LE PHOTOGRAPHE DE MAUTHAUSEN
- Par asbl-creabulles
- Le 09/08/2019
One shot
Scénario : Salva Rubio
Dessin : Pedro Colombo
Couleurs : Aintzane Landa Chillón
Dépot légal : Septembre 2017
Editeur :
ISBN : 978-2-8036-3525-2
Nombre de pages : 168
Fuyant l’Espagne franquiste, Francisco Boix est capturé par les Allemands et transféré avec d’autres compatriotes espagnols du Parti communiste au camp de Mauthausen dans le nord de l’Autriche annexée au IIIe Reich depuis 1938. Là, il va découvrir l’horreur d’un "camp de concentration et de travail": violence, cruauté, maladie, sous-alimentation, prisonniers mourant d’épuisement à la tâche ou exécutés si jugés trop faibles, etc. Francisco Boix a tôt fait de comprendre que son métier de photographe pourrait lui permettre de bénéficier de meilleures conditions de vie. D’ailleurs, il est rapidement remarqué par Paul Ricken, militaire SS responsable du service photo et identification du camp, qui justement a besoin d’un assistant vu l’ampleur de la tâche à accomplir. Car Paul Ricken, outre son travail de photographe d’identité voue une passion malsaine et sans mesure pour les portraits de cadavres de prisonniers. Ce travail "artistique" autour de la mort, véritable obsession de Ricken, va inciter Francisco à dénoncer l’horreur des camps. Réunissant un maximum de preuves (négatifs, tirages supplémentaires), le jeune espagnol n’a plus qu’une idée en tête, tout faire pour que ces témoignages des atrocités commises au camp de Mauthausen parviennent à Moscou. Dans un premier temps, il sera aidé par des compatriotes du Parti communiste espagnol, mais le risque d’être découvert augmentant, il se retrouvera vite seul.
Mon avis: Un récit impressionnant qui vous happe dès les premières lignes pour vous raconter le sort tragique de ces Espagnols venant de fuir une défaite dans leur propre pays, ballotés d’un camp à l’autre par leur voisin français et finalement envoyés dans le camp de la mort de Mauthausen! Scénariste historien, Salva Rubio a construit à partir de faits connus, auxquels il a ajouté une touche de fiction, une histoire au plus proche de la dure réalité de cette période. Cette trame insoutenable est d’autant plus crédible qu’elle s’appuie sur la détermination sans limite du héros, les difficultés qu’il a dû affronter et les dangers qu’il a courus et fait courir à ses compagnons du camp pour mener à bien son projet. Une narration impeccable parfois complétée par la voix off du protagoniste. On devine aisément la somme de recherches et l’énorme travail que cet album représente en parcourant la seconde partie (dossier de 55 pages) qui rassemble divers articles documentaires et didactiques ainsi que les photos précisément de Francisco Boix!
Le dessin de Pedro Colombo bien que simple et sobre se révèle très efficace pour restituer en images la complexité du scénario et bénéficie également d’un découpage réussi. Malgré le nombre élevé de personnages – prisonniers tous vêtus des mêmes habits rayés et soldats allemands gradés ou non des mêmes uniformes – tous sont aisément reconnaissables et expressifs, permettant une lecture fluide. Pedro Colombo réussit à les rendre presque vivants et évite les stéréotypes et le larmoyant. La mise en couleurs d’Aintzane Landa Chillón est toute en retenue, d’abord dans les tons gris teintés de bleu, de brun ou de rouge puis agrémentée de teintes très légèrement plus marquées et variées à la fin du récit.
Un album majeur constituant un témoignage bouleversant à mettre entre toutes les mains.
SDJuan