COMIC BARCELONA 2023
Juste avant la semaine sainte, Barcelone a accueilli son traditionnel Festival de la BD ("Comic Barcelona") sur le site de Fira Montjuic. Du 31 mars au 2 avril 2023, les pavillons 2 et 5 ont donc été le lieu incontournable à visiter pour tout fan de comics et de bande dessinée… et de manga !
La grande affiche installée sur la façade côté Plaza de España (Plaça d'Espanya) donne le ton. Une grande illustration originale et moderne dessinée par Teresa Valero qui attise vraiment la curiosité mais on se demande ce que le personnage de Mario Bros vient faire au bas de l'affiche. Ensuite, c'est le public présent en très grand nombre qui surprend. La file d'attente en serpentin s'étend sur une bonne centaine de mètres avant d'atteindre l'entrée par la Plaza del Universo (Plaça Univers). Cette 41e édition a rencontré le succès, équivalent à 2022 en nombre de visiteurs (près de 110.000) mais on notera toutefois que le Salon du Manga qui s'est tenu en décembre 2022 au Centre d'expositions Fira Barcelona Gran Via avait lui accueilli plus de 160.000 visiteurs !
"Comic Barcelona" accorde une large place aux femmes, qui représentait plus de la moitié des invités, notamment − pour ne citer qu'elles − Teresa Valero, Aude Picault, Anne Simon, Florence Cestac, Léa Murawiec. Au rez-de-chaussée du pavillon 5, lieu de passage très fréquenté, une exposition intitulée Magas del Humor présentait le travail principalement axé sur le dessin humoristique de plus d'une trentaine d'autrices espagnoles.
Mon enfance ayant été largement bercée par la lecture de comics américains, l'expo qui aiguisait le plus ma curiosité était celle rendant hommage à Carlos Pacheco, décédé en novembre 2022 (voir notre article Créabulles ici). J'ai eu la chance de le rencontrer plusieurs fois tant en Espagne que lors de festivals à l'étranger et surtout lors de la dernière édition des Jornadas Comiqueras. Un fabuleux dessinateur autodidacte qui a travaillé pour DC mais surtout pour Marvel sur la plupart des plus grandes séries et un homme particulièrement chaleureux qui formait un trio exceptionnel en dédicace souvent entouré des célèbres Jesús Merino (son encreur attitré pendant toute une époque) et Pascual Ferry. En fait d'expo, il s'agissait surtout d'une vente aux enchères de prints et de quelques originaux réalisés par quatorze collègues dessinateurs au profit de l'association ELA qui s'efforce de lutter contre les maladies génétiques rares − les leucodystrophies− ayant précisément coûté la vie à Carlos Pacheco à l'âge de 60 ans. Cette vente aux enchères à atteint la somme de 3250 € ! Honnêtement, je m'attendais davantage à une exposition présentant le travail de l'auteur et surtout j'aurais aimé pouvoir admirer quelques-uns de ses originaux. En tout cas, elle m'a rappelé quelques-unes de mes précédentes rencontres et bons souvenirs partagés avec ce très grand auteur qui a marqué toute une époque au même titre que deux autres géants du comics disparus la même année : Georges Pérez et Neal Adams. Toute une époque ! Je n'arrive toujours pas à m'en remettre.
Le pavillon 5 hébergeait aussi d'autres expositions comme celle dédiée à Daniel Torres (Grand Prix du Festival 2022), qui présentait un large éventail de son travail notamment le célèbre personnage Roco Vargas de la série de science-fiction parodique du même nom. À l'étage inférieur, deux autres expos proposaient de découvrir le travail du scénariste et dessinateur José Escobar à travers les aventures des jumeaux Zipi y Zape, héros des nombreuses histoires courtes qu'il a créées et dont on célébrait le 75e anniversaire cette année, et celui de David López, dessinateur très prolifique dans le domaine des super-héros et héroïnes de comics DC et/ou Marvel.
Les expositions qu'il nous a été donné de voir dans le pavillon 5, également palais des congrès de Barcelone où se déroulent les rencontres, tables rondes, entretiens, masterclass avec les auteurs, mais aussi la remise des prix et diverses projections cinématographiques dans le grand auditorium, sont très accessibles, bien mises en valeur. Toutes bénéficient d'une présentation scénographique simple mais très efficace.
Si Créabulles a parfois regretté une faible occupation des espaces, cette année elle était bien plus dense notamment grâce au regroupement de l'Artist Alley/Fanzines et de la Cosplay Zone/Fan Zone auprès des stands des grands éditeurs traditionnels comme ECC Ediciones, Norma Editorial, Panini Cómics, Penguin-Random House, Planeta Cómic… Mais l'autre partie du pavillon 2 n'était pas en reste, réunissant les très nombreux stands des autres éditeurs comme Harrriet Ediciones, Astiberri, Dolmen, La Cupula, Ponent Mon et bien d'autres, ceux des librairies et des exposants de figurines, objets para-BD et/ou de collection, de quoi satisfaire tous les yeux et goûts des visiteurs en particulier ceux venus nombreux, souvent en famille ou en groupes d'ami(e)s tout au long d'un week-end ensoleillé. Petit regret cette année de ne pas trouver la maison d'édition Yermo Ediciones qui publie pourtant de très belles et excellentes séries illustrées par Jaime Calderón (Valois), Kyko Duarte (Elfes et autres séries dérivées), Alex Sierra (Nains, Orcs et Gobelin, Terres d'Ogon) ou Jérôme Lereculey (Les 5 Terres), etc. ni la maison d'édition Ominiky d'Oscar Martín ou encore Diabolo et Kraken. Enfin, deux autres attractions venaient compléter le décor, l'espace Nintendo toujours aussi fréquenté et Comics Kids, espace davantage ciblé enfants. Et comme toujours, les allées étaient largement fréquentées par de très nombreux cosplayeurs et cosplayeuses arborant les costumes de leurs personnages préférés, super-héros de comics, de manga, d'anime, de jeux vidéo et d'autres séries mais assez peu voire très peu de BD franco-belge. Nombreux se sont réunis lors de la grande parade du dimanche à travers le festival.
N'ayant pas reçu d'accréditation "presse", Créabulles n'a pu assister aux conférences, débats, tables rondes, notamment la master class donnée par Florence Cestac ou l'entretien consacré à Carlos Pacheco. On peut d'ailleurs regretter que celui-ci ait été programmé − peut-être maladroitement ou simplement par manque de disponibilité vu le grand nombre d'événements − à l'heure de table espagnole entre 14 et 15 heures.
Festival BD oblige, tout s'enchaîne à un rythme plutôt effréné. Nous voyons les files des séances de dédicaces se remplir très vite sur la plupart des stands des grandes et moins grandes maisons d'édition recevant auteurs/autrices nationaux et internationaux (par exemple Florence Cestac et Enrique Vegas chez Dolmen, Aude Picault chez Garbuix Books, Enrico Marini chez Norma, Igort chez Abacus, Casa del Libro et Penguin Random, Zerocalcare chez Penguin Random, Greg Tocchini, Matteo Scalera et Rick Remender ainsi que Bengal chez Norma) mais aussi dans l'Artist Alley où nous avons pu rencontrer Tirso Cons, Joan Mundet, Rafa Garres, Ramón Bachs, etc. mais aussi chez Ponent Mon, Astiberri, Dolmen, Harriet Ediciones entre autres. Créabulles a un grand nombre d'amis auteurs à saluer et/ou rencontrer durant le festival. Certains de ces rendez-vous étaient d'ailleurs organisés par Rafel Porta, ancien chef d'orchestre des regrettées Jornadas Comiqueras, avec lequel nous adorons collaborer. Nous avons aussi profité de l'heureux hasard de rencontres improvisées avec Fernando Dagnino, Jesús Alonso, Juan Díaz Canales, Miguelanxo Prado, Alberto Jiménez Alburquerque, Eduardo Ocaña, Jaime Martín ou Greg Tocchini et Matteo Scalera mais aussi lors de pauses au bar du festival avec le sympathique Enrico Marini en compagnie de nos amis Rubén Pellejero et son épouse Mercedes, Josep Homs, Rubén del Rincón ou autour d'un verre en compagnie de Jaime Calderón, Alex Sierra, Xavier Besse, Mateo Guerrero, Gregorio Harriet, Alex Macho et Garluk Aguirre, David Morancho.
Ces trois journées ont également été l'occasion pour Créabulles de préparer sa prochaine opération caritative à laquelle beaucoup des auteurs cités plus haut ont accepté de participer avec enthousiasme et de manière désintéressée.
Suivant un retour plutôt timide en 2022 après l'interruption due au Covid, le festival ne semble pas encore avoir retrouvé son affluence des années antérieures. Peut-être par manque d'invités internationaux de grand renom qui en faisaient alors l'un des festivals les plus attractifs en Europe.
En 2023, le grand prix du Festival Comic Barcelona a été attribué à la dessinatrice et illustratrice autodidacte Trinidad Tinturé, aujourd'hui âgée de 85 ans, pour l'ensemble de sa carrière.
Parmi les autres récompenses, citons également :
- Transitorios de Nadar (chez Astiberri), meilleure œuvre d'un auteur espagnol publié en Espagne, un one shot réunissant diverses histoires dans lesquelles l'auteur trace un portrait de la société actuelle. D'autres titres de Nadar ont été publiés en français chez Futuropolis.
- Escucha, hermosa Márcia de Marcello Quintanilha (chez Astiberri), meilleure œuvre d'un auteur étranger. Adaptation d'un one shot brésilien également publié en français sous le titre Écoute, jolie Márcia, par Çà et Là en septembre 2021 et ayant obtenu le Fauve d'or du Meilleur Album au Festival d'Angoulême 2022.
- Le Prix révélation Miguel Gallardo récompensant un jeune auteur a été décerné à Manuel Romero pour Goya. Saturnalia (Cascaborra Ed) sur un scénario de Manuel Guttiérez.
Au revoir. Et qui sait... à l'année prochaine.
Article: FPatrick et SDJuan
Photos sur place: SDJuan
Date de dernière mise à jour : 09/04/2023
Ajouter un commentaire