vérité. À noter, dans le premier tome, l’évocation de Yasuke, ce premier samuraï noir du Japon dont l’histoire est le thème de la série "Kurusan, le samouraï noir" de Thierry Gloris et Emiliano Zarcone parue chez Delcourt (voir chronique ici).L homme qui tua nobunaga planche du tome 1
    Mon avis : Trois tomes déjà parus pour ce récit véritablement étonnant. 
    Le premier retrace l’histoire au complet, les tomes suivants développant chaque événement plus en détail.
    Il s’agit de l’adaptation en manga du livre intitulé "L’incident du Honnôji, la vérité dévoilée 431 ans après" dû à Kenzaburo Akechi.
    Un gros travail (dix années d’investigations et travaux de recherche historique) pour rétablir sinon la du moins une vérité visant à réhabiliter Mitsuhide Akechi.
    Un récit captivant de par son intérêt historique et documentaire, véritable immersion dans l’histoire du Japon, certes pas toujours facile à comprendre pour un public européen néophyte et compte tenu aussi du très grand nombre de personnages cités, mais bien expliquée et que l’on lit sans trop d’effort grâce à une narration maîtrisée. L homme qui tua nobunaga 2 plancheLes dessins de Yutaka Tôdô sont bons mais parfois inégaux, tantôt de véritables petites merveilles détaillées, soignées, notamment sur les scènes de combat et de guerre, les tenues des combattants, les costumes, les décors ainsi que les émotions, tantôt sans prévenir on tombe sur quelques cases trop caricaturales.
    Une très belle épopée à découvrir au fil de la parution des prochains tomes vu la richesse du sujet.

    SDJuan

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  • MAUVE BERGAMOTE

    Mauve bergamoteTome 1 : Bienvenue à l'herboristeri
    Scénario : GRIMALDI
    Dessin : CÉCILE
    Couleurs : Hugo POUPELIN
    Dépot légal : avril 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Delcourt Jeunesse
    ISBN : 978-2-413-03816-0
    Planches : 72

    Mauve est une jeune fille passionnée par les plantes dont les parents explorent le monde à la recherche de nouvelles espèces. Depuis leur départ, elle cohabite avec Crookneck, un homme à tête de citrouille qui veille sur elle. Ensemble, ils s’occupent de la boutique/herboristerie et de leur plantation. Mauve est heureuse comme ça mais ce qu’elle aime par-dessus tout c’est lorsqu’ils partent ensemble, parfois plusieurs jours, à la recherche de plantes sauvages. Elle adore ces cueillettes en pleine nature même si ses amies les loutres s’amusent à lui jouer de bons tours quitte à lui faire perdre sa récolte. Tout allait bien jusqu’au jour où en rentrant elle tombe sur trois jeunes filles apparemment sans gêne qui ont mis une partie du jardin sens dessus dessous. Elles ont osé cueillir des roses et piétiné des plantations d’herbes aromatiques. S’ensuit une altercation avec Mauve rapidement stoppée par l’arrivée soudaine de Crookneck qui les fait fuir au triple galop. Le lendemain, l’une d’elle, Anaïs, revient pour s’excuser.Mauve bergamote plancheMon avis: Ciblée "jeunesse", cette aventure due à Flora Grimaldi se révèle très sympathique avec ses personnages fortement typés, la jeune et fougueuse Mauve à la chevelure de même couleur, son étrange compagnon, des animaux portant des vêtements et dotés de la parole, des elfes, des fées du givre… tout un monde féérique mêlant réel et chimère pour passer un agréable moment de lecture.
    Mais l’album est également le moyen de faire passer une belle leçon de vie et d’amitié, de fraternité et d’entraide, et n’oublions pas non plus son caractère didactique puisqu’au fil des pages et des dialogues on en apprend beaucoup sur l’herboristerie et les bienfaits de certaines plantes.
    Les dessins de Cécile Brosseau sont tout aussi plaisants.
    Des traits tout en rondeur et en douceur mais toujours soignés et détaillés qui nous font partager les sentiments de Mauve, de la joie à la mauvaise humeur, de la méfiance à l’amitié, tout en nous promenant dans une nature plutôt paisible.
    Des couleurs éclatantes et lumineuses, où le mauve ressort souvent, de la part d’Hugo Poupelin, le plus jeune de la bande, vivant à Bruxelles.
    Une histoire à suivre dans le tome 2.
     

    SDJuan

  • LE RETOUR DU MESSIE

    Retour du messieTome 1 : Verset 1
    Scénario : Mark RUSSELL
    Dessin : Richard PACE & Leonard KIRK
    Couleurs : Richard PACE & Andy TROY
    Couverture : Paul MOUNTS & Amanda CONNER
    Dépot légal : avril 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Contrebande
    Format comics
    ISBN : 978-2-413-02634-1
    Nombre de pages :150

    Depuis la création du monde et malgré tous ses efforts, Dieu a toujours été déçu par les hommes. Et maintenant, il l’est tout autant par son fils Jésus à qui il reproche d’avoir toujours foi dans les hommes alors que ceux-ci l’ont tué à l’âge de 33 ans… Depuis son retour au ciel, Dieu lui interdit de s’en préoccuper ou de chercher à reprendre contact. Un jour, Dieu découvre sur Terre un homme faisant preuve d’une force de caractère et d’une détermination impressionnantes mais également doté d’une force physique herculéenne, admiré et salué comme un véritable super-héros par les hommes qui l’appellent Sunstar. Dieu s’empresse de lui apparaître pour le convaincre de prendre Jésus sous son aile. Sitôt dit sitôt fait, Dieu renvoie Jésus en lui ordonnant de suivre les conseils de Sunstar pour bien montrer aux hommes ce que le fils de Dieu est capable de faire!Retour du messie plancheMon avis: Cette BD a bien failli ne jamais voir le jour. En cause, la polémique à propos de son contenu jugé blasphématoire, voire sacrilège par des groupes sans aucun doute ultra-conservateurs et suffisamment puissants pour pousser DC à ne pas la publier.
    L’auteur ne s’est pas avoué vaincu et a réussi à l’éditer chez Ahoy Comics (maison d’édition créée en 2018 et dont on a dit qu’elle visait à ne proposer que des séries limitées dans un format plus généreux).
    Delcourt publie à présent la VF des six premiers épisodes initialement parus en 2019 sous le titre Second Coming, dus à Mark Russel à l’écriture et Richard Pace et Leonard Kirk au dessin.
    C’eût été dommage de ne pas en disposer car ce récit original n’est en aucun cas un blasphème ou une critique du christianisme. D’ailleurs, ne dit-on pas que les super-héros sont en quelque sorte les nouveaux dieux d’aujourd’hui !
    Adoptant une approche différente de la religion et des super-héros, Mark Russell suscite notre intérêt tout au long du récit en se posant des questions (simples) sur la religion, sa perception, son interprétation par les humains, mais toujours d’une manière humoristique et bien documentée (on a même droit à un rappel historique sur la Judée d’il y a 2000 ans).
    On découvre comment Jésus, fils de Dieu, habite chez un super-héros qui le prend en mains pour un résultat au final guère plus convaincant. Que pourrait donner la venue du fils de Dieu ou comment serait-elle perçue de nos jours quand les "miracles" seraient pris pour des super-pouvoirs, ou inversement.
    Bref, une BD surprenante, le plus souvent drôle, intelligemment construite, donnant à réfléchir sur la religion et sur l’homme, avec leurs qualités, leurs défauts, leurs travers, leurs imperfections.Retour du messie planche super heros
    La partie dessin est assurée en alternance par Richard Pace et Leonard Kirk, chacun dans un domaine, religion pour le premier, super-héros pour le second.
    On retrouve le style comics traditionnel, efficace aussi bien dans les scènes à huis-clos que de combat titanesque.
    C’est très souvent drôle voire cartoonesque.

    Un agréable moment de lecture à compléter par celle des suppléments de fin d’album.

    SDJuan

  • ELEKTRA Renaît à la vie

    Elektra renait a la vieCoup de coeurScénario : Frank MILLER
    Dessin : Frank MILLER
    Couleurs : Lynn VARLEY
    Dépot légal : Mai 2021
    Editeur : Panini comics
    Format : Giant Size 25.5X35.5
    ISBN : 2809496250
    Nombre de pages : 96

    En proie aux tourments et souffrances, Matt Murdoch se rend à l’église pour se confesser. Chaque nuit il fait un cauchemar, toujours le même. Il revoit Elektra vivante. Elle est poursuivie et rattrapée par ses ennemis. Pourtant il sait que ce n’est pas possible. Il l’a vue mourir puisqu’au terme de son long combat contre Bullseye, elle a rendu son dernier souffle entre ses bras. Matt a déjà empêché les ninjas de la Main de la faire revenir à la vie pour leur servir à nouveau de tueuse à gages. Et pourtant son instinct lui crie qu’elle est vivante et qu’il se passe quelque chose. Il est convaincu que Bullseye est au cœur de ce mystère. Que l’on veut faire revenir à la vie un Bullseye plus fort, plus puissant que jamais pour tuer Elektra. Mais est-ce la réalité ou un cauchemar, ce même cauchemar qui n’en finit pas de le hanter ?Elektra renait a la vie plancheMon avis : C’est Frank Miller qui a créé le personnage d’Elektra Natchios, alias Elektra. Elle est apparue pour la première fois en janvier 1981 dans le numéro 168 de la série Daredevil où elle est devenue une criminelle après l’assassinat de son père sous ses yeux. Elle est tuée un an plus tard par Bullseye dans un épisode devenu culte où elle réussit à se traîner mourante jusque dans les bras de Matt Murdoch pour rendre son dernier souffle.
    Frank Miller ressuscitera son personnage plus tard avec Bill Sienkiewicz dans "Elektra Assassin". 
    Avec "Elektra renaît à la vie", Frank Miller nous propose un épisode hors continuité (publié en 1990 sous le titre original Elektra Lives Again, traduit par Elektra le Retour dans la version française parue en 1991 chez Comics USA) et ensuite Elektra renaît à la vie en 2017 pour les 20 ans de Panini France.Elektra renait a la vie planche ninjas
    Retour cruel pour le héros sans peur en proie à une véritable obsession pour l’amour de sa vie qu’il sent vivante. Matt Murdoch se parle à lui-même et est son propre spectateur, s’efforçant de comprendre ce qui lui arrive, de trouver des réponses et de ne pas perdre pied au point de devoir prendre des tranquillisants. Il sait déjà qu’un ultime combat va se jouer autour de Bullseye, Elektra et lui.
    Frank Miller nous propose ici une intrigue originale, très personnelle, qui sort vraiment des sentiers battus.
    Ses dessins, reconnaissables entre tous, alternant grandes et petites cases (en série), font mouche.
    Un découpage et des cadrages très efficaces, des scènes d’action avec des personnages en suspension, toutes sortes de symboles y compris religieux et de nombreux décors plutôt dépouillés et froids.
    Les couleurs de Lynn Varley soulignent bien l’atmosphère dramatique par l’utilisation de teintes pâles, à l’exception des personnages qui tranchent fortement sur ce fond volontairement plus terne et blafard.Elektra renait a la vie jacquette
    Une très belle réédition en super grand format avec jaquette illustrée formant un poster une fois dépliée

    SDJuan

  • PSYKOPARIS

    PsykoparisCoup de coeurIntégrale
    Scénario : Tristan ROULOT
    Dessin : Corentin MARTINAGE
    Couleurs : Jean-Noël LE MOAL & MiKi
    Dépot légal : Mai 2021
    Editeur : Soleil
    ISBN : 978-2-302-09157-3
    Nombre de pages : 120

    Paris. Une petite dame âgée que tout le monde appelle "Maman" prête de l'argent, mais tous savent qu'ils ont intérêt à respecter les délais de remboursement au risque de devoir subir de lourdes représailles. Ceux qui transgressent la règle savent qu’ils auront affaire au terrible "Prospecteur", un recouvreur de dettes plutôt louche qui n'hésitera pas à les découper ou les liquider. Et inutile de le supplier pour rester en vie car dès qu’il apparaît il est déjà trop tard. Maman tient un petit carnet bleu où elle consigne nom et dette de chacun. Tout y est bien noté. Ce jour-là, elle fait exceptionnellement preuve d’indulgence envers un mauvais payeur car elle a envie de prendre quelques jours de vacances. Ce même jour, Cid et Nathan, deux jeunes fêtards habitués à squatter des appartements inoccupés pour s’éclater avec leurs amis sont à la recherche d’un logement pour la soirée. Le hasard fait que leur chemin croise celui de cette vieille dame quittant son domicile avec des bagages. Ni une ni deux, ils s’introduisent dans son grand appartement pour y préparer leur fiesta. Pour récupérer du fric, ils décident de vendre quelques meubles. Malheureusement Chomsky, leur acheteur habituel, en a déjà trop en boutique et refuse de les prendre. Finalement, c’est Disco, l’épicier d’à côté qui va les sauver. Le hasard va de nouveau intervenir quand Cid qui cherche de quoi écrire plonge la main dans le vieux secrétaire déposé sur le trottoir et en ressort un carnet bleu. De son côté, Maman qui finalement s’ennuie beaucoup a pris la décision de rentrer chez elle...Psykoparis plancheMon avis : Les auteurs ayant souhaité répondre aux demandes répétées d’une communauté de fidèles, cet album sous-titré "Intégrale" reprend les pages du tome 1 (publié en mai 2011) auxquelles ils ont ajouté près de 60 nouvelles pages pour nous proposer une histoire complète (initialement prévue en trois tomes).
    On découvre donc 116 pages bourrée de testostérone, d'humour, de combats intenses et sanglants, de rebondissements, de surprises… 
    Le récit, très dépaysant, se situe dans un Paris imaginaire où règne le chaos, où des bandes et mafias sévissent, où seules les armes blanches (dagues, poignards, épées, sabres, etc.) sont utilisées, un Paris sans police et sans voitures aussi.
    Tristan Roulot nous propose ce scénario complètement déjanté dans une ville en proie à la rivalité des clans, où les gens s’entretuent pour un quignon de pain, où l'on croise aussi bien un ancien gladiateur, des jeunes maniant plutôt bien le sabre qui s’entraînent chez un épéiste chevronné, deux collectionneurs de sabres et d’épées prêts à tout pour s'emparer de pièces rares, un assassin, un ancien conseiller du maire de Paris devenu le "Basileus Darkos" dans la commune autonome de Montmartre… et cette vieille usurière semant la mort grâce à un Prospecteur increvable.
    Roulot propose un récit astucieux où il mélange anticipation, fantasy, fantastique avec une pointe de techno-thriller plus quelques références cinématographiques et littéraires.
    Un récit déjanté mais bien construit et maîtrisé pour une lecture agréable et fluide.Psykoparis planche autreLes dessins soutiennent parfaitement ce ton déjanté avec une construction bourrée d'énergie.
    Corentin Martinage travaille dans un style hybride entre franco-belge, comics et manga dont il épouse tous les codes mais seulement dans ce que chacun d’eux a de meilleur.
    Beau travail sur les décors, les cadrages et belle dynamique visuelle sur les nombreuses scènes de combat dans le plus pur style manga ou comics.
    Très agréable mise en couleurs réalisée par Jean-Noël Le Moal et Julie Poupart auxquels s’est joint MiKl (Le Maître chocolatier, Litteul Kévin, Hedge Fund, H.Ell, I.R.$., Odyxes, etc. ) pour les nouvelles pages.
    Un résultat globalement clair et dynamique.

    SDJuan
     

  • PULP

    PulpCoup de coeurScénario : Ed BRUBAKER
    Dessin : Sean PHILIPS
    Couleurs : Jacob PHILIPS
    Couverture : Sean PHILIPS
    Dépot légal : mai 2021
    Editeur : Delcourt
    Collection : Contrebande
    Format comics
    ISBN : 978-2-413-03951-8
    Nombre de pages : 70

    New York, fin des années 1930. Max Winters, la soixantaine, écrit des aventures western pour le pulp magazine "Six Gun Western". Dans sa dernière histoire, ses héros Red River Kid et Heck Randal, deux hors-la-loi que beaucoup perçoivent comme des justiciers en lutte contre des brigands de toutes sortes, envisagent à l’issue d’un dernier affrontement de prendre une retraite bien méritée pour éviter de tomber sous les balles de l’ennemi. Son héros Red sait bien que même s’il est fin tireur il pourrait un jour croiser une gâchette meilleure et plus rapide que lui. Sauf que l’idée ne plaît pas vraiment à son rédacteur en chef. Le magazine doit continuer de mettre en scène des cow-boys intrépides dans des aventures pleines de bagarres et de rebondissements et certainement pas des réflexions sur la retraite…. Il en profite pour annoncer à Max que le magazine devant faire face à une concurrence sévère la direction a décidé une réduction des tarifs. Il ne recevra donc que 120 dollars pour son dernier travail au lieu des 200 espérés. C’est rien de dire que Max est doublement déçu. En repartant, il est témoin dans le métro de l’agression d’un jeune juif, ce qui ne le surprend guère vu les nombreux sympathisants nazis présents à New York. Il prend sa défense mais se fait rouer de coups par ses agresseurs au point de faire un malaise cardiaque, occasion rêvée pour eux de lui dérober son argent. Or, Max avait besoin de cet argent pour assurer à sa compagne Rosa une vieillesse tranquille. Il va devoir recommencer à braquer des convoyeurs de fonds comme il le faisait à l'époque avec son frère et un ami. Il n’a rien oublié car, en réalité, c’est sa propre histoire d’il y a quarante ans qu’il raconte dans les aventures de ses jeunes cow-boys…Pulp page 11Mon avis : Ed Brubaker nous offre avec cet album un subtil mélange de western et de polar sur fond de nazisme bien présent à New York à l’époque. Un mélange audacieux mais efficace.
    Max est plutôt désabusé face aux difficultés et transformations de la société et regrette ses jeunes années de mauvais garçon – jamais il ne se serait fait aussi facilement rossé à l’époque. Il a vieilli, il a connu des années plutôt difficiles mais reste doté d’une force de caractère incroyable qui va lui être bien utile lorsqu’un "Pinkerton", l’un de ces détectives qu’il met en scène dans ses histoires, va le contacter pas vraiment pour ce qu’il pensait.
    Un récit rigoureusement écrit avec de nombreux moments forts et surprenants.Pulp page 13Côté dessin, Sean Phillips avec qui Ed Brubaker a très souvent travaillé restitue parfaitement les ambiances et l’aspect sombre du récit.
    Au style polar qu'on lui connaît bien et dans lequel il excelle, il ajoute ici des flashes-back western pour illustrer les travaux de Max illustrés avec un trait volontairement vintage et donc typique du genre. C’est très bien fait.
    On passe d’un genre à l’autre avec aisance pour une lecture très fluide.
    Il en va de même des couleurs réalisées par son fils Jacob Philips, "normales" pour le polar des années 30,  en bi ou trichromie pour le Far West avec même des défauts, tâches ou rayures comme sur les vieux films.
    Cet album du célèbre duo Brubaker-Phillips, au format comics trompeur puisqu’il contient en réalité 70 pages, est un pur régal.

    SDJuan