LES FILS D'EL TOPO
- Par asbl-creabulles
- Le 04/09/2019
Tome 2: Abel
Scénario : Alejandro Jodorowsky
Dessin : José Ladrönn
Couleurs : José Ladrönn
Dépot légal : Juin 2019
Editeur :
Collection: Grafica
ISBN : 978-2-344-00592-7
Nombre de pages : 70
Alors que Caïn et Abel ont pris des chemins différents, Caïn est sauvé in extremis des sables mouvants dans lesquels il est tombé par des Mormons auxquels il offre la jeune vierge qui l’accompagne en échange d’un cheval. Puis il retrouve son frère Abel qui a entrepris de transporter la dépouille de leur mère vers l’île Sainte. Abel lui avait demandé – même s’il sait qu’un jour Caïn le tuera de ses propres mains – de le rejoindre et de l’accompagner dans son voyage jusqu’à l’île pour y enterrer leur mère aux côtés de leur père, conformément à ses dernières volontés. Si Abel voit dans ce geste un moyen de parvenir à la sainteté, Caïn accepte uniquement de l’aider dans le but de s’emparer de menhirs en or.
Mon avis: Initiateur des "midnight movies" aux États-Unis grâce à John Lennon et Yoko Ono en décembre 1970 – minuit étant l’horaire de projection de nombreux films décalés aux États-Unis à cette époque alors que la France avait développé dès le début des années 60 un réseau de salles dites "art et essai" ayant contribué à l’éclosion d’un nouveau "cinéma d’auteur" – le film El Topo d’Alexandro Jodorowsky va contre toute attente rencontrer un succès planétaire avant de devenir un film culte. Malgré ce succès, Alejandro Jodorowsky ne parviendra jamais à convaincre Hollywood de produire une suite au cinéma. Attaché à son projet, Jodorowsky va dès lors choisir de la produire sous forme de BD sous le titre "Les fils d’El Topo", avec un premier tome intitulé Caïn paru en 2016 suivi d’Abel en juin 2019.
Cette nouvelle version d'Abel et Caïn est pour le moins décalée, avec un côté mystique affirmé qu'Alejandro affectionne tout particulièrement mais elle contient aussi beaucoup de violence, du sexe, des idées à foison et de l’inattendu. Si son ouvrage choque ou dérange, il n'en n'a cure et c'est tant mieux. La liberté d'expression a toute sa place dans ce récit qui n'arrête pas de nous surprendre, sorte de western violent tout à fait déjanté, surréaliste et allégorique. S’il est parfois difficile de tout comprendre, on est malgré tout fasciné, d’autant que le scénario de ce deuxième tome apporte de la clarté à une histoire plutôt confuse dans le premier opus.
Mais si l’album séduit c’est aussi grâce au travail spectaculaire de José Ladrönn qui est pour Jodorowsky le dessinateur attitré pour cette histoire. Car Ladrönn illustre à merveille la foule d'idées de Jodorowski en restituant les aspects fantastique, fantasmagorique, mythique et souvent provocateurs du récit. On ne voit pas souvent ce genre de western en BD, encore moins avec une telle qualité graphique. La mise en page est époustouflante, les illustrations se suffisent souvent à elles-mêmes. Une superbe couverture, de magnifiques paysages, de beaux visages particulièrement expressifs, des chevaux très réussis, un univers provocateur à la fois mystico-religieux et fantasmagorique, une très belle mise en couleurs, un découpage très cinématographique, tout contribue à faire de ce tome 2 un album de toute beauté.
L’aventure se poursuit donc et on attendra avec impatience une conclusion qui devrait en principe nous surprendre, Jodorowsky oblige, car pour les dessins Ladrönn sera encore une fois égal à lui-même.
SDJuan