Interview de Juanjo GUARNIDO au CBBD
copyright :Dargaud & Rita Scaglia
Même si Juanjo Guarnido pense qu’il n’a pas assez travaillé ces vingt dernières années, l’exposition-rétrospective de sa carrière (plus de 150 planches et documents originaux) présentée au CBBD témoigne au contraire de la masse de travail qu’il a accomplie. Il est fier d’avoir pu bénéficier d’une grande liberté de création pour réaliser ses propres BD. C’est un véritable travail d’auteur qu’il assume entièrement. Les contraintes liées à la crise Covid-19 n’ayant pas permis le déroulement normal d’un vernissage et d’une inauguration d’exposition (voir notre article en cliquant ici) en présence de l’auteur, Juanjo GUARNIDO a répondu aux questions de plusieurs journalistes dont un représentant de Créabulles (Juan SD) lors d’une interview-fleuve en visioconférence qui s’est déroulée dans les locaux du Centre belge de la Bande dessinée (CBBD) à Bruxelles le 3 juin 2020.
Vous trouverez ci-dessous le verbatim de cette interview.
Journaliste 1 : Lorsqu’on visite l’expo, il y a une somme de travail énorme. Est-ce que ce travail de 20 ans avec Blacksad vous paraît aussi énorme qu’à nous, le dessin, la couleur, etc ?
Juanjo Guarnido : Oui, je m’en rends compte en regardant mon parcours. En voyant ces 20 années, j’ai l’impression, le sentiment que je n’ai pas assez travaillé. J’aurais dû faire plus. A certaines époques, j’aurais dû m’axer sur certaines choses ou alors j’étais peu productif pendant six mois ou un an. Lorsque je le regarde, cela ne représente rien, quelques kilos de livres mais si je fais le bilan, je me rends compte qu’il y a beaucoup de travail quand même. Une production qui, finalement, représente en tout 5, 9, 10 albums, des albums et des illustrations par-ci, par-là. Mais ce ne sont pas des albums qui peuvent être faits en trois semaines. Je me rends compte en les feuilletant de la densité graphique du travail, de la couleur… j’ai bien bossé quand même. Et pourtant j’ai le sentiment d’avoir perdu du temps.
Juan Sanz Diaz : Et en plus il y a eu la vidéo, le clip vidéo "Freak in the Week" que tu as produit, coréalisé et dont tu as supervisé l’animation des personnages au studio parisien Fortiche Prod. Studio en 2014 pour le groupe de metal "Freak Kitchen" que tu adores.J. Guarnido : Ah oui, c’est encore un travail qui m'a pris beaucoup plus de temps que je pensais et surtout demandé beaucoup plus d'efforts car j’ai dû m’occuper de tout. J’ai assuré la collecte de fonds, la gestion du projet, la réalisation des story-boards et supervisé 50% du travail, plus tout ce qui vient après comme la réalisation du clip pour moitié (l’autre ayant été assurée par une équipe de trois animateurs de chez Disney), mais aussi le suivi, la promo, la réalisation du livre du making-off. Le tout m’a occupé pendant dix mois et demandé beaucoup trop d'efforts car un dessin animé ce n'est pas comme une bande dessinée, c'est le travail d'une équipe alors que là je n'en n'avais pas. Mais je suis très content de l'avoir fait et j’en suis même fier car j’ai vraiment tout mis, tout donné pour ce projet.
JSD : Après avoir suivi des études aux Beaux-Arts de Grenade et obtenu ton diplôme, spécialité "peinture" (voir sa peinture de Pablicos ici à gauche), as-tu d’abord pensé lorsque tu as eu la possibilité de faire de la BD à dessiner du comics sachant que le comics est très présent en Espagne ou de la BD franco-belge parce que tu avais déjà eu l’occasion de lire des albums franco-belges ?
J. Guarnido : C'est une très bonne question. Pendant mes études de peinture aux Beaux-Arts de Grenade, j'ai un peu abandonné l’idée de faire de la BD en me concentrant davantage sur les techniques de peinture et de gravure. En fait, cela m'a encouragé à réaliser des illustrations de personnages Marvel que j’ai envoyées à l'éditeur espagnol Planeta de Agostini. Je lui ai envoyé les illustrations que vous avez vues à l’exposition. Plus tard, après avoir terminé mes études et commencé à travailler dans le dessin animé à Madrid, une occasion de travailler pour Marvel s’est présentée, notamment pour Marvel UK. J’ai été attiré car ils recrutaient et d’ailleurs ils ont engagé plusieurs amis espagnols qui avaient également envoyé des projets et travaillé pour l’éditeur Planeta de Agostini. Ils ont tous été pris, sauf moi. Pour moi, cela a été horrible. Cela a été un revers monumental. Mais ça n’a pas duré.
JSD : Est-ce qu’ils t’ont dit pourquoi ?
J. Guarnido : J’avais mal orienté et mal préparé mon dossier. J’avais préparé un portefolio avec des peintures à l’huile, des illustrations à l’aquarelle mais sans planches de bandes dessinées. Pas de planches de bandes dessinées !! La personne qui a reçu ce dossier a dû se dire que, même s’il y avait des illustrations, rien ne montrait que je pouvais être un bon dessinateur de comics. Par la suite, j’ai pensé refaire quelque chose pour montrer plus concrètement ce que je pouvais réaliser mais, au final, je n’ai rien fait. J’ai continué à travailler sur des layouts et des storyboards à Madrid et très rapidement j’ai été contacté par Disney Paris. J’ai déménagé en France et je suis arrivé dans un grand studio proposant une formation professionnelle très intéressante. C’était très prometteur et je me suis concentré sur ça. Très rapidement est venue l’idée de faire Blacksad avec Juan Díaz Canales. C’est à ce moment-là, mais aussi plus tard évidemment, que j’ai compris que cela avait été une bonne chose que je ne parte pas chez Marvel. Je sais maintenant que mon parcours, m’a vie telle qu’elle a été, ma vie professionnelle et la passion que j’ai développée pour mon travail n’auraient pas été les mêmes si j’avais suivi l’autre voie.JSD : En tant que dessinateur, comment travailles-tu avec des scénaristes qui sont eux aussi dessinateurs ? Est-ce qu’ils t’envoient un scénario avec un storyboard déjà préparé ?
J. Guarnido : Non, non. Juan Díaz et moi, on est dessinateurs tous les deux et on a travaillé pour le dessin animé. Il a fait beaucoup de storyboards et sait parfaitement comment structurer un scénario de dessin animé. Les scénarios qu’il m’a toujours fournis pour Blacksad sont des scénarios de dessin animé. J’ai la voie libre pour faire le découpage exactement comme je l’entends. Ensuite viennent sa validation, ses conseils et ses commentaires et ses corrections. Comme par exemple sur une planche où il y avait beaucoup trop de personnages, une foule qu’il a fallu mettre dans plusieurs cases, c’était angoissant, c’était un peu trop et cela n’aidait pas à la lecture. Avec Juan Díaz, on travaille en totale confiance. Ce réflexe vient du fait qu’on a travaillé dans le dessin animé où on soumet tout le temps son travail à quelqu’un d’autre – ce qui est très bon – pour validation. Avec Juan, c’est comme ça. Moi aussi je relis le scénario, je fais des commentaires, parfois je ne suis pas tendre avec lui et il est même arrivé qu´il ait été obligé de retravailler l’histoire en profondeur, de refaire des passages. Voilà, on travaille comme cela. Avec Alain Ayroles, ça a été très différent car auparavant déjà il réalisait des storyboards très poussés pour tous ses dessinateurs. On a essayé, on a fait quelques tests au tout début et vraiment cela n’a pas marché. Il s’en est vite rendu compte. Et du coup, ça a été un long cheminement de plusieurs années d’ajustements. On a travaillé chacun de notre côté sur nos albums, lui notamment sur le préquel de la série "De Capes et de Crocs", et on a essayé de trouver un moyen d’ajuster nos façons de travailler. Finalement, on y est arrivé. Ainsi je n’ai pas dû renoncer à mon instinct de proposer un premier jet de découpage, ce qui me rend du coup acteur et non simple exécutant dans la création du découpage et cela me permet de gagner du temps. J’en avais besoin pour m’approprier l’histoire. Ensuite, Alain a accepté d’écrire entièrement le scénario, puis on a travaillé ensemble le découpage. Ce n’était pas simplement un commentaire sur mon travail, car on voyait ensemble les planches une par une en profondeur. Alain ajustait mon premier jet, tout en respectant mon travail préliminaire. Cela donnait lieu à toute une discussion dont le but était d’améliorer la page. Il avait énormément de choses à dire, sur chaque case, sur la répartition du texte dans les cases, dans la planche. Cela a été très actif, très vif et a abouti à des échanges très enrichissants pour l’un comme pour l’autre. Cela a amélioré la narration de l’album, la qualité du récit à un point que je n’aurais même pas soupçonné en matière de finesse, de rigueur et de verrouillage des différentes lignes de lecture, des différentes actions sur la page pour la lecture. On a été très pointu là-dessus. Chacun a amené son savoir-faire sachant qu’on a deux styles très différents, presque à l’opposé. Pour résumer, son récit est beaucoup plus dense que le mien. Sur Blacksad qui est un style qui me correspond, c’est moi qui développe le découpage et on a en moyenne 6 à 7 cases par planche. Chez Alain, c’est souvent 10 à 12 avec en plus un récit très dense. Sur Blacksad, la narration est assez simplificatrice, tout en étant juste, alors qu’Alain, lui, a une manière de raconter très théâtrale. La mienne est plus cinématographique. C’est un raccourci très grossier mais assez parlant. C’est une analyse simple mais quand on approfondit, elle est tout à fait pertinente. On a réussi à le faire pour ce livre. On a réussi à trouver un système hybride qui finalement nous ressemble à tous les deux, pas à l’un ou à l’autre, mais vraiment à tous les deux. Cela a été formidable. Il y avait une vraie symbiose de travail pour trouver un dénouement, surtout Alain qui a tendance à s’acharner alors que moi j’ai tendance à me dire "Ça y est, c’est résolu" une fois que j’ai assez travaillé et que je suis convaincu par ma planche. Il y avait parfois des choses qui ne me dérangeaient pas mais qui pouvaient gêner Alain par rapport au sens de la narration, notamment lors de lecture du texte par rapport à celle du dessin, dans la même case, dans la suite séquentielle des images. Du coup, il a fallu l’approfondir. C’est sa conscience professionnelle qui parle. Ainsi, lorsqu’Alain estime qu’une action secondaire n’est pas suivie comme il convient, il faudra utiliser cette action secondaire pour fluidifier la lecture de la suite. Les personnages vont aller chacun de leur côté, partir dans des directions littéralement différentes, puis se pose la question de savoir comment on fait pour fluidifier tout ça. C’est pareil pour le texte, pour le découpage des bulles. Cela semble abstrait alors que c’est vraiment du concret : il y a un découpage qui doit clairement être amélioré. On a travaillé des heures en s’envoyant par SMS des dessins ou des croquis sur papier qu’on prenait en photo. Ensuite, je m’envoie le SMS directement sur l’ordinateur et j’incruste son croquis dans le storyboard avec Photoshop. C’est vraiment super rapide, c’est du brainstorming, du patchwork qui dure parfois des heures et le résultat est épatant. Un jour, notamment il y a eu cet épisode dont je me souviens où on avait une petite séquence de pages qui marchait bien mais qu’Alain voulait encore améliorer. À la fin, on a obtenu quelque chose qui marchait dix fois mieux et qui était beaucoup plus clair et esthétiquement plus équilibré sur l’ensemble de la page. C’était un trip, une sensation de triomphe à ce moment-là. Et quand on a eu fini, je me suis dit qu’on était redoutable, vraiment redoutable. Pour moi c’était clair, on avait un problème et on l’a résolu haut la main en collaborant ensemble tous les deux. Ce n’était pas un cerveau plus un cerveau, ce n’était pas puissance 2 mais puissance 10. J’avais l’impression de décupler nos forces et pas simplement de les additionner. Cela a été une très belle expérience.
JSD : Est-ce que cette technique va changer ta méthode de travail ?
J. Guarnido : C’était souvent sur les aspects narratifs qu’on pouvait être en désaccord ou simplement sur une notion de l’espace temporel qu’il y a dans une case, car si une case est un instantané, en même temps c’est un petit moment. S’il y a un dialogue à l’intérieur, on peut se demander à quoi correspond le dessin, à un moment précis du dialogue ou bien est-ce qu’il doit résumer tout ce qui se passe pendant le laps de temps au cours duquel se produit ce dialogue ? Est-ce que l’image correspond à la fin du dialogue ou au début ? Et dans ce sens, pour moi, il est impensable qu’un personnage ait un dialogue auquel un autre personnage de la case doive réagir mais qu’il ne réagisse pas dans cette case mais dans la suivante. Alain n’avait pas exactement la même opinion. À un certain moment, sur une scène d’action très importante quelqu’un parle dans une case mais l’autre personnage ne réagit pas et ne va réagir qu’à la case suivante. Là, on a eu un désaccord profond. Finalement on a trouvé un moyen de s’arranger. Il fallait se coordonner sur la planche et on a divisé la case en deux. Il fallait se convaincre, vendre son argument. Je pense que parfois, on a accepté, on a cédé, parfois on est arrivé à convaincre l’autre. Je me souviens aussi, je ne sais plus à quel propos, qu’il a soutenu une théorie et quand il a fini, je lui ai dit "OK tu as raison, entendu, c’est clair, tu m’as convaincu". On roule comme ça ! Dans ce sens, c’était très intéressant car dans ces échanges on veut tous les deux le meilleur album possible. Et tout ce que j’ai appris sur le narratif qui pour moi n’était pas aussi important, aussi crucial que pour Alain, j’ai fini par l’assumer à force de travailler avec lui. Je ne sais pas si le public le sentira forcément dans le nouveau Blacksad, mais je sais que mon travail a été fortement influencé par tout ce que j’ai appris avec notre travail sur cet album (Les Indes Fourbes).
JSD : En lien justement avec la narration, j’ai été étonné par ces passages où le texte des bulles dit tout le contraire des illustrations que l’on peut voir. Comment vous est venue cette idée ?
J. Guarnido : Ça c’est le travail d’orfèvre d’Alain Ayroles. Il n’est pas Alain Ayroles pour rien. C’est l’un des meilleurs sur le marché de la BD. Je tire mon chapeau devant ce grand monsieur du scénario. Il n’y en a pas qu’un seul puisqu’il y a aussi mon scénariste de Blacksad, mais voilà, Alain Ayroles a cette finesse toute particulière. Il est tout de même un petit peu à part dans le monde de la BD. Il a ce côté littéraire et ce côté alambiqué tant dans la finesse de son écriture que dans la complexité de ses scénarios. Cela nécessite beaucoup de réflexion. JSD : Derrière l’histoire, la narration, on voit souvent se dérouler dans les seconds plans d’autres scènes, d’autres histoires. Est-ce ta façon de créer une ambiance, de donner vie aux cases ?
J. Guarnido : C’est un peu mon truc, comme avec Blacksad. Je ne m’en rendais pas compte car pour moi c’est comme un instinct, un réflexe naturel. Cela vient de mes lectures, mes lectures d’enfance où j’étais très admiratif des dessinateurs qui élaboraient et proposaient un dessin très fouillé avec beaucoup de détails non pas sous forme de petits traits mais sous celle d’une véritable information. Pas des détails de style baroque ou des fioritures qui n’apportent rien, mais bien des détails qui racontent quelque chose. Ainsi, au lieu de juste dessiner un sol et d’y ajouter quelque chose comme un fruit, une peau de banane mais plutôt – c’est un exemple – un mégot de cigarette, un morceau d’objet cassé selon la situation, ce détail en fin de compte va rentrer dans une logique de restitution d’un décor qui, dans le cas des Indes Fourbes, est historique. Il fallait faire des restitutions aussi bien de la Cour d’Espagne que des villes du Pérou. Ce sont des choses pour lesquelles, entre autres, Alain m’avait engagé. Il m’a dit "J’adore ton dessin mais ce que j’adore c’est ta façon de restituer les ambiances, comment tu mets le lecteur en immersion". Cela vient sans doute de dessinateurs comme Jan, un dessinateur espagnol extraordinaire qui a toujours fait cela. Quand j’étais petit, il dessinait une publication pour enfants, une petite BD en fascicules qui avait un caractère éducatif. Il y avait une aventure avec des personnages toujours animaliers mais également une partie documentaire comme sur le Moyen-Âge avec des illustrations sur les châteaux, la cour et le beffroi et ses prisons, le pont-levis, et aussi des jeux. C’était très varié. Il était très doué et son dessin animalier était très proche de celui de Richard Scarry, un illustrateur anglais qui est à la source de ce type d’univers où c’est jubilatoire de découvrir des détails à foison. C’est sans doute de là mais aussi d’autres auteurs comme Uderzo notamment que me vient ce goût du détail et des petites histoires que je crée instinctivement dans les histoires. Les lecteurs ont apprécié et me font comprendre que pour eux c’est jouissif d’être en immersion dans un commissariat où on se retrouve avec Blacksad en suivant un flic et qu’autour il y a plein d’histoires. Il est menotté, mais à côté il y a une femme et un homme qui parlent à un flic, ils ont tous des états d’âme, il se passe quelque chose. Autre exemple, dans la rue on voit un homme qui marche et un gamin qui joue, un autre qui regarde vers le haut, un autre qui regarde sur le côté, etc. Les gens ont adoré tout ça alors que pour moi c’est instinctif de le faire ainsi. Je ne me vois pas dessiner une foule qui marche au pas de l’oie, car ce n’est pas cela une foule. Très enrichissants de ce point de vue, ce sont les livres de photos, les reportages des années 30, 40 et 50 réalisés par de grands photographes comme Andreas Feininger, Berenice Abbott ou William Klein. Ils ont fait des reportages, des melting-pots sur New York dans lesquels on découvre des gueules, des habitudes. Il y a des moments où les gens se parlent, il y en a qui s’arrêtent pour fumer une cigarette, d’autres qui s’arrêtent devant les vitrines, ou qui traversent la rue. Dès qu’il y a un enfant, il est toujours en train de regarder quelque chose ou de ramasser son jouet. Tout ça donne de la vie aux scènes, notamment aux scènes d’extérieur, mais aussi d’intérieur. Pour Les Indes Fourbes, évidemment, je ne m’en suis pas privé car il y a de la matière que ce soit pour les bateaux, les ports ou avec les Noirs cimarrons, les paysans, les mercenaires, les notables de Kuzco, les Indiens. Sur les marchés, on voit que les commerçants sont essentiellement des paysans, principalement indiens, et les clients essentiellement des gens d’ascendance espagnole. Pour moi c’était enrichissant de ne pas les mettre dans un cliché de classes, ce qui n’était pas du tout encouragé par Alain, avec des Espagnols oppresseurs et des Indiens qui courbent l’échine et qui ne font rien, même si l’album traite de ça. La base est historique mais c’est bien plus complexe parce qu’il y a eu un échange, un métissage avec l’Amérique latine, enfin l’Hispano-Amérique. Ce n’était pas une colonie, contrairement à ce que l’on pense, c’était une province espagnole, ils avaient la même langue et les Indiens étaient des concitoyens espagnols et en tant que tels ils se faisaient opprimer par les autorités, taxer et exploiter comme tout le monde, en bons paysans, en bons citoyens de classe humble. Cela dit, ce que j’aime dans ces détails c’est la présence dans ce décor du personnage de l’alquazil et de tous ses soldats qui abusent et font de l’abus d’autorité à tout-va. Mais dans ce marché ou ces rues de Kuzco et ailleurs, il y a aussi des moments de cohabitation, de rapports normaux, de rapports d’une société qui était malgré tout prospère où il y a eu énormément de richesse. On a bâti des églises, des couvents, des bâtiments, des universités, enfin bref, je ne veux pas m’étendre là-dessus, mais cela me plaisait justement de casser le schéma qu’on a, comme si c’était le seul schéma possible, d’Espagnols oppresseurs et d’Indiens opprimés. Il y avait du commerce, des échanges, à un certain moment donné ils ont tous eu la même langue et donc ils étaient aussi des concitoyens qui se côtoyaient et se mélangeaient.
JSD : Avec Alain, vous avez en quelque sorte fait l’analyse du rôle des Espagnols en Amérique du sud ?
J. Guarnido : Ce n’est pas vraiment une analyse, c’est plus complexe. Déjà, ce n’est pas une BD historique, mais une BD d’aventure qui se passe dans un contexte historique. Il n’y a aucune prétention de ma part, c’est mon analyse et elle ne doit pas tomber dans une légende dorée ou être merveilleuse, ce serait complètement faux. Mais elle ne doit pas non plus tomber dans une légende noire, surtout puisque ces derniers temps cela a été le seul discours admissible et politiquement correct. On n’admet pas d’entendre un discours différent. Pourtant quand j’étais en Espagne, à Grenade en plus, un lecteur chilien est venu me parler de ça, de cette union, des racines communes des Espagnols et des Hispano-Américains, du socle culturel extraordinairement riche qui nous est commun et aussi du fait qu’à une certaine époque ils n’avaient pas peur ni honte de parler de la "mère patrie". Et ça, c’est fabuleux. Cela a souvent été la source d’une concorde, alors qu’aujourd’hui on veut l’oublier parce qu’on est passé dans un discours victimiste et anti-impérialiste empreint de révisionnisme – je ne voudrais pas qu’on dise que c’est moi le révisionniste ! – par rapport à une analyse globale plutôt que de se concentrer sur les choses qui se sont probablement passées, comme c’est le cas dans tous les empires et entre toutes les civilisations… Il n’y a pas longtemps, avec des amis, on en discutait justement : Quel peuple du monde n’a pas opprimé à un certain moment son voisin ou un autre peuple ? En plus à cette époque-là, c’est une période de conquête et d’expansion impériale des grandes puissances européennes. C’était un autre monde. Comme je l’ai lu dans un livre, un sachet de poivre avait plus de valeur que la vie d’un homme. C’étaient d’autres temps, des temps de violence. Jamais on n’aurait imaginé qu’un jour on parlerait des Droits de l’Homme. On essaye humblement d’avoir une approche. J’essaye d’avoir une approche la plus lucide possible. Mais j’insiste, ce n’est pas le sujet de la BD. Ce n’est pas central, ni même très important, mais je me suis accordé le plaisir d’illustrer cela dans le décor. Pour l’histoire de Pablos, même sur ces aspects-là, je suis complètement d’accord que cette histoire n’est pas, comme disent certains historiens, la légende noire. Ce sont des choses qui arrivent à un personnage qui est à la limite un hors-la-loi, un picaro, un fourbe. C’est le cheminement d’un aventurier et, évidemment, dans ce récit il ne peut que lui arriver des misères, car les misères arrivaient à ces gens-là. À cette époque-là, tout peut arriver. Ce qui ne veut pas dire que ça ne peut arriver que comme cela, que tous les Indiens se font massacrer. La majorité de la population, du moins dans la majorité des cas de l’ensemble de l’Amérique Latine, est encore autochtone avec beaucoup de mixité, de métissage. Ce n’est pas comme les Indiens d’Amérique du nord qui ont quasiment disparu ou sont devenus une minorité infime dans des réserves. On ne peut pas comparer une situation avec l’autre. Voilà, ce n’est ni une légende dorée ni une légende noire.
Journaliste 2 : Je voudrais revenir un petit peu sur l’expo qui vous est consacrée au CBBD. Comment s’est passée l’organisation de cette expo ? Qu’est-ce que vous vous vouliez mettre en évidence par rapport à votre parcours dans la bande dessinée franco-belge car elle est surtout centrée sur votre carrière BD franco-belge. Je ne sais pas si vous avez fait des choses en Espagne.
J. Guarnido : En Espagne, non, pas vraiment. En fait les dessinateurs de ma génération mais aussi ceux des générations précédentes et ceux de la génération suivante, on a tous dû choisir entre travailler pour le marché américain ou le marché francophone car ce sont les deux vrais marchés qui peuvent nourrir son homme pour ainsi dire, avec lesquels on peut tirer assez de bénéfices en droits d’auteur, simplement pour gagner sa vie. En Espagne, ce n'est pas la faute des éditeurs espagnols, mais tout simplement parce que le public BD est minoritaire et le marché représente 10% du marché francophone. Donc, vous ne pouvez faire autrement que signer vos contrats avec des éditeurs franco-belges, toucher vos droits d’auteur par rapport à cette édition qui va être l’édition importante et après laisser votre éditeur négocier avec les différents éditeurs européens y compris les Espagnols pour qu’ils rachètent la licence. Si c’était le cas contraire, ce serait ridicule car vous ne toucheriez les droits d’auteur que sur un tout petit tirage alors que le gros tirage est toujours celui de l’éditeur franco-belge et, dans ce cas vous ne toucheriez qu’une partie négociée du rachat de la licence. Ça ne serait jamais comparable. Ce ne serait même pas la moitié, ni un tiers de ce que vous toucheriez logiquement avec les droits d’auteur calculés sur les ventes de votre édition papier principale.
Journaliste 2 : En parcourant l’expo et en admirant les différentes séries que vous avez alignées depuis maintenant 20 ans, il a une constante. Je trouve qu’on retrouve encore 20 ans après le premier album de Blacksad ce petit côté Disney dans le trait. On sait que vous avez fait vos débuts en tout cas dans l’animation chez Disney notamment. J’aimerais savoir si le trait que vous avez était votre trait de départ avant de commencer dans l’animation ou bien si c’est quelque chose que vous avez acquis pendant vos années dans l’animation et que vous avez conservé.
J. Guarnido : Tout s’entremêle. De toute façon, mes premières influences ça vient de Disney, ça vient des courts-métrages de Mickey, Donald et Dingo que je pouvais voir comme on pouvait les voir à l’époque. On n’avait pas de magnétoscope, je n’avais même pas de télé couleurs. Au début donc il y avait une émission qui passait aléatoirement, elle s’appelait Disneyland et passait quelques-uns des cartoons de Tic et Tac, Donald, Donald et ses neveux, tout ça c’était rarissime de les voir. Heureusement, on avait un film par an dans les salles et encore moi j’habitais un petit village, c’est pourquoi c’était si compliqué. C’était pas évident et on repassait les films anciens. Le premier dont j’ai le souvenir c’est Peter Pan qui a été fait dans les années 50 ou fin des années 40 je crois. C’était difficile mais je me nourrissais déjà de ça, et en plus des BD espagnoles de jeunesse que j’avais à ma disposition. Plus tard, j’ai eu en main le premier Astérix, ça m’a complètement explosé tous les schémas possibles, et voilà ça s’est enrichi avec les premières BD de super-héros que des copains m’ont passées (45’30), un peu plus tard j’ai découvert les Schtroumpfs, puis Tintin et j’ai commencé à lire les Astérix et les Tintin dans la bibliothèque publique de mon village, parce que les BD cartonnées c’était cher et il était difficile de se les procurer. En plus, je ne savais pas que la bibliothèque les avaient et le jour où j’ai vu qu’elle les avait toutes je me suis dit mais c’est la caverne d’Ali Baba et j’y allais trois à quatre fois par semaine. Tout cela conforte une envie de dessiner et c’est après qu’on la développe avec ses ressources. Mes ressources à 15 ans n’étaient pas les mêmes qu’à 20 ans, ni à 25, ni à 30, ni à 40. A 30 ans, c’est l’époque où je suis sorti de la fac, je venais d’avoir la trentaine, et quand j’y pense aujourd’hui je me rends compte que depuis j’ai aussi appris énormément de choses. J’ai appris énormément de choses chez Disney même si le matériel avec lequel je devais travailler était différent, je travaillais essentiellement au crayon alors que la bande dessinée j’ai toujours voulu la faire à l’encre et la mettre en couleurs à l’aquarelle. Pour Blacksad, c’était clair pour moi que je voulais le faire comme ça. Voilà, ce sont toutes ces choses qui vous forment petit à petit. Enfin, j’ai oublié l’époque à l’adolescence où j’ai commencé à découvrir la BD adulte, pas Pilote parce qu'on n'avait pas Pilote, mais de toute cette génération, c’est notamment Girod, Moebius encore plus que Girod, Moebius qui m’a sidéré, puis les auteurs espagnols qui commençaient à faire de la BD d’auteur très différente de ce qu’on avait vu jusque-là. Chaque fois, que ce soit la découverte de Carlos Gimenez ou Alfonso Font, ou de Moebius ou de Loisel, d’André Juillard, de Bill Sienkiewicz, David Mazzucchelli, chaque fois c’est une claque, waouh ! Il y a quelque chose de vrai dans l’approche de ce bonhomme, il a compris ce que c’est que le dessin, il est capable de transmettre tellement d’informations, tellement de vérités, tellement d’informations sensorielles avec cette abstraction qu’est le trait, le fait de résumer tout à un trait, et ça c’est magique. Depuis j’analyse tout cela et j’essaye de m’approcher de cette philosophie, de cet état d’esprit qui fait des génies aussi disparates qu’Uderzo, Kyle Baker ou les classiques comme Frank Robins, ces illustrateurs américains dont je suis absolument adorateur, les grands classiques non seulement Norman Rockwell ou Bernie Fuchs… il y en a une pléiade. Il y a une telle science, une telle virtuosité et ce n’est pas une virtuosité gratuite de faire des trucs ayant l’apparence d’une péritie extrême, non c’est la compréhension, la compréhension du dessin qui est importante et entre la compréhension du dessin d’un John Buscema et d’Uderzo qui dessine Astérix, on pourrait penser qu’il y a un monde mais vous voyez je me rends compte qu’entre les deux il y a un Tanguy et Laverdure dessiné par Uderzo et du coup, là il y a quelque chose qui se connecte, particulièrement chez Uderzo qui avait une versatilité ébouriffante, incroyable. Tout cela, c’est des bribes de science, de magie, d’artisanat, d’art qu’on essaye d’intégrer chacun dans son imaginaire et dans sa gestuelle et dans son exercice quotidien.
Journaliste 2 : Est-ce que je peux schématiser les choses ainsi : dans la BD franco-belge, vous vous sentez plus proche de l’approche graphique française, notamment je pense au renouvellement de la bande dessinée au début des années 90 avec des auteurs qui viennent de l’Association et tout ça, ou bien plutôt proche des auteurs belges où au niveau du graphisme on sent qu’ils sont un peu plus ancrés dans des codes de la BD classique franco-belge, je pense notamment à des gens comme Frank Pé et tout ça. Graphiquement où est-ce que vous vous situez ?
J. Guarnido : Moi, toujours plus naturellement dans une école plus classique et classiciste mais n’empêche que je suis capable d’apprécier et d’admirer des gens qui ont des styles complètement différents, plus avec des approches totalement originales, parfois ça me fascine et même je jalouse des personnes qui ont une approche tellement différente. Je suis très copain avec Tony Sandoval et j’ai une admiration énorme pour son imaginaire, je le trouve extraordinaire, et puis sa capacité de dessin et la qualité de son travail à l’aquarelle, c’est extraordinaire. Kerascoët que j’ai rencontrés à l’époque, j’étais très content, je les ai félicités, je leur ai fait part de mon admiration, je trouvais qu’ils poussaient cette école de dessin pour ne pas citer d’autre gens, mais ce style de dessin ils avaient poussé un peu plus loin parce qu’ils étaient beaucoup plus attentifs aux détails, à la richesse des décors et à plein d’autres éléments, à la rigueur, il y avait un fond de rigueur beaucoup plus présent que chez d’autres personnes qui les ont influencés mais je trouve que dans certains aspects je préférais leur travail à celui des prédécesseurs. J’adore par exemple le travail de Riad Sattouf et notamment j’ai bien aimé ses autres albums, mais l’Arabe du Futur, c’est un boulot formidable, son dessin est ce qu’il est mais… (interruption imprévue chez Juanjo).
Journaliste 2 : En ce qui concerne Blacksad, il est expliqué dans l’expo que vous travaillez sur un dyptique. Quelle sera la thématique de cette histoire cette fois ?
J. Guarnido : C’est une enquête assez complexe parce qu’il y a plusieurs milieux sociaux de New York qui sont impliqués. L’histoire se situe dans les profondeurs de la Terre, et du coup, cela devient très animalier. Le décor est une sorte de tanière, de grotte, mais en fait il s’agit des gens qui travaillent dans le métro et les transports souterrains et de toute la structure souterraine de la ville. C’est très intéressant. Il y a aussi des personnages du milieu du théâtre contemporain de l’époque et une trame urbanistique. L’un des personnages centraux ayant un lien avec les grands travaux de transformation de la ville, il y a une histoire policière mêlée à des intérêts politico-urbanistiques qui est très intéressante. Blacksad est très impliqué mais également Weekly qui joue un rôle très important dans l’histoire. Je pense que le public va apprécier car l’histoire est superbe, très riche. L’album devrait paraître en mai 2021 mais je ne vais pas trop m’avancer. Il faudrait que je puisse travailler de manière très productive d’ici-là. Étrangement, en ce qui me concerne, le confinement ne m’a pas aidé à travailler. Je ne me suis pas dispersé mais je n’ai pas été très efficace. Je ne sais pas, il y avait une certaine lourdeur dans l’atmosphère générale et je suivais de près ce qu’il se passait en Espagne où la situation a été bien plus catastrophique qu’en France, et même qu’en Italie. Peut-être que cela m’a un peu plombé et je n’ai pas avancé au rythme que je voulais. J’ai tout de même beaucoup travaillé pendant ces deux mois mais normalement j’aurais dû avancer davantage. Cela dit, je suis sur le bon chemin pour finir bientôt tous mes crayonnés, et je passerai donc bientôt à l’encre et à la couleur.
Journaliste 3 : Êtes-vous content du jeu Blacksad ?
J. Guarnido : Pour ce que j’ai vu du jeu vidéo c’est chouette. J’ai été agréablement surpris, surtout par les ambiances, les lumières et, Blacksad je l’ai trouvé formidable. À l’époque, ils m’avaient montré la dizaine de personnages du jeu pour que je les valide et j’ai été agréablement surpris. La plupart d’entre eux étaient très bien et d’autres carrément formidables. Oui, je suis content mais comme je ne suis pas un joueur, ce n’est pas mon medium de prédilection.
Juan Sanz Diaz : Si tu veux bien, j’aimerais revenir sur l’histoire de la BD en Espagne avant les années 2000. La BD franco-belge a connu une vague de grands auteurs espagnols comme Victor De la Fuente (voir notre article sur cet auteur ici), Jordi Bernet, Carlos Giménez et quelques autres, mais ils n’ont pas vraiment connu le succès qu’ils auraient mérité. A partir de 2000, j’ai découvert ton album presque en même temps que la nouvelle série Djinn d’Ana Marallès puis la BD franco-belge s’est ouverte à plein d’auteurs espagnols comme Rubén Pellejero (qui était déjà bien présent mais qu’on a redécouvert avec plusieurs albums chez Aire Libre et maintenant avec Corto Maltese et le succès que l’on sait), mais aussi Miguelanxo Prado. Plus récemment, une nouvelle génération d’auteurs a émergé comme Calderón, Duarte, Homs, Munuera, Roger, Guerrero, Toledano... Tu n’as pas l’impression quelque part d’avoir ouvert le marché du franco-belge aux auteurs espagnols ?
J. Guarnido : Non, non pas du tout, parce que ce n’est pas moi mais Munuera qui a été l’un des premiers de ma génération à être publié sur le marché français. En ce qui concerne Ana Mirallès, dont le travail avait déjà été remarqué avec ses œuvres précédentes, c’est grâce à Djinn pour des raisons X qu’elle a percé sur le marché franco-belge, un peu en retard car elle fait plutôt partie de la génération Miguelanxo Prado, Rubén Pellejero et Daniel Torres notamment. Après, il y a ma génération, celle de Munuera, de Sergio Garcia et d’autres, mais c’est vraiment Munuera qui a planté la première pique (rires) en territoire franco-belge et je considère que c’est lui qui a un peu ouvert la voie pour nous, sans doute. Et oui, après, il y a tous les autres auteurs, Jaime [Calderón] comme tu viens de dire, Homs, Lafèbre, Roger qui ont une bonne grosse dizaine d’années de moins que nous, il ne s’agit pas d’un esprit de groupe à part, ce n’est pas ce que je veux dire, mais même moi je les vois comme une génération bien différente de la mienne. En fait, cela vient par vagues car, avant Prado, Rubén et Ana, il en a eu d’autres qui ont essayé dont certains qui étaient installés en France comme Julio Ribera, Antonio Parras, Victor de la Fuente et puis aussi tous ceux qui ont travaillé depuis l’Espagne comme ceux de la génération précédente, Alfonso Font, Carlos Gimenez, Jordi Bernet et bien d’autres. Tous, on a toujours dû travailler pour le marché franco-belge parce que c’était le seul, en fin de compte, rentable pour nous, auteurs.JSD : Toujours sur ce thème, en tant qu’Espagnol j’ai l’impression qu'avant les années 2000, dans les pays francophones on parlait très peu de ces auteurs espagnols pourtant fabuleux comme Bernet, Prado, de la Fuente ou Carlos Gimenez. Puis à partir des années 2000, il y a eu comme une prise de conscience en constatant l'ampleur de l'arrivée d’auteurs espagnols sur le marché de la BD franco-belge. Je me souviens même d'auteurs français qui disaient "Ah oui, ces auteurs espagnols! Ceux qui arrivent..." [Guarnido : "qui nous piquent notre boulot" (rires)]. Et justement, à quelle école estimes-tu appartenir, l'école espagnole ou l’école américaine ? Quand je regarde ton dessin dans Blacksad, j'ai la nette impression qu’il tire plus vers le style américain.
J. Guarnido : J’ai toujours eu conscience que mon dessin a un côté américain puisque Disney et le dessin animé m’ont fortement influencé depuis toujours. Par la suite, j’ai eu entre les mains les BD de super-héros et je suis devenu fan. Dans ce type de BD, il y a un côté extrêmement dynamique qui vient du fait même qu’il s’agit d’histoires de super-héros c’est-à-dire des mecs en maillot qui sautent dans toutes les directions, qui font des galipettes en l’air durant la moitié de la BD. C’est très dynamique, l’action y est très importante et le style narratif y est très différent. Il est lui-même l’héritier d’une BD classique américaine réaliste qui est très intéressante en soi et que j’ai découverte plus tard grâce à E.C. Stoner, Alex Raymond, Milton Caniff. Ce sont des maîtres du dessin, de véritables génies et ce n’est pas pour rien qu’ils ont fait école. Je me suis formé avec tout ça, je ne l’ai pas forcément cherché car c’est instinctivement que cela me parlait. C’est peut-être aussi dû au fait que je me suis intéressé à l’animation, au mouvement, au dynamisme. Cela m’intéressait beaucoup parce que je l’appréciais. J’appréciais la valeur, le mérite qu’avait un dessinateur à réussir à transmettre le mouvement avec une case qui est pourtant figée. Ce n’est pas un dessin animé où tu as l’illusion du mouvement. L’approche est aux antipodes de celle du dessin animé où tu décortiques le mouvement et puis tu vas avoir l’illusion du mouvement dans ta rétine. Dans la BD, tu vas le résumer dans un seul dessin. Il y a eu beaucoup d’albums mais il y en a eu un qui a été déterminant : dans un chapitre des X-Men à l’époque de Chris Claremont au scénario et John Byrne au dessin sans oublier l’encrage de Terry Austin qui a largement contribué au succès, il y a un chapitre où on présente le personnage de Vindicator, Alpha, l’arme Alpha… [JSD : oui de la Division Alpha] et Wolverine, c’était l’arme X. C’est un moment où on découvre enfin… peu importe. Wolverine est dans les bois et il y a un mec qui surgit de terre et en fait, ils se connaissent, c’est son ancien mentor. [JSD : la scène où Colossus est allongé sur l’herbe appuyé contre un tronc d’arbre en compagnie de Storm. Oui, extraordinaire !] Oui, Colossus est allongé avec Ororo – Storm – qui est "mortelle" en bikini (rires). Et là tu vois apparaître Wolverine parce que Vindicator l’a envoyé à un demi kilomètre d’un simple coup de poing (rires). Et dans une autre case, tu vois Colossus se transformer et le traitement de l’armure par Terry Austin et John Byrne est formidable. Mais la case la plus importante, c’est celle du coup de poing que Vindicator balance à Wolverine, qui d’ailleurs le dit après : "Il a failli m’arracher la tête". C’est incroyable, waouh, quel coup de poing ! On voit Wolverine avec la tête complètement tordue sur le côté, la lèvre complètement tordue comme dans les images où un vent extrême fait trembloter la peau. On voit la bave qui sort, on voit les dents, tout est tordu... Il s’est pris un pain, c’est incroyable la force que cela dégage. J’ai copié cette case 1000 fois. Il y a des cases dans Blacksad qui sont directement copiées de celle-là tellement le souvenir m’a marqué. Ce sens du dynamisme qu’avaient des gens comme Gil Kane, John Romita Sr. avec Spider-Man était fabuleux. Spider-Man avait un aspect juvénile et athlétique mais pas bodybuildé comme beaucoup l’ont dessiné après. C’était un dessin très réaliste. Buscema, il y aurait trop à dire. Mais ce serait une bêtise de dire que le dessin de la BD franco-belge est plus figé, moins dynamique, ce serait une bêtise énorme, car en fait il s’agit d’un traitement différent. Dès que c’est réaliste, on n’ose pas aller vers ce genre de codes. Par contre, celui qui était très impressionnant de ce point de vue, encore une fois c’était Uderzo. Tu vois des personnages semi réalistes d’Uderzo avec des raccourcis, des positions dynamiques. Il y a aussi des moments inoubliables. Par exemple l’autre jour, je survolais l’album "Astérix aux Jeux Olympiques". Tu vois tous les athlètes qui sont d’un dynamisme fabuleux. Quand les Romains se font battre à la course par les Grecs, tu vois les Grecs courir, la position de leurs mains, ils ont une espèce d’énergie, tu vois l’effort, tu vois les muscles… C’est un dessinateur comique et on se demande comment c’est possible qu’il ait cette maîtrise de l’anatomie, des raccourcis, des pauses. C’est extraordinaire ! À ce niveau, le dessin qui m’a tué c’est dans l’album "Les Lauriers de César". Ils sont au marché d’esclaves où certains prennent des poses de sculptures anciennes. Et à un moment donné, l’un d’eux prend la pose du lanceur de disque et traite Astérix de je ne sais plus quoi, d’objet de soldes ou quelque chose dans le genre. Alors, Astérix lui balance une baffe et tu vois l’autre complètement démonté (rires), le bras qui tient le disque s’est étiré, ses doigts se crispent et le disque se désintègre (rires) le disque tombe en miettes, c’est extraordinaire, il a les yeux écarquillés qui partent dans toutes les directions, c’est fabuleux. Il y a des images, des choses ponctuelles comme celle-là que j’aime et qui me marquent. Chaque fois que je dois dessiner un personnage qui se prend une baffe, j’ai toujours en tête ce dessin. Selon que ce doit être réaliste ou comique, il y a quelque chose à apprendre de cette case d’Astérix ou de celles de John Byrne.
JSD : Une toute dernière question ?
J. Guarnido : La dernière alors ! (rires)
JSD : Lorsque tu dessines tes crayonnés – j’en ai vu pas mal ici à l’exposition au format A4 – lorsque que tu passes à l’encrage, est-ce que tu penses déjà à la mise en couleurs en laissant des espaces libres pour affiner les détails avec la couleur alors que tes encrages sont déjà très détaillés ?
J. Guarnido : Oui, quand tu fais de la couleur directe, tu es obligé de faire ton encrage en conséquence. L’autre jour, je voyais la publication d’un bon copain, un coloriste extraordinaire qui travaille pour le marché européen. Il s’appelle José Villarubia et publie beaucoup de choses intéressantes sur Facebook. Il montrait un dessin de Bernie Wrightson sur une illustration de Swamp Thing. Lorsque tu vois son encrage, tu comprends. A la limite, si tu le vois seul, il est très bon, mais il n’a presque pas de sens à certains endroits, sauf qu’il a été totalement pensé pour la couleur. Et lorsque tu vois le dessin en couleurs, tu te dis que c’est un génie, il voit tout ! Il a déjà peint le dessin, il a déjà mis le dessin en couleurs dans sa tête avant de l’encrer quasiment.
Journaliste 3 : Est-ce que vous vous considérez comme un pionnier pour toute une génération espagnole plus jeune qui vous a suivi sur le marché franco-belge ?
J. Guarnido : Non, non, non, je répète ce que je disais, le pionnier de ma génération, c’est José Luis Munuera et à la limite, Sergio Garcia qui a percé au même moment. Je suis arrivé avec Blacksad quatre ou cinq ans plus tard. Et les pionniers, ce n’est pas eux non plus, ce sont tous les grands maîtres qui nous ont précédé comme Florenci Clavé, Julio Ribera, Alfonso Font et Pepe Gonzales. Leur talent a été reconnu en milieu francophone et cela a été formidable. Il y a différentes générations et je comprends aussi que mon travail et celui de ceux de ma génération ainsi que de la précédente aient inspiré particulièrement des jeunes qui s’identifient plus avec des BD plus récentes plus proches d’eux dans le temps, comme Blacksad. C’est appréciable. C’est peut-être dû aussi au fait qu’ils sont plus sensibles à une culture de l’image plus moderne, plus influencés par les styles contemporains avec beaucoup d’intervention de l’ordinateur, même si on ne travaille pas avec l’ordinateur. Mais on apprend aussi des gens plus jeunes qui font des choses spectaculaires avec des moyens et des outils que nous n’avions pas. Et du coup on s’influence mutuellement. Ils ne peuvent peut-être pas sentir toute l’admiration formidable que j’ai pour des gens comme Jordi Bernet ou Carlos Gimenez. Ce sont des gens qui travaillent dans un style très traditionnel, et malheureusement, c’est d’eux qu’on devrait apprendre, mais les jeunes se sentent peut-être moins concernés par des auteurs avec qui il y a un fossé générationnel plus profond. Je leur conseille de ne pas se limiter à regarder des auteurs tels que Rob Liefeld et Todd McFarlane car il y a des artistes qui à la base sont beaucoup plus importants, beaucoup plus déterminants pour le développement de tous les styles qu’il y a eu en BD, et qui sont la vraie source. Mais les jeunes ont toujours du mal à admettre ça.JSD : À propos de travail sur tablette, penses-tu t’y mettre aussi un jour ?
J. Guarnido : Oui, les crayonnés de Blacksad, je les ai créés sur tablette. Et j’ai également fait des illustrations. Dans l’exposition, on peut voir des travaux sur Alice Cooper et Kiss, c’est du Photoshop. J’ai également fait les couleurs du premier "Sorcelleries" sur Photoshop. Oui, j’ai fait ponctuellement pas mal de choses sur ordinateur. Je préfère le traditionnel mais pour les crayonnés par exemple, il y a cette versatilité du numérique qui est tellement pratique. Tu peux corriger, faire des montages avec des personnages, tu peux changer de position, de proportion. C’est très versatile et très pratique.
JSD : Vas-tu retravailler avec Ayroles ?
J. Guarnido : Ah oui, bien sûr. Pendant la tournée des Indes Fourbes, on nous a plusieurs fois posé la question, on n’avait pas encore parlé de faire quelque chose d’autre mais on se regardait et on a commencé à se dire, oui, oui sûrement. Mais on ne savait pas quoi. Et comme on avait trois heures de train devant nous, je lui ai dit "Alors parlons de choses sérieuses. Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?". On en a discuté et finalement on a trouvé ce qu'on allait faire pour un prochain projet. Mais, en aucun cas, ce ne sera avant le Blasksad 7.
JSD : Si je me souviens bien, c’est toi qui as eu l’idée du Buscón car tu avais signalé à Ayroles qu’il n’était pas possible d’écrire une suite à Don Quijote y Sancho Panza puisque l’auteur met fin à leur vie. À ce moment-là, avais-tu déjà une idée de ce que vous alliez créer ou s’agissait-il simplement d’une posssibilité, d’une ouverture dont vous avez parlé ?
J. Guarnido : Non, c’est venu quand il m’a parlé de Don Quijote. On était à notre cinquième ou sixième rencontre. On était au restau et on discutait pendant des heures en essayant de trouver quelque chose. Ça s’est passé en 2009 et on n’arrivait pas à trouver. Je ne désespérais pas mais on ne trouvait rien qui nous motivait tous les deux. On s’est orienté vers quelque chose de romanesque mais dans son idée c’était une série et je ne pouvais pas le faire. C’est alors qu’il m’a parlé du projet sur lequel il travaillait avec Richard Guérineau au dessin, puis il m’a parlé de Don Quichotte aux Indes. Immédiatement, pour la raison que tu as évoquée, je lui ai retorqué que ce n’était pas possible mais j’ai tout de suite pensé qu’El Buscón se termine quand Pablicos (Pablos) annonce qu’il part aux Indes. C’est en lui parlant de cela que tout est parti. Je venais d’ouvrir la boîte de Pandore et il fallait saisir le truc qui s’échappait de la boite. Ça allait changer ma vie pour un certain nombre d’années, peut-être pas dans l’immédiat, mais ça allait être un gros projet, un beau projet déterminant dans ma carrière.
JSD : Donc tu avais lu le livre, tu lui en parles, il a l’air enthousiasmé. J’imagine que lui aussi a dû le lire. Il vous a fallu combien de temps pour vous revoir, pour en parler, pour que vous puissiez poser les débuts de l’histoire ?
J. Guarnido : Quand je lui ai parlé d’El Buscón en soulignant que c’était le chef-d’œuvre de la littérature picaresque, il a tout de suite été intéressé parce qu’il avait déjà lu d’autres romans de la littérature picaresque espagnole, notamment "La vie de Lazarillo de Tormes", qu’il connaissait très bien. Il m’a répondu: "Je vais le lire et on en reparle". On s’est quitté en sachant que son devoir à la maison était de lire El Buscón. Il l’a lu immédiatement et finalement m’a dit : "Là, c’est bon, il y a de la matière et ça va être super". Il a tout de suite commencé à esquisser ses premières idées du scénario et, peu après, il m’a raconté son premier jet du scénario qu’il a complexifié ensuite.
JSD : Du coup, combien de temps s’est écoulé entre l’idée qui a germé et la sortie de l’album ? Presque 10 ans ?
J. Guarnido : Oui, depuis 2009, et à ce moment-là j’en étais … au troisième Blacksad, je devais faire le quatrième. Ensuite, j’ai fait le cinquième, puis Sorcelleries. Ça a donc pris un bon moment.
JSD : Concrètement, à partir de quand as-tu commencé à travailler sur les Indes Fourbes ?
J. Guarnido : Finalement, je m’y suis mis après avoir terminé le clip de Freak Kitchen, c’était en 2016, je pense. J ’ai dû passer trois ans et demi sur le dessin. La première étape a été le découpage et on l’a fait en commun. Donc en tout, j’ai bossé ferme trois ans et demi sur l’album.
JSD : Pour revenir un peu en arrière… j’en profites (rires)
J. Guarnido : Juan, la ultima ! [la dernière] (rires).
JSD : Lorsque tu as fait Sorcelleries et les couvertures et le dernier tome épilogue de Voyageur, j’imagine que c’était pour faire autre chose, changer un peu de style, essayer un style plus Disneyen, sortir un peu de ton travail sur Blacksad ?
J. Guarnido : Les deux séries n’ont rien à voir. Avec Sorcelleries, je voulais faire quelque chose de plus léger et surtout faire une BD pour mes enfants, une BD qu’ils puissent lire. Mais comme pour El Buscón, ça devait être quelque chose de plus simple. Avec Sorcelleries, je voulais faire quelque chose de plus léger, de plus rapide et ne pas passer trop de temps dessus. Mais finalement cela m’a pris plus de temps. C’est devenu plus ambitieux, plus important que l’intention d’origine. Par contre, en ce qui concerne Voyageur, j’avais envie de travailler avec le groupe d’auteurs qui s’étaient engagés dans le projet, notamment avec Pierre Boisserie {Juan : et Stalner, Bourgne, Rollin }. Je suis très copain avec Marc Bourgne. Finalement, je travaillais le scénario avec Pierre et Stalner n’est pas tellement intervenu. Au départ, je ne devais faire que les couvertures mais l’histoire qui se profilait de personnages et de voyages dans le temps me plaisait et m’intéressait beaucoup. La question des voyages dans le temps est quelque chose qui m’a toujours plu. Le premier roman de science-fiction que j’ai lu est "La fin de l’éternité" d’Isaac Asimov. J’ai adoré et je pense encore aujourd’hui qu’il devrait être la référence de tous ceux qui écrivent sur les voyages dans le temps. Et pourtant, ce n’est pas le cas car on ne suit pas la logique qu’avait développée Isaac Asimov pour cette histoire. Pas une fois, je ne l’ai vu reflétée dans le cinéma, ni nulle part, ce qui est un peu surprenant. Bref, je voulais participer à l’aventure, je me suis emballé, j’ai proposé de signer le dernier chapitre. Entre-temps, la série s’est un peu cassée la figure et il n’y a pas eu trop de ventes, malheureusement. Je voulais dessiner le dernier chapitre tout en me disant que ça n’allait pas être rentable et que ce serait un album qui viendrait clore une série dont les ventes étaient déjà en chute. Mais, comme je m’étais engagé auprès de Glénat, j’ai tenu à le faire. Je l’ai fait avec énormément de plaisir parce que j’y ai passé de bons moments. Je me suis essayé avec un style un peu plus réaliste, que j’ai un peu raté par moments mais j’ai aimé. Il y avait de grosses batailles, la tour Eiffel se cassant la figure et plein d’autres choses rigolotes à dessiner et je me suis quand même éclaté. Je m’éclate toujours, tant que je dessine.
JSD : Pour finir, en parlant de scènes extraordinaires je pense tout de suite à cette scène de Neal Adams où le fauve chute de plusieurs étages et essaye de se rattraper, je ne sais pas si tu vois la scène…
J. Guarnido : Je vois Neal Adams et la période des X-Men, mais le fauve, c’est qui ce personnage ?
JSD : Hank McKoy.
J. Guarnido : Ah oui, la Bête, the Beast.
JSD : Oui, cette scène où la Bête essaye de se rattraper et où toutes les cases s’enchaînent en s’élargissant vers le bas. Je les trouve extraordinaires surtout pour l’époque.
J. Guarnido : Le dessin des X-Men Classiques dont l’original est dans l’exposition, c’est un hommage à Neal Adams.
JSD : Oui, il est magnifique. C’est indiqué …
J. Guarnido : Je crois bien que c’est précisé. Pour ce dessin justement de Beast que j’ai fait avec la tête à l’envers, je voulais un truc extrême du point de vue anatomique.
JSD : Je te remercie beaucoup car tu m’as tout de même un peu poussé à participer à cette interview.
J. Guarnido : J’étais persuadé que c’était la bonne formule car même s’il y a plusieurs journalistes, chacun a la possibilité de poser ses questions et d’entendre les réponses aux questions qu’il aurait voulu formuler même si elles ont été posées par un autre. Du coup, cela multiplie beaucoup plus l’information. Tu as l’habitude de zoom depuis le déconfinement (rires) ?
JSD : Pour ma part je découvre et c’est ma première expérience. C’est déjà extraordinaire pour moi. Pour le reste, je ne sais pas comment ça se passe, si on partage l’interview ou s’il faut tout transcrire car, attends que je vérifie… ah oui, tout de même 1h30 d’interview.J. Guarnido : Oui, on a bien papoté.
JSD : Désolé de t’avoir bloqué cet après-midi alors que vous êtes en plein déconfinement et que tu aurais pu aller boire un verre en terrasse.
J. Guarnido : Et vous, vous ne pouvez pas encore ?
JSD : Non pas encore, ce sera à partir du lundi qui vient, le 8 juin.
J. Guarnido : Ah c’est bien !
JSD : Pour ma part, en ce moment, je fais une exposition avec Mateo Guerrero et Djief.
J. Guarnido : Ah oui, c’est vrai, tu m’en as parlé !
JSD : Et la précédente, en décembre 2019, c’était celle de Jaime Calderón qui a été extraordinaire aussi. Et puis, je suis triste que tu ne sois pas là, ce n’est tout de même pas la même chose.
J. Guarnido : Et moi, tu penses que je suis triste (rires), à une semaine près….
JSD : Ah oui, c’est clair. Ton expo est vraiment extraordinaire, super belle.
J. Guarnido : J’ai vraiment hâte de la voir et je vais essayer de venir dès que possible.JSD : Il paraît qu’ils vont faire une fête pour t’accueillir comme il faut.
J. Guarnido : (rires) Oui, l’idée puisqu’on n’a pas pu faire un vernissage c’est de faire un événement quand ce sera possible de le faire.
JSD : En tous cas, encore merci pour ce très bon moment. Maintenant, je ne t’embête plus.
J. Guarnido : Tu ne m’as pas embêté, personne ne m’a embêté, je suis très content (rires), c’était chouette.
Remerciements: je remercie le Musée de la BD de nous avoir donné la possibilité de participer à cette belle et passionnante rencontre avec l’artiste Juanjo Guarnido, merci à Amélie Andrieu, commissaire de l’expo, pour la visite et merci à Valérie Constant (communication).
Voir notre page au sujet de l'expo en cliquant ici
SDJuan
Date de dernière mise à jour : 18/05/2021
Ajouter un commentaire